Élections au Mozambique : le retour surprise d’Afonso Dhlakama

Succès d’estime, de curiosité, ou véritable regain de popularité ? Alors que beaucoup le pensaient politiquement mort, Afonso Dhlakama, le leader historique de la Renamo, en campagne pour la cinquième fois à la présidentielle de son pays, opère un spectaculaire retour en force, à quelques jours des élections générales mozambicaines.

Afonso Dhlakama n’a recueilli que 16,5% des suffrages en 2009. © Billal Sulay/DR

Afonso Dhlakama n’a recueilli que 16,5% des suffrages en 2009. © Billal Sulay/DR

Publié le 6 octobre 2014 Lecture : 2 minutes.

Samedi 4 octobre, à l’occasion de la célébration des accords de paix qui mirent fin à la guerre civile, en 1992, une foule immense et compacte se pressait à Tete (Centre) pour assister à l’arrivée du leader de la Renamo, Afonso Dhlakama. Même scénario quelques jours plus tôt à Maputo, Chimoio, Nampula, Quelimane… En tournée électorale, avant la présidentielle du 15 octobre, l’éternel rebelle multiplie les arrivées triomphales dans les principales villes du Mozambique, un phénomène qui laisse la plupart des commentateurs politiques pantois.

Ce regain soudain de popularité paraît inespéré : aux dernières présidentielles, le candidat Dhlakama n’avait recueilli que 16,5% des suffrages, un piètre score face aux 75% du président Guebuza. Vivant reclus jusqu’à très récemment dans les montages de Gorongosa, l’opposant historique a fait l’objet de moqueries de toutes parts, alors que l’émergence du Mouvement démocratique du Mozambique (MDM), une scission de la Renamo dirigée par l’actuel maire de Beira, Daviz Simango, met sérieusement en péril sa position de principal adversaire du pouvoir.

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Afonso Dhlakama en meeting à Quelimane, le 1er octobre. © Billal Sulay/DR

Bains de foule

"Avec ou sans tee-shirts, nous gagnerons", déclarait la député Renamo Ivone Soares, en référence aux matériel de campagne que le Frelimo distribue allègrement. Face au rouleau compresseur qu’est la machine électorale frélimiste, dont les pancartes sont visibles jusque dans villages les plus reculés, l’équipe de campagne de Dhlakama a tout misé sur sa tournée à travers le pays. Une stratégie qui pourrait se montrer gagnante au vu des bains de foules qui se créent dès la descente de l’avion de l’ancien chef de guerre.

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Afonso Dhlakama semble être celui qui tire les plus grands bénéfices politiques du récent cessez-le-feu entre son parti et le gouvernement, signé le 5 septembre dernier à Maputo après qu’ils sont rentrés en conflit ouvert en octobre 2013. Responsable de la paralysie du pays pendant plus d’un an et demi, Dhlakama apparait comme le seul capable de faire plier le Frelimo. "Le fait que le gouvernement soit mis en défaut par un petit groupe armé montre qu’il perd de sa puissance", explique Eduardo Namburete, tête de liste de la Renamo à Maputo pour les législatives. La Renamo a notamment obtenu une modification de la loi électorale qui devrait compliquer les tentatives de fraudes de la part du parti au pouvoir.

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Meeting d’Afonso Dhlakama à Nampula, le 21 septembre. © Billal Sulay/DR

Monétisation électorale

Il reste cependant à voir si la Renamo parviendra à transcrire ce regain de popularité en voix le 15 octobre prochain. "Tout va se jouer sur la capacité de Dhlakama à convaincre les abstentionnistes de revenir voter, explique le journaliste d’opposition Fernando Veloso. Or beaucoup d’entre eux n’ont pas forcément fait les démarches nécessaires". En 2009, seul 42% de l’électorat s’était présenté le jour du vote.

En l’absence de sondages, l’issue du prochain scrutin paraît donc de plus en plus incertaine. "Les bains de foules ne déterminent pas le vainqueur des élections", écrivait sur sa page Facebook Gabriel Muthisse, le ministre des Transports et des Télécommunications, en réponse au "phénomène Dhlakama". Face au mutisme du parti au pouvoir, l’éventail des options ne cesse de s’élargir, alors que le MDM et la Renamo multiplient l’un vers l’autre les signes d’ouverture, laissant présager une possible alliance en cas de second tour.

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Adrien Barbier, à Maputo

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