D’un virus à l’autre

FRANCOIS-SOUDAN_2024

Publié le 13 octobre 2014 Lecture : 2 minutes.

Les jihadistes décapiteurs qui sévissent des montagnes du Djurdjura aux plateaux du Xudur présentent un avantage stratégique considérable à ceux qui les combattent : ils sont infréquentables. Ces meilleurs ennemis ne sont soutenus par aucune puissance, aucun État, aucune armée, et leur éradication est considérée comme une oeuvre de salut public que nulle ONG droit-de-l’hommiste ne songerait à critiquer, dans le fond comme dans la forme.

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Du coup, ce qu’il faut bien appeler une recolonisation sécuritaire de l’Afrique (et bientôt sanitaire, si Ebola est pris en charge en tant que menace mondiale) passe inaperçu. Mieux : elle est la bienvenue aux yeux des pays hôtes, et les prurits nationalistes politiquement motivés (ou manipulés) qu’elle suscite parfois auprès de certains leaders d’opinion, qu’ils soient de l’opposition ou du pouvoir, n’ont aucun rapport avec l’anticolonialisme militant d’autrefois, quand il était de bon ton de dénoncer les bases étrangères et le soutien accordé par l’Occident aux dirigeants des États compradores.

Il y a quarante ans, l’ingérence avait le visage de la guerre froide. Soviétiques et Américains se disputaient le ventre mou du continent par Cubains et Sud-Africains interposés, alors que les Français se chargeaient de repousser la légion islamique de Kadhafi au Tchad et les gendarmes katangais au Shaba. Queue de comète de cette époque oubliée où l’ancien maître colonial donnait le coup de pouce ou le coup de grâce en fonction du degré de compatibilité d’un régime avec ses propres intérêts, la chute de Laurent Gbagbo, en 2011 marque la fin du film. Face au chaos et à la barbarie, place aujourd’hui à l’ingérence vertueuse, nécessaire et vitale.

Avez-vous remarqué comment Barack Obama passe du terrorisme à Ebola, d’un virus à l’autre, avec les mêmes mots : "anéantir", "éradiquer", "danger mondial" ? Ce que l’Afrique, incapable de prendre en charge sa propre sécurité, y perd en indépendance, nul doute qu’elle le gagne en attractivité puisqu’il n’y a jamais eu sur son sol, depuis la décolonisation, autant de militaires étrangers. Même si elle se serait bien passée de cet atout-là.

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Militaires français aux premiers jours de l’opération Serval, en janvier 2013. © Issouf Sanogo/AFP

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