Hajo Andrianainarivelo : « Madagascar est passée d’une crise politique à une crise de gouvernance »

Hajo Andrianainarivelo est en colère. Le président du Malagasy Miara-miainga (MMM), l’une des principales composantes de l’opposition malgache, regroupée depuis 2013 au sein de l’alliance parlementaire Vondrona politika Miara-dia – Malagasy Miara-miainga (VPM-MMM), attend toujours que la Haute Cour constitutionnelle du pays accorde à son parti le statut d’opposant officiel au sein de l’Assemblée nationale.

Hajo Andrianainarivelo. © Vincent Fournier pour J.A.

Hajo Andrianainarivelo. © Vincent Fournier pour J.A.

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Publié le 8 mars 2017 Lecture : 3 minutes.

À bientôt 50 ans – il les fêtera le 22 avril -, l’ancien vice-premier ministre d’Andry Rajoelina a profité du premier congrès de son camp, en octobre 2016, pour rappeler son opposition à l’actuel président de Madagascar, Héry Rajaonarimiampianina. Qu’il compte bien défier lors des élections programmées en 2018.

Jeune Afrique : À dix-huit mois du prochain scrutin présidentiel, quel est votre sentiment sur la situation à Madagascar ?

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Hajo Andrianainarivelo : Le pays est à bout de souffle. Les communes ne reçoivent plus de subventions depuis trois ans. Une soixantaine de vindictes populaires a été répertoriée l’an dernier, soit autant que pendant la colonisation. Soixante-dix ans plus tard, cela montre bien que nous avons raté quelque chose. Le problème, c’est qu’aujourd’hui, les gens ont perdu confiance. Le pays est entièrement désorganisé et le président Rajaonarimiampianina n’a pas la légitimité nécessaire pour le remettre en marche.

Quel bilan dressez-vous de son action depuis trois ans ?

Lorsqu’il identifie un problème, au lieu de le résoudre, il s’occupe d’autre chose ! Il n’a aucun bilan à présenter. Un dirigeant a pour mission de trouver des solutions, pas des excuses. Il n’arrête pas de répéter qu’il a hérité d’une situation catastrophique mais il l’a connaissait puisqu’il a été ministre des Finances.

Pensez-vous qu’il puisse être réélu ?

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Il ne gagnera jamais les élections. Il ne dispose pas d’une base assez solide dans la capitale comme dans le reste du pays. Madagascar est passé d’une crise politique à une crise de gouvernance. Le gouvernement a déjà plusieurs fois affirmé sa volonté de reculer l’échéance électorale. Est-ce bien raisonnable ? Cela souligne juste sa volonté de refuser tout débat démocratique. On nous refuse le statut d’opposition officielle au sein de l’Assemblée nationale. On nous refuse le droit d’organiser des meetings. Il ne faudra pas s’étonner un jour de voir l’opposition descendre dans la rue.

Le plus gros souci du pays aujourd’hui, reste son niveau de corruption, devenu très inquiétant pour une économie placée en coupe réglée au profit de quelques-uns

Le président Héry a néanmoins réussi à faire revenir les bailleurs de fonds à Madagascar…

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Ils ont financé les élections de 2013, ils ne pouvaient pas rester à l’écart du redressement économique du pays ensuite. Ils ont attendu trois ans, mais ils savaient que leur retour était inéluctable. Maintenant, faire revenir les bailleurs au pays, ne remplit pas pour autant l’assiette de la population. La création d’entreprises a chuté de 20 % rien que l’année dernière, le prix du riz ne cesse d’augmenter, le trafic de bois de rose continue, etc… Le pays est dans un état désastreux. Mais le plus gros souci du pays aujourd’hui, reste son niveau de corruption, devenu très inquiétant pour une économie placée en coupe réglée au profit de quelques-uns.

Quelles sont priorités au sein du MMM ?

La restauration de l’État de droit, le respect des lois au sein d’un État fort, avec des institutions fortes. Il y a un effort urgent à réaliser en matière de sécurité, de lutte contre la corruption et de respect de notre Constitution. Nos institutions sont trop faibles. Elles n’assurent ni la protection des personnes, ni celle des biens ou des investissements. Relancer notre économie dans ces conditions relève d’une mission impossible.

Avez-vous déjà les prochaines élections en ligne de mire ?

Comme tout le monde. Le président aussi est déjà en campagne. Nous comptons déjà insister pour que l’on nous reconnaisse le statut d’opposition officielle pour que le débat politique puisse avoir lieu démocratiquement et légalement. C’est un gage de stabilité pour le pays. Nous allons aussi nous appuyer sur la plateforme de l’Alliance républicaine de Madagascar (Armada), qui a donné des résultats encourageant lors des élections communales de 2015. Les différents partis signataires se sont tous engagés à se ranger derrière l’unique candidat désigné par cette plateforme. À commencer par Andry Rajoelina.

Pensez-vous que ce dernier soit prêt à jouer le jeu ?

Je pense qu’il a compris la leçon. Lorsqu’il a été mis en première ligne, en 2009, il n’a pas osé aller jusqu’au bout. Or, quand on veut changer les choses, il faut oser. Aujourd’hui, nous parlons d’égal à égal, entre chefs de partis, avec l’objectif de changement tel que nous l’avions défini ensemble en 2009. J’ai honte de ce qui arrive à Madagascar. Je n’avais pas particulièrement d’ambition nationale lorsque j’ai débuté ma carrière politique, mais je me sens aujourd’hui investi d’une mission. Je n’ai pas le droit de laisser tomber mon pays.

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