CAN 2017 : le Cameroun bat l’Égypte en finale (2-1) et devient champion d’Afrique
Les Lions indomptables sont à nouveau sur le toit de l’Afrique ! En finale de la CAN 2017, dimanche soir, à Libreville, au Gabon, la sélection camerounaise a battu avec la manière (2-1) l’Égypte, qui partait pourtant favorite de la rencontre.
De retour au plus haut niveau après avoir manqué les deux dernières éditions, le Cameroun est ainsi sacré pour la cinquième fois de son histoire champion d’Afrique, contre sept trophées pour son adversaire de la soirée. Mais c’est la première fois qu’il remporte une finale face à l’Égypte qui l’avait déjà dominé deux fois au même stade de la compétition, en 1986 (0-0, 5-4 t.a.b.) et en 2008 (1-0).
Les Camerounais, couronnés pour la dernière fois en 2002, ont marqué en seconde mi-temps par l’intermédiaire de Nicolas Nkoulou (59e) et Vincent Aboubakar (88e), Mohamed Elneny ayant ouvert le score pour l’Égypte en première mi-temps (22e).
Les sept « cadres », restés en Europe pour privilégier leur carrière en club et tant décriés par les anciennes gloires du football camerounais qui avaient fait de leur sélection l’une des places fortes du continent, risquent de regretter éternellement leur choix.
Peu de personnes pariaient sur le Cameroun
Car comme l’a souligné le capitaine Benjamin Moukandjo, la veille lors de la conférence de presse d’avant-match, très peu de personnes auraient parié sur sa formation. Surtout quand la Côte d’Ivoire, tenante du titre, l’Algérie et son Ballon d’Or africain Riyad Mahrez, ou encore le Gabon de Pierre-Emerick Aubameyang, pays-hôte, se présentaient sur la ligne de départ.
Et pourtant Hugo Broos, cible de nombreuses critiques avant le début de la CAN, et qui avait parié sur le rajeunissement de son groupe incarné par les révélations Fabrice Ondoa ou Christian Bassogog (21 ans), a réussi contre tout attente son audacieux pari, deux ans avant la CAN-2019 organisée à domicile.
Nkoulou et Aboubakar, « coaching-gagnant »
Pourtant sous les yeux de Gianni Infantino, président de la Fifa, Issa Hayatou, président de la CAF, et Ali Bongo, président du Gabon, hôte de la compétition, tous présents dans la tribune officielle, le technicien argentin a vu son coup tactique porté ses fruits d’entrée de jeu.
Alors que le Cameroun peinait à entrer dans la partie, Mohamed Elneny, titularisé par Cuper après avoir manqué les deux derniers matches sur blessure, en profitait pour sanctionner le manque d’attention de la défense adverse (22e).
Bien trouvé par Salah, le milieu d’Arsenal ne laissait aucune chance à Ondoa, pas exempt de tout reproche en fermant mal son côté fermé. Une ouverture du score qui cueillait à froid la dizaine de milliers de supporters camerounais venus garnir les rangs du stade de l’Amitié de Libreville.
Une égalisation qui mettait le feu à l’enceinte de Libreville
Un « coaching gagnant » auquel a répondu Hugo Broos dans la foulée. Après la blessure de son défenseur Adolphe Teikeu, le coach belge faisait entrer Nicolas Nkoulou (31e), qui mettait moins d’une demi-heure pour se montrer décisif en reprenant victorieusement de la tête un centre de Moukandjo (59e).
Une égalisation qui mettait le feu à l’enceinte de Libreville. Si Moukandjo ne réglait pas la mire (69e, 78e), et si Jacques Zoua négociait mal un contreintéressant (76e), l’ascendant psychologique avait bien basculé en faveur des camerounais, plus en jambes en fin de match que leurs adversaires à l’image de Warda, victime de crampes.
