Centrafrique – Anicet Dologuélé : « Samba-Panza n’est pas à l’écoute »
Pour l’ex-Premier ministre et futur candidat à l’élection présidentielle centrafricaine Anicet Dologuélé, le gouvernement centrafricain pèche par manque de transparence dans sa gestion et par son absence de concertation.
Premier ministre de 1999 à 2001 et ancien président de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (Bdeac) jusqu’en février 2010, Anicet-Georges Dologuélé, 57 ans, sera le candidat de l’Union pour le renouveau centrafricain (Urca) lors de la prochaine élection présidentielle. Il réagit aux révélations de Jeune Afrique sur la gestion du don de 10 millions de dollars accordé par l’Angola.
JEUNE AFRIQUE : La présidente de la transition, Catherine Samba-Panza, a assuré que l’argent donné par l’Angola avait "été utilisé pour assurer la sécurité du pays et la défense de la politique du chef de l’État". Ces explications sont-elles suffisantes ?
Anicet Dologuélé : Pas vraiment. Les Centrafricains et la communauté internationale méritent des explications claires. Il faut que les sommes dépensées soient justifiées et les opérations identifiées. Le pays est sous perfusion, et l’utilisation de chaque centime est surveillée par les donateurs et par la population.
Êtes-vous inquiet du retour de la violence à Bangui et de la façon dont les autorités de transition gèrent la situation ?
Les violences s’expliquent par le manque de confiance de la population envers ses institutions et ses représentants. Et les difficultés du gouvernement résultent d’un déficit de communication et d’une insuffisance de concertation avec les acteurs politiques. L’affrontement entre le chef de l’État et Alexandre-Ferdinand Nguendet, le président du Conseil national de transition (CNT), n’est pas sain. Il doit cesser ! La transition doit se dérouler dans un climat serein en attendant les élections. Catherine Samba-Panza n’est pas assez à l’écoute. J’espère qu’elle entendra le mécontentement de la population et de la communauté internationale.
La transition devrait prendre fin en février 2015, mais il semble que ce délai ne sera pas tenu…
Ce n’est pas une surprise : le décret régissant les activités de l’Autorité nationale des élections [ANE] a seulement été signé en juin, soit six mois après sa création. Les premiers salaires de ses membres n’ont été payés qu’il y a trois semaines, et le milliard de francs CFA qui devait être mis à la disposition de l’ANE par l’État n’a toujours pas été débloqué. De plus, les questions du mode d’enrôlement des électeurs, de la biométrie, du couplage présidentielle-législatives et des déplacés n’ont toujours pas été tranchées. Enfin, la charte constitutionnelle de transition empêche ses acteurs de se présenter aux élections. Il ne faut surtout pas la modifier.
L’ex-président Michel Djotodia dit vouloir revenir au pouvoir. Lui, comme François Bozizé, ont-ils encore leur place à Bangui ?
Le président Djotodia a montré qu’il n’avait ni l’expérience ni la capacité de diriger un pays. Comme tous les Centrafricains, il a des droits et des devoirs. À ce titre, il a des comptes à rendre sur la souffrance que son passage à la tête du pays a engendrée. Tous ceux qui ont du sang sur les mains doivent être traduits en justice. Si c’est le cas des anciens présidents Bozizé et Djotodia, ils doivent être jugés et condamnés. Cela dit, la Centrafrique est leur pays et je ne peux pas les empêcher d’y vivre.
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Propos recueillis par Vincent Duhem
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