Guinée : l’accord entre le gouvernement et les syndicats va-t-il mettre fin à la grève des enseignants ?

Un accord entre les syndicats de l’enseignement et le gouvernement a été atteint lundi soir. Mais la base semble ne pas avoir été consultée et les risques de poursuite de la grève sont réels.

Dans une classe d’une école de Bambeto, un quartier de Conakry, en Guinée. © Youssouf Bah/AP/SIPA

Dans une classe d’une école de Bambeto, un quartier de Conakry, en Guinée. © Youssouf Bah/AP/SIPA

DIAWO-BARRY_2024

Publié le 21 février 2017 Lecture : 3 minutes.

Cinq morts, 30 blessés (parmi les civils et les forces de sécurité), douze interpellations, des « dégâts matériels importants sur des ambulances et des centres médicaux communaux »… Tel était le bilan provisoire des violences survenues lors des manifestations du lundi 20 février à Conakry. Routes barricadées, pneus incendiés, circulation paralysée, échanges de projectiles entre jeunes manifestants et agents de sécurité, arrestations…il y a longtemps que la capitale, dans ses cinq communes, n’avait pas été ainsi secouée.

C’est dans ce climat de haute tension que les leaders de l’intersyndicale de l’éducation que composent, d’un côté, le Syndicat libre des enseignants et chercheurs de Guinée (SLECG) et la Fédération syndicale professionnelle de l’éducation (FSPE), et de l’autre, l’inter-centrale formée par la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG) et l’Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), ont annoncé lundi la suspension d’une grève qui avait commencé 14 jours auparavant.

la suite après cette publicité

Le secrétaire général de la CNTG, Amadou Diallo, a gagné le ministère de la Fonction publique, où a eu lieu la cérémonie de signature de l’accord de suspension, à bord d’un blindé, escorté par le coordinateur des unités d’intervention de la police, le colonel Ansoumane Camara dit « Baffoé ».

Le principal point de revendication non satisfait

Dans la salle de la signature, d’un côté les leaders syndicaux Amadou Diallo, Louis Bemba Soumah (USTG), Soulyemane Sy Savané (SLECG) et Amara Balato Keita (FSPE). En face, le ministre porte-parole du gouvernement, Albert Damantang Camara et Tibou Camara, le tout nouveau ministre d’État conseiller personnel d’Alpha Condé. À côté d’eux, les représentants du patronat et de la société civile.

L’inspecteur général du travail, Alia Camara, a lu l’accord obtenu sans la satisfaction de la principale revendication des grévistes concernant la nouvelle grille salariale qui avait abaissé les émoluments des enseignants. Le réexamen de cette question par une commission technique à mettre en place fin mars a été de fait renvoyé à septembre prochain.

la suite après cette publicité

Divergence entre le sommet et la base

Souleymane Sy Savané a déclaré que « les résultats obtenus peuvent être considérés comme satisfaisants. Nous pouvons annoncer sans ambages que la grève que nous avons déclenchée est suspendue. Nous donnons rendez-vous au mois de septembre pour la suite des négociations sur la grille salariale ».

la suite après cette publicité

Jusque-là, le syndicat s’était pourtant voulu intransigeant sur ce point qu’il qualifiait de « non négociable ». Les rares enseignants grévistes qui avaient, lundi matin, réussi à rallier la Bourse du travail, à Kaloum, pour écouter et donner leur avis sur le compte-rendu des négociations de la veille avant une éventuelle signature de l’accord, en étaient revenus avec, en main, un communiqué de dernière minute signée de la cellule de communication de l’intersyndicale SLECG/FSPE, expliquant que « la grève reste maintenue jusqu’à la satisfaction de tous les points de revendication, notamment le maintien de la valeur monétaire du point d’indice à 1030 et la rétrogradation ».

Dans notre convention, il était prévu que les résultats de nos négociations soient présentés à l’assemblée qui doit se tenir à la Bourse du travail

Au siège de l’USTG à Boubinet, non loin de la Bourse du travail, Aboubacar Soumah, secrétaire général adjoint du syndicat, explique que toute prise de décision requiert l’aval de la base. « Dans notre convention, il était prévu que les résultats de nos négociations soient présentés à l’assemblée qui doit se tenir à la Bourse du travail, en présence de tous les enseignants de Conakry et environs. C’est à cette assemblée de décider. Hier, on a obtenu un accord avec le gouvernement qu’on devait présenter ce lundi matin à nos mandants. Mais suite au blocage de la circulation, les enseignants n’ont pas pu rallier la Bourse du travail ».

Mais le secrétaire général du SLECG, Souleymane Sy Savané, nuance cette position. « S’il faut réunir toute la base, on peut considérer que les bureaux exécutifs nationaux de l’intersyndicale et de l’inter-centrale la représente. Toute déclaration pouvant suspendre la grève est la bienvenue. »

La reprise des classes pour mercredi ?

Après la signature de l’accord de suspension de la grève, le ministre de l’Enseignement professionnel et porte-parole du gouvernement, Damantang Albert Camara, a eu « le plaisir d’annoncer que les cours reprendront normalement sur toute l’étendue du territoire à partir de ce mercredi 22 février 2017. Les dispositions sont en train d’être prises pour que demain le calme revienne dans la cité, que les enseignants et les élèves s’apprêtent à rallier leurs salles de classe ». Pas sûr qu’il soit écouté.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Une salle de classe désertée, à Conakry, en Guinée, en janvier 2015. © Youssouf Bah/AP/SIPA

Guinée : pourquoi les enseignants sont-ils en grève ?

Contenus partenaires