Dans ce match longtemps indécis, avec ses multiples rebondissements, qui semblait se donner son épilogue lors de la prolongation, Vincent Aboubakar a finalement offert le sacre aux siens en toute fin de match, d’une frappe enroulée imparable (88e). Un titre qu’ils défendront en 2019 à domicile.
Encore une finale perdue pour Cuper
Pour l’Egypte à l’inverse, cette finale laissera un goût amer, celui d’être passé à côté d’un incroyable retour gagnant sur la scène continentale, après une traversée du désert de sept ans. Essam El-Hadary, son portier légendaire de 44 ans, joueur le plus âgé de l’histoire de l’épreuve, ne réussira pas à décrocher sa 5e couronne ni à remporter une 4e finale disputée, comme son ancien coéquiper Ahmed Hassan.
Son jeune second Mohamed Salah, qui avait pourtant tout fait pour offrir le trophée à son pays en signant 2 buts et 2 passes décisives sur les cinq buts inscrits par l’Egypte durant la compétition, devra attendre encore pour connaître les joies de son aîné. Mais le plus malheureux est sans aucun doute Hector Cuper, définitivement maudit quand il s’agit de jouer une finale, et toujours en quête d’un trophée majeur à 61 ans.
Au total, Cuper, 61 ans, a perdu une bonne demi-douzaine de finales depuis qu’il a quitté l’Argentine pour des débuts comme entraîneur en Espagne il y a 20 ans. Sa première saison à Majorque se solde par une défaite aux tirs au but en finale de la coupe d’Espagne contre le Barça en 1998. Deuxième saison, nouveau coup de maître: l’équipe des Baléares atteint la finale de la dernière édition de la Coupe des coupes en 1999. Défaite 2-1 contre la Lazio de Rome.
L’ancien entraîneur de plusieurs clubs argentins (Lanus, Huracan) s’amuse ou s’agace selon son humeur de cette poisse systématique
L’année suivante, Cuper change de braquet en passant à Valence, dont les soirées à l’époque sont animées par les pointes de vitesse de son compatriote « El Piojo » Lopez. Nouvelle finale, la Ligue des championns cette fois-ci, en 2000. Mais le Real Madrid de Raul et Roberto Carlos ne lui laisse aucune chance (3-0).
Une nouvelle défaite en finale de C1 en 2001 avec Valence contre le Bayern Munich, sans oublier une finale perdue en Coupe de Grèce en 2010 avec l’Aris Salonique, avaient précédé le revers de dimanche soir à Libreville. L’ancien entraîneur de plusieurs clubs argentins (Lanus, Huracan) s’amuse ou s’agace selon son humeur de cette poisse systématique. « C’est vrai que je n’ai pas de chance en ce qui concerne les finales. J’espère qu’un jour j’en décrocherai une », déclarait-il encore mercredi dernier, après la qualification aux tirs aux buts aux dépens du Burkina Faso (1-1, 4-3 t.a.b.) pour la finale.
« Il faut être optimiste », avait ajouté l’austère Argentin au jeu défensif, tout en gratifiant la salle de presse d’un rare sourire détendu puis d’une séance de selfies improvisée avec les journalistes égyptiens. « Combien de finale avez-vous joué et combien en avez-vous gagné ? », lui avait demandé samedi avant la finale un journaliste de la BBC. Une question qui n’a pas plu à l’Argentin: « Vous connaissez l’histoire », a-t-il très sèchement répondu. Oui, hélas pour lui.
Avec la victoire des Lions indomptables en finale contre l’Egypte (2-1), c’est aussi l’histoire d’un homme de 64 ans, ancien défenseur d’Anderlecht et des Diables rouges, qui prend humblement sa revanche contre celles et ceux qui l’avaient oublié, à peu près tout le monde.
« Cela m’étonne un peu de voir qu’aujourd’hui, tout le monde loue mes qualités en Belgique », a d’ailleurs déclaré au journal flamand Nieuwsbald l’ancien joueur blanchi sous le harnais, mais svelte comme un jeune homme, les yeux clairs et rusés qui semblent éclairer un éternel petit sourire ironique.
