Syrie : 72 civils tués dans une attaque au gaz toxique
Au moins 72 personnes ont perdu la vie ce mardi, dont 20 enfants et 17 femmes, dans une attaque au gaz toxique perpétrée par les airs dans la province d’Idleb au nord-ouest de la Syrie, d’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Une commission de l’ONU doit désormais enquêter.
Soixante-douze personnes, dont vingt enfants, ont péri mardi 4 avril, notamment par suffocation, des effets du « gaz toxique » émis lors d’une frappe aérienne, à Khan Cheikhoun, fief rebelle et jihadiste de la province d’Idleb, dans le nord-ouest du pays, a indiqué l’OSDH. Près de 170 personnes ont été blessées, selon l’ONG syrienne qui n’a pas été en mesure de préciser la composition exacte du gaz.
« Des victimes ont succombé après avoir été transportées dans les hôpitaux. Il s’agit de civils », a précisé à l’AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l’OSDH. Selon lui, suite à cette frappe aérienne, des dizaines de personnes souffrent de problèmes respiratoires et d’autres symptômes − évanouissements, vomissements, etc. −.
Selon le correspondant local de l’AFP, l’hôpital de Khan Cheikhoun où les blessés de la frappe aérienne étaient traités, aurait été bombardé ce mardi après-midi. Le journaliste rapporte d’importantes destructions mais il ne lui était pas possible à l’heure où nous écrivons de préciser s’il y a des victimes.
Qui a mené l’attaque ?
L’OSDH n’a pas pu elle non plus préciser si les raids aériens étaient le fait d’avions de l’armée syrienne ou de ceux de la Russie, allié du régime de Bachar al-Assad.
La Coalition nationale, importante composante de l’opposition syrienne, a pour sa part accusé le « régime du criminel Bachar » d’avoir mené ce raid avec des « obus contenant du gaz chimique ».
À la mi-journée, le régime syrien n’avait pas communiqué sur ces frappes.
« Les avions de l’armée de l’air russe n’ont mené aucune frappe dans la zone de la localité de Khan Cheikhoun », a assuré de son côté le ministère russe de la Défense dans un communiqué.
Le processus de négociation menacé
Cette attaque « remet en cause » le processus de négociation pour la paix en cours entre le régime et ses adversaires, a réagi auprès de l’AFP Mohammad Sabra, négociateur en chef de l’opposition. « Si l’ONU est incapable d’empêcher le régime de commettre de tels crimes, comment faire réussir un processus politique en vue d’une transition [en Syrie] ? »
Lors d’un entretien téléphonique, le président turc Recep Tayyip Erdogan a fait savoir quant à lui à Vladimir Poutine que ce type d’attaques « inhumaines » et « inacceptables » risquaient de gâcher les pourparlers d’Astana sur la Syrie si l’on en croit les indications de responsables au sein de la présidence turque à l’AFP.
L’ONU enquête
Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a fait savoir ce mardi que la France avait « demandé la convocation d’une région d’urgence au Conseil de sécurité de l’ONU ». Il a aussi qualifié cette nouvelle attaque chimique de « particulièrement grave » et d’ « acte ignoble ».
« L’utilisation d’armes chimiques constitue une violation inacceptable de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques (Ciac) et un nouveau témoignage de la barbarie dont le peuple syrien est victime depuis tant d’années », a ajouté le chef de la diplomatie française.
Bachar al-Assad est un criminel de guerre.
L’ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley, a pour sa part qualifié le chef de l’État syrien de « criminel de guerre » en conférence de presse. L’homme fort de Damas est d’après elle « une entrave à la paix pour longtemps » et la manière dont il traite les Syriens est « répugnante ».
« Nous ne pensons pas que le peuple veuille encore d’Assad », a poursuivi l’émissaire américaine, interrogée sur la potentielle candidature de Bachar al-Assad à la prochaine élection présidentielle, ajoutant : « Nous continuons à fermement condamner ce qu’Assad fait et a fait, et il continue à être directement sur notre radar en ce qui concerne ses agissements ».
La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a imputé, en marge d’une conférence internationale sur l’avenir de la Syrie qui se tient jusqu’à mercredi 05 avril à Bruxelles, la responsabilité de l’attaque au régime syrien.
De son côté, l’ONU a annoncé, sans plus de détail, en fin de journée ce mardi qu’une commission spéciale enquêterait sur l’attaque.
Attaques chimiques au chlore
Selon la coalition de l’opposition, cette nouvelle attaque rappelle celle perpétrée en août 2013 dans des banlieues rebelles de Damas, faisant au moins 1 300 morts. À l’époque, un accord russo-américain sur le démantèlement de l’arsenal chimique syrien, conclu en septembre 2013, avait écarté in extremis la menace de frappes américaines contre le régime.
Au début du mois de mars, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (Oiac) a indiqué enquêter sur huit attaques présumées au gaz toxique commises en Syrie depuis le début de 2017. En octobre 2016, le Conseil de sécurité avait reçu un rapport concluant que l’armée syrienne avait mené une attaque à l’arme chimique, sans doute du chlore, à Qmenas, dans la province d’Idleb, le 16 mars 2015.
Le conflit en Syrie qui est entré, mi-mars, dans sa septième année, a fait près de 320 000 morts, des millions de déplacés à l’intérieur du pays et provoqué l’exil de cinq millions de réfugiés au dehors. Selon l’ONU, il s’agit de la pire crise humanitaire depuis la deuxième guerre mondiale.
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