Fin de campagne présidentielle tendue en Tunisie
La campagne pour le scrutin présidentiel du dimanche 23 novembre s’est achevée en Tunisie dans un climat délétère. Pourtant, selon la Constitution, les prérogatives du chef de l’État sont bien moindres que celles du Parlement.
"J’ai fait l’impasse sur les législatives, mais dimanche je compte bien choisir mon président", lance Amine, un étudiant en économie qui votera pour la première fois. Comme lui, de très nombreux Tunisiens se focalisent sur l’élection présidentielle du 23 novembre même si le chef de l’État jouit de prérogatives bien limitées et que le Parlement détient l’essentiel des pouvoirs. "Qu’on le veuille ou pas, nous sommes dans un culte de la personnalité et encore plus du leader", explique Safoua, observatrice du déroulement du scrutin du réseau Mourakiboune.
Une course au palais de Carthage qui semble plus serrée que prévu pour le favori, Béji Caïed Essebsi (BCE), fondateur de Nida Tounes, formation qui a déjà remporté les législatives. Outre son âge avancé – 88 ans – , c’est bien la crainte de l’hégémonie de son parti qui joue en sa défaveur. Les plus récents sondages sont unanimes : l’écart entre l’ancien Premier ministre et Moncef Marzouki, président sortant et candidat à sa propre succession, n’était plus que de 5 points à 3 jours du vote, soit 33 % pour le premier et 27 % pour le second.
Menaces de mort
Une incertitude qui suscite une fin de campagne aux allures de pugilat verbal – au grand regret de nombre de Tunisiens exaspérés par un climat souvent délétère : la tension est si vive que les services de sécurité prennent très au sérieux les menaces de mort visant des dirigeants politiques. Agressions et violences politiques ont déjà fait jeter l’éponge à six candidats sur les 27 en lice, dont Mustapha Kamel Ennabli et Abderraouf Ayadi qui, bien que de bords opposés, ont tous deux ont dénoncé la tournure prise par la joute électorale et ses excès financiers… Car la campagne est aussi marquée par l’argent dont disposent certains postulants, comme Slim Riahi…
En attendant les élections, le pays est figé. La plupart des entreprises préfèrent reporter les décisions à la semaine prochaine alors que l’Assemblée nationale constituante a officiellement clos ses travaux et que le gouvernement de Mehdi Jomâa boucle ses derniers dossiers.
Deux favoris, deux outsiders
Encore une fois les Tunisiens sont divisés. Les bajboujiens, supporters de BCE, souhaitent faire oublier les frasques de Mohamed Moncef Marzouki, président provisoire depuis 2011 tandis que les "marzoukistes" refusent que l’État ne soit pas mené par un homme qui se réclame de la révolution. Entre les deux camps, l’offre politique semble restreinte, mais Hamma Hammami, porte parole du Front populaire opère une percée remarquable et Slim Riahi, fondateur de l’Union Patriotique Libre (UPL), espère mobiliser les inconditionnels de son équipe de football, le Club Africain, pour récolter les 600 000 voix requises selon les experts pour passer au second tour.
Dans tous les cas, l’un comme l’autre ne pourront que grignoter une part de l’électorat des deux favoris. "La plupart des électeurs ont déjà fait leur choix", précise Hassen Zargouni, patron de Sigma Conseil et véritable héros aux yeux des Tunisiens pour ses sondages d’opinion d’une redoutable précision. Reste que les dernières 48 heures seront décisives pour convaincre les indécis. Pendant ce temps, à Canberra (Australie), les Tunisiens ont déjà commencé à voter…
__________
Frida Dahmani, à Tunis
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Politique
- Le livre « Algérie juive » soulève une tempête dans le pays
- Maroc-Algérie : que contiennent les archives sur la frontière promises par Macron ?
- L’Algérie doit-elle avoir peur de Marco Rubio, le nouveau secrétaire d’État améric...
- En Algérie, le ministre Ali Aoun affaibli après l’arrestation de son fils pour cor...
- Au Bénin, arrestation de l’ancien directeur de la police