Mes qualités étaient encore remises en doute il y a peu. Cela fait d’ailleurs des années que je n’ai pas reçu ma chance
« Mes qualités étaient encore remises en doute il y a peu. Cela fait d’ailleurs des années que je n’ai pas reçu ma chance. Personne ne me contacte. On m’a déjà dit que j’étais trop vieux, ou trop cher, alors que durant ces six dernières années, personne ne m’a demandé ce que je voulais comme salaire », a ajouté celui qui vient de rejoindre le cercle des Européens sans grade que l’Afrique tire soudain de l’anonymat.
Arrivé en février 2016 à la tête d’une sélection qui n’avait pas gagné de match en phase finale de la CAN depuis 2010, le natif de Humbeek a immédiatement été plongé dans les joies du marigot camerounais: presse intraitable, éternelles bisbilles joueurs/fédération sur le montant des primes, sans oublier les rodomontades de Roger Milla sur le thème du « c’était mieux de mon temps ».
Flegmatique
« Ce n’est pas agréable, certainement pas », assure Broos, critiqué jusqu’au début de la CAN. « Je n’ai pas compris pourquoi au début on ne m’a pas donné ma chance. Un journaliste doit être critique mais il faut rester correct. Et la correction n’était pas toujours là ».
Flegmatique, Broos a résisté aux assauts venus de toutes parts en restant fidèle à lui-même: « Je fais à ma manière. Si cela ne réussit pas, tant pis pour moi. Mais je pense qu’aujourd’hui, cela a réussi ».
Au chômage depuis plusieurs années, le Belge a su constituer un groupe avec des joueurs pour la plupart inconnus, pour parer aux défections de sept cadres, qui doivent se mordre les doigts de n’être pas venus au Gabon.
Alain Giresse, Hervé Renard, voire un nouveau retour de Claude Le Roy : on voyait plutôt très classiquement un Français, de préférence avec une expérience en Afrique, pour remplacer l’Allemand Volker Finke début 2016 à la tête du Cameroun.
« Habitué’ à la pression »
Difficultés financières de la Fédération, dans un pays qui connaît comme le reste de l’Afrique centrale un ralentissement de son économie ? Toujours est-il que le choix des dirigeants s’est porté sur un entraîneur belge (FC Bruges, Excelsior Mouscron, Anderlecht, Genk…), qui avait découvert sur le tard les joies de l’expatriation, avec de brèves expériences de clubs en Turquie, aux Emirats arabes unis, ainsi qu’en Algérie à la JSK où il ne reste que quelques mois.
La revanche des Lions, qui commençaient à subir le désamour de tout un pays, est aussi celle qu’il prend sur son propre parcours
Dès son arrivée à Yaoundé, le Belge a dû convaincre les sceptiques: « Je n’ai pas peur, je suis vraiment habitué à travailler sous pression ». « Evidemment, la pression est peut-être un peu plus forte ici, dans ce grand pays. Mais vous êtes habitué à cette pression lorsque vous avez entraîné des clubs en Belgique comme Anderlecht ou le FC Bruges », a-t-il insisté, sans convaincre grand monde à l’époque.
Avec deux matches nuls initiaux contre l’Afrique du Sud, Broos met en place sa méthode : faire tourner les joueurs, miser sur le collectif plutôt que sur des fortes individualités, donner leur chance à des nouveaux venus comme Christian Basogog (Aalborg/Danemark), désigné meilleur joueur du tournoi alors qu’il n’a été sélectionné pour la première fois qu’en novembre dernier.
Sur les coups de 22h00 ce dimanche à Libreville, le sexagénaire a couru comme un gamin pour venir partager la joie de ses joueurs sur le stade de l’Amitié. La revanche des Lions, qui commençaient à subir le désamour de tout un pays, est aussi celle qu’il prend sur son propre parcours.
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