Guinée : bientôt sur les écrans radars des capital-investisseurs ?
Entre 2010 et le premier semestre de 2016, les fonds de capital-investissement (private equity) ont injecté 5,4 milliards de dollars (5 milliards d’euros) dans des entreprises en Afrique de l’Ouest.
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Baba Hady Thiam
Avocat aux Barreaux de Guinée et de Paris
Publié le 8 mars 2017 Lecture : 3 minutes.
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Mais aucun de ces investissements n’a été réalisé en Guinée, alors même que les entrepreneurs du pays peinent à financer leurs activités et n’ont d’autre choix que de s’autofinancer ou de recourir aux prêts bancaires. Certes, ces solutions permettent à bon nombre d’entreprises de concrétiser leurs projets. Mais elles sont souvent onéreuses ou insuffisantes pour pérenniser leur développement.
Les fonds de capital-investissement apparaissent donc comme une alternative complémentaire à ces formes classiques de financement, puisque les entreprises s’y associant bénéficient non seulement d’un financement à long terme (cinq à sept ans en moyenne), mais aussi de conseils pour améliorer leurs performances.
Le secteur informel représente 90 % des entreprises privées
Plusieurs facteurs expliquent qu’ils ne percent pas en Guinée. Tout d’abord, le secteur informel représente 90 % des entreprises privées. Ensuite, le mode de management traditionnel freine l’investissement : le fondateur de l’entreprise occupe généralement une position (trop) prépondérante, laissant peu de place à une direction collégiale, et il est souvent réticent à ouvrir son capital pour accueillir de nouveaux investisseurs.
Il faut donc sensibiliser les entrepreneurs guinéens aux bénéfices de l’investissement en fonds propres et combler le manque d’informations, afin de créer un pont entre les pourvoyeurs de fonds et les patrons désireux d’attirer des capitaux. Par exemple, il est important que ces chefs d’entreprise pensent à établir des systèmes de reporting réguliers et transparents, de manière à construire une base de données fiable qui facilitera l’évaluation de leur société. Les fonds d’investissement apprécient aussi l’utilisation d’outils d’aide à la décision, comme les tableaux de suivi, qui permettent d’observer l’évolution des indicateurs de performance de l’entreprise. Laquelle doit pouvoir communiquer des états financiers audités sur une période de trois à quatre ans.
Deux exemples à suivre : le Nigeria et le Ghana
Deux exemples à suivre : le Nigeria et le Ghana, qui attirent la grande majorité des placements réalisés par les fonds de capital-investissement en Afrique de l’Ouest. Au Ghana, le premier d’entre eux, le Ghana Venture Capital Fund, a été créé en 1991 et, dès 2004, le gouvernement ghanéen a structuré un fonds de 5,5 millions de dollars pour le financement des PME. Ce type d’initiatives a permis au secteur privé ghanéen de se formaliser et d’intégrer les critères d’investissement des fonds de private equity.
La création de fonds similaires en Guinée et la mise en place par le gouvernement d’une fiscalité adaptée au capital-investissement permettraient de vulgariser ce mode de financement. La Banque centrale de la république de Guinée (BCRG) a également un rôle à jouer, en donnant des gages forts de stabilisation de la monnaie guinéenne.
Il est d’autant plus urgent de s’engager sur cette voie que les signaux sont au vert. D’une part, on constate l’apparition d’une nouvelle génération d’entrepreneurs guinéens sensibles aux pratiques financières internationales et disposés à explorer les sources de financement alternatives. Ce sont pour la plupart des trentenaires qui reprennent l’affaire familiale ou des « repats » qui lancent une nouvelle activité.
D’autre part, la stratégie des fonds de capital-investissement étant de diversifier leurs portefeuilles, ils recherchent un environnement des affaires stable et des perspectives économiques prometteuses. C’est le cas de la Guinée, qui présente d’intéressantes opportunités dans des secteurs en pleine croissance tels que l’hôtellerie, l’agrobusiness, les infrastructures ou encore les biens de consommation. Aux décideurs guinéens de faire en sorte qu’elles soient valorisées aux yeux des fonds de capital-investissement.
Enfin, alors que les pays d’Afrique anglophone sont aujourd’hui frappés par une forte décélération de l’activité économique, ceux de la zone francophone se montrent plus résilients, à l’instar de la Côte d’Ivoire, qui a réussi à attirer 8 % des opérations de private equity réalisées en Afrique de l’Ouest sur la période 2010-2016. La Guinée pourrait s’accrocher à cette locomotive ivoirienne.
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