Le Maroc, invité d’honneur du salon du livre de Paris : « Il n’y aura pas de tabous »
Au Maroc, on s’active pour préparer le salon du livre de Paris, dont le pays est invité d’honneur et qui aura lieu du 24 au 27 mars.
Alors que le ministère de la Culture est sur le pont, il est aussi sous le feu des critiques. Bichr Bennani, éditeur historique, à la tête des éditions militantes Tarik s’est plaint d’un manque de concertation dans les différents choix du ministère, depuis le choix du commissaire jusqu’à celui du libraire retenu pour le stand Maroc.
Bennani a aussi pointé du doigt l’absence de la littérature carcérale, un style important au Maroc, pays marqué par la période dite « des années de plomb », durant laquelle un grand nombre de citoyens ont connu l’enfermement et la torture. Le tempétueux éditeur a été rejoint dans sa colère par d’autres personnalités du secteur, comme l’auteur Abdelhak Serhane, grand nom de la littérature contemporaine marocaine.
Autre motif de mécontentement : la liste des auteurs retenus. En effet, quelques grands noms semblent manquer à l’appel. Le monument Abdallah Laroui, le très célébré Youssef Fadel ou encore l’éminent connaisseur de Ibn Khaldûn, Abdesselam Cheddadi n’ont pas été conviés.
Younes Ajarraï a été choisi par le ministère pour piloter la venue du royaume sur le salon, en qualité de commissaire général du pavillon Maroc. Passé par des institutions comme le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger, il a déjà eu l’occasion de chapeauter des manifestations culturelles au Maroc et à l’étranger, comme lorsque le Maroc était invité d’honneur du salon du livre de Genève en 2012. C’est lui qui répond à nos questions.
Jeune Afrique : Comment s’est jouée l’attribution au Maroc de l’invitation d’honneur ?
Younes Ajarraï : Le Maroc est depuis longtemps candidat à Livre Paris, comme beaucoup d’autres pays d’ailleurs. Le ministère marocain de la Culture, les éditeurs, les amis du Maroc ont toujours œuvré dans ce sens. Une opportunité s’est présentée cette année lorsque le Syndicat national de l’édition (SNE) et les organisateurs de Livre Paris ont sollicité le ministère pour faire du Maroc l’invité d’honneur 2017 du Salon. Et cela s’est fait.
Quelles sont les retombées attendues pour le Maroc et pour le secteur du livre ?
« Maroc à livre ouvert » est la thématique retenue pour cette présence marocaine à Paris et en France. Au-delà de l’accroche, il s’agit d’une invitation à venir voir, entendre et échanger avec ce Maroc et ses invités, de manière franche, amicale et ouverte. S’il devait rester une seule chose de cette manifestation entre les lettres marocaines et françaises, je forme le vœu de voir se mettre en place un véritable partenariat durable autour de la question de la traduction.
Nous pouvons ainsi imaginer un fonds dédié à la traduction, des bourses attribuées à des étudiants en traduction, des aides à destination des organismes de recherche en la matière, etc. Traduire des auteurs et des histoires, c’est traduire des univers, des imaginaires, des sensibilités. C’est donner au public la possibilité de découvrir l’autre, de le connaître, de le comprendre et donc de le respecter. Par les temps qui courent, il s’agit d’une œuvre urgente de salubrité publique.
Le salon est-il un moment pour les professionnels ou une occasion de faire découvrir la littérature marocaine ?
Il s’agit de tout cela à la fois. Faire découvrir les lettres marocaines à travers les écrivains, les essayistes et tous ceux qui contribuent à la production des idées est la première mission d’un salon du livre. Pour les professionnels, deux journées de travail sont programmées réunissant des éditeurs marocains et français le 22 mars, puis autour de la littérature jeunesse le 27 mars.
Nous espérons que cela déclenchera une dynamique de partenariat et d’échanges entre eux sur les questions de la cession de droits, de la coédition, de la diffusion, de la traduction, etc.
Combien d’éditeurs, d’auteurs et d’ouvrages marocains feront le déplacement ?
Nous avons inscrit 25 éditeurs sur le catalogue du salon et une vingtaine d’entre eux a reçu le soutien du ministère pour y participer. Plus de 60 auteurs et autres invités feront le déplacement et plus de 1 000 titres seront exposés.
Un important éditeur s’est plaint de ne pas avoir été convié. Comment a été faite la sélection des participants à ce salon ?
Je puis vous assurer que tous les éditeurs, à travers les deux unions professionnelles qui les représentent, ont été conviés à la cérémonie de signature de l’accord entre le Ministère de la culture et les organisateurs de Livre Paris. Par la suite, ils ont été constamment associés à la préparation du salon et tenus au courant périodiquement de l’état d’avancement à tous les niveaux.
Nous avons recueilli leurs propositions, observations et remarques concernant aussi bien l’aménagement du stand, le choix de leurs auteurs, la liste des titres qu’ils souhaitaient exposer, etc. J’ai moi-même eu des entretiens individuels avec la majorité d’entre eux et continue à le faire. J’ai par ailleurs consulté beaucoup d’auteurs et d’intellectuels pour imaginer la présence du Maroc en France. Il n’y aura pas de stand individuel d’éditeur, mais un Pavillon du Maroc où les éditeurs qui le souhaitent et dont les livres respectent les standards de la profession (ISBN, dépôt légal, etc.) pourront exposer leurs livres.
Ce n’est donc pas le ministère qui fait la sélection, mais bien les éditeurs en concertation avec le libraire en charge du pavillon. En dehors de cela, tout éditeur marocain qui souhaite prendre un stand doit s’adresser à Livre Paris. Je crains cependant qu’il ne soit trop tard.
Le Ministère participe-t-il financièrement ?
C’est le ministère qui prend totalement en charge les dépenses de cette manifestation.
Avez-vous une idée de moments forts à venir, d’évènements particuliers ?
Le programme est en cours de finalisation. J’en dévoilerai les grandes lignes au cours de la conférence de presse que les organisateurs donnent ce vendredi 24 mars. Mais je peux vous dire une chose : il n’y aura pas de tabous.
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