Centrafrique : le difficile chemin de la pacification
Trois hommes armés et deux civils ont été tués à Bangui lors d’un accrochage mardi soir, dans le quartier musulman du PK5 opposant la gendarmerie à un groupe dit d’autodéfense. Les accrochages de ce type sont de plus en plus fréquents, et pas qu’à Bangui.
Dans le quartier du PK5 mardi 8 février, les échanges de tirs ont duré une vingtaine de minutes d’après des témoins. Le ministre centrafricain de l’Intérieur, Jean-Serge Bokassa, a parlé d’une « opération visant à arrêter le chef du groupe armé qui sème la terreur dans le quartier du PK5 ».
Selon lui, le principal visé surnommé Big Man, aurait d’abord ouvert le feu sur les gendarmes venus l’interpeller, lesquels auraient « répliqué ».
Le site des déplacés de l’aéroport de Bangui, qui avait été évacué, est à nouveau occupé par une centaine de personnes fuyant les violences. « Ça risque de rompre la confiance entre la population et le gouvernement. Il est temps que le gouvernement centrafricain affiche une fermeté incontestable sinon les groupes armés vont profiter de cette passivité », estime un diplomate africain en poste à Bangui.
Mais cette insécurité ne se limite pas à Bangui.
À l’Est, affrontements entre ex-Séléka
Concernés par le processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), plusieurs groupes ont repris les hostilités dans le pays. À l’Est, de violents combats opposent depuis plusieurs jours, deux factions des ex-Séléka près de Bambari.
La coalition FPRC-MPC (Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique – Mouvement patriotique pour la Centrafrique), deux mouvements issus de l’ex-Séléka visent Bambari. Alors que l’UPC (Union pour la paix en Centrafrique), elle aussi issue de l’ex-rébellion, y a installé sa base depuis le départ de Michel Djotodia.
Alors que les violences s’intensifient autour de Bambari, la Minusca a annoncé via son porte-parole Vladimir Monteiro « le déploiement de 70 policiers supplémentaires pour renforcer l’effectif sur place ». La Minusca a déterminé d’une zone sécurisée que les combattants ne doivent pas franchir, « faute de quoi il y aura intervention », a-t-il insisté.
Autour de Bambari, « plusieurs civils » auraient été tués lors de ces affrontements, d’après Clovis Saramalet, un commerçant de la commune de Ndobissi, en fuite. « Les rebelles ont incendié toutes les maisons et tirent sur tout le monde. On a eu peur et on a fui », raconte-t-il.
Au Nord-Ouest, 3R contre anti-Balaka
Début février pourtant, le commandant des Casques bleus en Centrafrique, le général Bala Keita avait promis que la Minusca ne laisserait pas les combats atteindre Bambari, ce qui « provoquerait des milliers de victimes civiles et de déplacés ».
Dans le nord-ouest du pays, près de la frontière avec le Cameroun, un groupe rebelle baptisé 3R (Retour, Réclamation et Réhabilitation) et qui se présente comme le « garant de la protection des Peuls », commettrait un certain nombre d’exactions et se battrait régulièrement avec les milices anti-Balaka.
« En général, ils incendient et tuent tout sur leur passage. »
Sous-équipés, ces derniers battraient chaque fois en retraite devant les combattants de 3R, exposant les populations civiles aux violences. En effet, « lorsque des anti-Balaka volent le bétail des Peuls, les rebelles de 3R s’attaquent en représailles aux habitants des communes proches des environs. En général, ils incendient et tuent tout sur leur passage », explique un notable de Koui (Ouham-Pendé) sous couvert d’anonymat.
Dans les sous-préfectures de Bocaranga et de Koui, dans l’Ouham-Pendé (au nord de la Centrafrique), au moins 50 civils auraient été tués entre les 21 et 27 novembre 2016, d’après l’ONG Human Rights Watch.
Du côté des anti-Balaka, toujours sous les ordres de Patrice Edouard Ngaissona, le processus de désarmement initié par le gouvernement, reste la principale préoccupation. « Nous avons décidé de cesser toute hostilité. Nos hommes sont dans des zones de regroupement en attendant les procédures du désarmement », a assuré Igor Lamaka, porte-parole du mouvement. De nombreux chefs, les « com-zone », ont déjà repris des activités civiles.
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