Guinée : le prédicateur Oustaz Taïbou et sa femme condamnés pour escroquerie, leurs biens saisis
Le Tribunal de première instance de Mafanco, en banlieue nord de Conakry, a rendu ce vendredi un jugement condamnant à 18 et 15 mois de prison le prédicateur islamique Oustaz Taïbou Bah et sa femme, Hafsatou Baldé, pour escroquerie. Leurs avocats ont déjà annoncé qu’ils feraient appel de cette décision.
Le jugement du tribunal était attendu, ce vendredi 14 avril à Mafanco. Sa présidente, Djénabou Donghol Diallo a annoncé, dans l’après-midi, qu’elle « recevait la constitution de partie civile de monsieur Thierno Nouhou Diallo » et qu’elle le déclarait « bien fondé ».
Par conséquent, le tribunal a condamné le prédicateur Oustaz Taïbou Bah et sa femme à, respectivement, 18 mois de prison dont 12 avec sursis, et 15 mois ferme. Le premier devra en outre s’acquitter d’une amende de 20 millions de francs guinéens (près de 2 000 euros) et de 30 millions de francs guinéens (près de trois mille euros) pour la seconde.
Par ailleurs, les époux devront solidairement rembourser les 8 086 milliards de francs guinéens (soit un peu plus de 811 000 euros) estimés dûs à la partie civile, Thierno Nouhou Diallo, un spécialiste des opérations de change.
En outre, le tribunal de première instance de Mafanco « valide la mesure conservatoire sur les biens immeubles portant sur les parcelles » (cinq au total) du couple, dont deux se trouvent à Conakry, deux à Dubréka et une à Coyah, deux préfectures situées respectivement au nord-est et au sud-est et quasiment à équidistance (cinquante kilomètres) de Conakry.
Appel annoncé
Aussitôt le jugement rendu, la réaction brève et ferme de la défense ne s’est pas fait attendre. « C’est un mal jugé, constate Me Thierno Ibrahima Barry », visiblement mécontent. « Conformément à la loi, poursuit-il, nous allons relever appel de toute la décision, et sur l’action pénale et sur les intérêts civils. Nous estimons que le droit sera dit en appel. »
À l’inverse, la partie civile se dit satisfaite. « On s’attendait à une telle décision, se réjouit Me Alsény Aïssata Diallo. Le droit était de notre côté et le tribunal nous a suivis, nous qui sommes victimes, ainsi que les réquisitions du ministère public. C’est une sage décision. »
« On aurait pu ne pas en arriver là »
Le prédicateur, de son vrai nom Mamadou Taïbou Bah, est apprécié et respecté pour ses prêches, tant en Guinée qu’à l’étranger. Sa condamnation pour des faits d’escroquerie fait réagir, notamment au sein de la communauté musulmane.
El Hadj Amadou Diallo, érudit et connaissance de longue date du prédicateur la trouve anormal « On n’aurait pu ne pas en arriver là », estime-t-il. Il fait là référence aux nombreuses médiations qui, en amont, ont échoué dans leurs tentatives de régler l’affaire à l’amiable.
Amadou Digo Ly, membre de la ligue islamique communale de Dixinn et maître coranique à la mosquée de Hafia, en banlieue de Conakry, constate pour sa part que « si les chefs religieux se retrouvent dans des scandales, la religion en prend un coup ». C’est la raison pour laquelle « le choix de l’imamat doit reposer sur des critères », poursuit-il.
Si les chefs religieux se retrouvent dans des scandales, la religion en prend un coup.
Pour commenter l’affaire, ce fidèle musulman marche sur des œufs. « Je ne suis pas surpris de voir Oustaz Taïbou se retrouver dans un tel scandale, car nul n’est parfait. Mais aucun musulman ne souhaiterait être dans une telle situation, vu comment l’Islam est actuellement stigmatisé ».
Aucune date concernant l’appel de cette décision n’a pour le moment été communiquée.
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