Burundi : l’attaque contre le camp de Mukoni, nouveau signe de division au sein de l’armée ?
Pour les autorités, le vol était l’unique mobile de l’attaque contre le camp militaire de Mukoni, fin janvier. Une version qui ne convainc ni la société civile ni l’opposition qui y voient plutôt un autre signe de fracture au sein des Forces de défense nationale.
Alors que la justice a qualifié de « tentative de vol à main armée en bande organisée » l’attaque menée la nuit du 23 au 24 janvier contre le camp de Mukoni, en province Muyinga, dans le nord-est du Burundi, des voix s’élèvent, dont celle de Daniel Kabuto, un ancien cadre du système CNDD-FDD (au pouvoir) devenu frondeur et vivant en exil, pour critiquer une armée qui serait plus que jamais menacée d’implosion.
Pour étayer cette thèse, on cite notamment la vague d’arrestations qui a a suivi dans plusieurs camps militaires non liés à l’attaque, les soldats visés étant tous des membres des ex-Forces armées du Burundi (FAB, l’ancienne armée), 15 au total d’après « SOS Torture Burundi » qui regroupe les défenseurs des droits de l’homme du pays. Autre élément avancé : la justice n’a jamais précisé ce que les « bandits » voulaient voler. Sans compter que de nombreux précédents accréditent la thèse de la division qui rongerait l’armée burundaise.
Les avis divergent au sein de l’armée
L’attaque de Mukoni survient une année après l’assaut du 12 décembre 2015 contre deux camps militaires de Bujumbura, et une année et demi après le coup d’État raté du 13 mai de la même année mené aussi par un commando de mutins. D’où la question : quelle est aujourd’hui l’ampleur réelle du malaise au sein des forces de défense ?
Du côté des principaux intéressés, les avis sont tranchés, selon les sources consultées par Jeune Afrique. Un officier, ex-FAB, affirme que la tension est palpable dans les camps, et que la méfiance règne en maître. Un autre haut gradé, ancien rebelle, affirme quant à lui que tout va bien, que « c’est juste l’opposition qui veut nous diviser en vain ». Une appréciation contrastée, à l’image de ce qu’il se passe, semble-t-il, sur le terrain.
La prédiction de Niyombare ?
« Godefroid Niyombare avait pourtant tout prédit quand il dirigeait le Service national des renseignements », rappelle l’analyste politique Louis Marie Nindorera, déterrant ainsi un extrait qu’il considère comme « prémonitoire » du rapport confidentiel vieux de deux ans qui avait été adressé au président Pierre Nkurunziza pour le dissuader de briguer un troisième mandat, quelques mois avant l’annonce de sa candidature.
« En cas de ‘manifestations spontanées’, il y a un risque que les forces de l’ordre se désintègrent. En effet, les ex-FDD peuvent sentir une menace contre le pouvoir du système CNDD-FDD et vouloir voler à son secours. De leur côté, les ex-FAB peuvent être manipulés par l’opposition pour ne pas inquiéter les manifestants. Une telle situation peut conduire à la bipolarisation des corps de défense et de sécurité. Une éventualité qui deviendrait un grave danger pour notre société dont les plaies de la récente guerre civile ne sont pas encore totalement pansées », avait averti Niyombare dans sa note de renseignement de quinze pages, datée du 13 février 2015, qu’il avait remise avant de déclencher le coup d’État manqué du 13 mai 2015, pour ensuite disparaître de tous les écrans radars.
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