Présidentielle en France : Mélenchon empêche Macron de dormir !
Comme les Mousquetaires, les trois favoris de la présidentielle, Emmanuel Macron, Marine Le Pen et François Fillon, sont au nombre de quatre. Car le fondateur du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon poursuit inexorablement son ascension dans les sondages.
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Samy Ghorbal
Samy Ghorbal est ancien journaliste de Jeune Afrique, spécialiste de la Tunisie.
Publié le 11 avril 2017 Lecture : 3 minutes.
Alors que le scénario d’un match à trois entre Emmanuel Macron, Marine Le Pen et François Fillon paraissait bien en place, voici qu’un quatrième larron s’invite dans cette campagne électorale complètement folle ! Auteur d’une prestation tonitruante lors du débat télévisé du 20 mars, Jean-Luc Mélenchon a totalement largué le pauvre Benoît Hamon, le candidat du Parti socialiste trahi de toutes parts, et talonne désormais François Fillon dans les sondages. À 65 ans, le tribun assagi de La France insoumise savoure.
Ancien apparatchik socialiste né à Tanger et figure de l’aile gauche du PS, il se veut le porte-parole du « peuple » contre « l’oligarchie des puissants ». En 2008, il finit par rompre avec sa famille politique, convaincu que le parti de François Mitterrand avait « capitulé » et qu’il était illusoire de vouloir le transformer de l’intérieur.
Le demi-échec de 2012
Il fonda alors le Parti de gauche et s’allia au Parti communiste français. Candidat à la présidentielle de 2012, il créa la sensation en réunissant plus de cent mille personnes à la Bastille, le 18 mars, et fit un temps jeu égal avec Marine Le Pen, son ennemie intime. Mais le 22 avril, il finit à la quatrième place avec quelque 4 millions de voix et un peu plus de 11 % des suffrages exprimés. Un demi-échec. Il subit ensuite un camouflet aux législatives du mois de juin, avec une élimination au premier tour à Hénin-Beaumont, circonscription gagnée par la patronne du Front national.
Personne ne donnait donc cher de ses chances quand, en 2015, il annonça sa candidature à la présidentielle de 2017. Bien que son Front de gauche avec le PCF se fût sabordé, il disait vouloir défier François Hollande et prendre sur lui une ultime revanche. Hollande autoéliminé, Manuel Valls « dégagé » par les électeurs de la primaire, la percée de « JLM » s’opéra d’abord au détriment de Hamon.
L’ex-frondeur devenu candidat du PS n’est pourtant pas très éloigné de la ligne de Mélenchon, même si les deux hommes divergent sur l’Europe et la Syrie. Mais il incarne à son corps défendant la « vieille maison PS », que son rival s’est juré de détruire. À deux reprises, il lui proposa une alliance, mais comment faire boire un âne qui n’a pas soif ? Hamon fut éconduit et commença à dévisser dans les sondages…
Enthousiasme
Les cartes sont aujourd’hui rebattues. Mélenchon peut-il viser encore plus haut, la troisième, voire la deuxième place au premier tour ? L’hypothèse est peu vraisemblable, mais sait-on jamais ? Macron demeure le favori, mais peine toujours à convaincre. Solide sur son socle, Fillon reste plombé par les affaires, et Le Pen ne progresse plus.
Mélenchon est le seul à bénéficier d’une dynamique.
Mélenchon est le seul à bénéficier d’une dynamique, d’ailleurs enclenchée au meilleur moment, à un mois de l’élection. Le seul aussi à susciter l’enthousiasme de ses partisans. Son ascension, il la doit davantage à sa personnalité et à son bagout qu’à la force de son programme. Depuis qu’il a renoncé à manger de la viande et s’est converti au quinoa, la graine sacrée des Incas, il a « verdi » son discours, veut « faire payer la finance » et en finir avec la monarchie républicaine en instaurant une VIe République.
Sa ligne est plus radicale qu’en 2012, et ses manières plus policées : il s’abstient désormais d’attaquer les médias, s’énerve moins qu’avant et troque son costume d’imprécateur pour celui de vieux sage. Tout se passe comme si les Français saluaient en lui l’artiste de la politique, indépendamment du choix qu’il leur propose.
Future cohabitation ?
S’il confirme dans les urnes sa percée sondagière, le leader de La France insoumise pourrait devenir pour Macron un gros caillou dans la chaussure dans la perspective des législatives du mois de juin. Car ce dernier, s’il accède à l’Élysée, devra bien, pour gouverner, s’appuyer sur une majorité parlementaire.
Sachant que ses propres troupes, rassemblées dans le mouvement En marche !, ne suffiront pas à la tâche, Macron table sur des ralliements individuels venant de la droite et du bon vieux PS ! Que ce parti soit trop affaibli, dévitalisé, cannibalisé par La France insoumise, et c’est tout son plan qui s’effondre.
Même si aujourd’hui les deux hommes s’épargnent, Mélenchon ne s’alliera jamais avec Macron, beaucoup trop libéral à ses yeux. Le président nouvellement élu pourrait alors se retrouver contraint d’emblée à une cohabitation inédite. Tout ça pour ça !
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