Bénin : démission du ministre de la Défense sur fond de tensions autour du projet de réforme constitutionnelle

Le ministre de la Défense Candide Azannaï, soutien de la première heure de Patrice Talon, a déposé lundi sa démission au cabinet du président « pour protester contre les tensions sociales » liées à la volonté de ce dernier de faire passer en urgence au Parlement sa réforme constitutionnelle.

Patrice Talon, le président béninois, à l’Élysée le 16 avril 2016. © Michel Euler/AP/SIPA

Patrice Talon, le président béninois, à l’Élysée le 16 avril 2016. © Michel Euler/AP/SIPA

Fiacre Vidjingninou

Publié le 27 mars 2017 Lecture : 2 minutes.

« Je confirme que le ministre de la Défense Candide Azannaï a déposé ce matin une lettre de démission du gouvernement », a indiqué un membre du cabinet du président Talon qui a requis l’anonymat. Cette information a été immédiatement publiée sur la page Facebook de Azannaï puis confirmée quelques heures après par son suppléant à l’Assemblée nationale.

Cette annonce, qui fragilise le régime à cause de la proximité de Candide Azannaï avec Patrice Talon, survient trois jours après le rejet à l’unanimité par le Parlement de la demande d’examen en procédure d’urgence du projet de révision constitutionnelle voulu par le président. « Nous sommes dans un pays respectable et non une pétaudière », a fait observer un député ce jour au parlement.

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Un revers pour Talon

En effet, Patrice Talon a fait convoquer vendredi dernier les députés afin de voter en urgence la réforme constitutionnelle qui devrait consacrer entre autres un mandat présidentiel unique de six ans et donner de larges pouvoirs décisionnels au président de la République, qui ne serait plus obligé de passer par le Parlement pour les ratifications d’accords de prêt.

Sur les 160 articles de la Constitution du 11 décembre 1990, 43 ont été modifiés dans la nouvelle mouture, qui doivent être d’abord validés par les 4/5èmes de l’Assemblée nationale, comme le prévoient les textes.

Selon une source proche de Azannaï, « c’est la deuxième fois que le ministre démissionne. Quelques mois auparavant il avait déjà remis sa démission au président qui n’a pas accédé à sa demande. C’est ce qui explique qu’aussitôt déposée il l’a publiée sur sa page officielle ». Selon plusieurs autres sources les frictions entre les deux amis sont nées du fait que le portefeuille de la Défense soit le seul délégué auprès du président et que toutes les décisions se prennent au palais de la Marina.

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La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, selon une de ces sources : « Candide Azannaï a démissionné pour éviter d’être éclaboussé par un possible scandale dans l’acquisition de 400 véhicules pick-up au profit des forces de sécurité et de défense sans son accord préalable ».

Les magistrats dans la rue

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S’ajoute au contexte social la grève des magistrats. Lundi, l’Union nationale des magistrats du Bénin (UNAMAB) a organisé une marche sur le Parlement appuyée par les centrales syndicales pour exiger le retrait du projet, qui « porte atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire », selon son président Michel Adjaka. Ce dernier dénonce notamment une clause du texte qui permet à des représentants du gouvernement de siéger au sein du Conseil supérieur de la magistrature.

Fortement décrié pour sa méthode jugée cavalière, Patrice Talon a essuyé déjà plusieurs contestations qui jusque-là étaient restées sous le boisseau. Cette démission sonne le glas de l’union apparente du gouvernement depuis sa mise place et consacre de fait la fragilisation de la présidence de Patrice Talon.

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