L’urgence d’une coalition internationale anti-terroriste dans le Sahel

Publié le 7 novembre 2014 Lecture : 3 minutes.

Pierre Buyoya est haut représentant de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel/Chef de la Mission de l’UA pour le Mali et le Sahel.

Nous assistons aujourd’hui à un retour inquiétant de l’insécurité dans le septentrion malien. Pire encore : les activités terroristes vont crescendo dans toute la région sahélienne, et ce malgré la présence des forces onusiennes et françaises, et les pourparlers de paix en cours à Alger. L’insécurité persiste, les groupes terroristes utilisent des mines et des engins explosifs, et les contingents tchadiens, nigériens et sénégalais ont payé un très lourd tribu. Cette situation préoccupante s’étend même désormais au-delà du Sahel : au Nigeria, c’est l’une des plus grandes armée du continent qui est mise en difficulté par Boko Haram, un groupe terroriste qui fait preuve d’une incroyable barbarie, qui a manifestement une véritable stratégie d’occupation territoriale et dont la menace s’étend au-delà des frontières nigérianes.

la suite après cette publicité

Que faire face à cette situation ? Il faut d’abord renforcer les capacités des pays du Sahel, et c’est urgent. Un groupe comme Boko Haram dispose de moyens considérables et sophistiqués, parfois même plus efficaces que ceux de certains États. Les États de la région doivent donc impérativement renforcer leurs propres dispositifs sécuritaires pris dans leur acception large, incluant la prise en charge logistique, les tactiques opérationnelles ainsi que les stratégies de combats adaptées à la nature asymétrique de la menace. Et les partenaires bilatéraux et multilatéraux devraient avoir bien conscience de la nécessité d’investir de manière appropriée dans le domaine de la sécurité.

Il faut aussi promouvoir une meilleure coopération régionale. L’expérience montre qu’aucun pays du Sahel ne peut, à lui seul, faire face à cette menace transfrontalière. À cet égard, je tiens à souligner que l’Union africaine organise régulièrement des réunions des chefs des services de renseignement et de sécurité pour échanger sur la situation sécuritaire dans la région et promouvoir le partage d’informations. Notre ambition maintenant est de parvenir à mettre en place des mécanismes concrets pour faire face à la menace avec plus d’efficacité.
Je suis également convaincu qu’il faut créer une coalition internationale pour appuyer les efforts nationaux et régionaux. Le monde entier doit se mobiliser comme il le fait déjà contre les atrocités ignobles perpétrées par le groupe État islamique (EI) en Irak et en Syrie.

Le monde entier doit se mobiliser comme il le fait déjà contre les atrocités ignobles perpétrées par le groupe État islamique.

Par ailleurs, une réponse purement sécuritaire ne suffira pas : il faudra aussi renforcer les processus d’isolement idéologique et social des mouvements terroristes dans l’espace sahélien. Il s’agit de contenir l’influence de ces groupes par un travail d’éducation. Il faut soutenir et encourager les actions des leaders musulmans qui condamnent les agissements des groupes terroristes, comme l’ont fait, le 19 septembre dernier, 126 leaders musulmans du monde entier dans une lettre ouverte au chef de l’EI. Dans ce travail d’éducation, les médias ont eux aussi un rôle à jouer. Je les invite d’ailleurs à utiliser des mots justes, pour éviter de dangereux amalgames et aider la lutte contre un ennemi qui n’a d’autre religion que celle de la terreur et de la barbarie. Il ne faut pas fournir aux groupes terroristes une plateforme grand public leur permettant de diffuser leur message et de propager la peur.

Enfin, il convient de rappeler l’importance des questions de gouvernance et de développement. Les groupes terroristes se nourrissent parfois des manquements des États pour manipuler et attirer des jeunes désœuvrés. D’où la nécessité de promouvoir le développement, y compris dans les régions les plus reculées de nos pays.  À mon avis, ce  n’est qu’en adoptant cette approche globale que l’on pourra faire face à une menace multidimensionnelle. C’est là notre principal défi pour les mois à venir.

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires