Corruption en Tunisie : des ONG nationales et internationales appellent au retrait définitif d’un projet d’amnistie

Vingt ONG tunisiennes et internationales ont appelé mercredi au retrait « immédiat et définitif » d’un projet de loi initié par la présidence de la République, qui prévoit l’amnistie pour des faits de corruption en échange d’un dédommagement.

Une pancarte de protestation contre la loi sur la réconciliation économique, le 12 septembre 2015, à Tunis. © Riadh Dridi/AP/SIPA

Une pancarte de protestation contre la loi sur la réconciliation économique, le 12 septembre 2015, à Tunis. © Riadh Dridi/AP/SIPA

Publié le 27 avril 2017 Lecture : 2 minutes.

Ce texte est « en contradiction avec les principes du droit à la vérité et de la lutte contre l’impunité » et « menace la transition démocratique », ont-elles écrit le 26 avril dans un communiqué titré « Blanchir les corrompus, une priorité nationale ? ».

Parmi les signataires : la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme (LTDH), Avocats sans frontières (ASF), le Labo démocratique,  l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) ou encore Al Bawsala.

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Proposé en 2015 par le président Béji Caïd Essebsi, ce projet dit « de réconciliation » prévoit l’amnistie de personnes – notamment d’hommes d’affaires ou d’anciens du régime du dictateur déchu Zine el-Abidine Ben Ali – poursuivies pour corruption en échange du remboursement des sommes indûment gagnées et d’une pénalité financière. Défendu par le président comme une tentative d’ « améliorer le climat de l’investissement » dans un pays économiquement en difficulté, il est vivement critiqué par la société civile.

Des milliers de fonctionnaires et autres citoyens concernés

Provisoirement mis de côté l’an dernier, le projet a refait son apparition mercredi 26 avril avec l’audition d’un conseiller du président, Selim Azzabi, par la commission de législation générale du Parlement.

Selim Azzabi a indiqué à la presse après son audition que le projet concernait de 4000 à 8000 « fonctionnaires n’ayant pas tiré profit de manière directe ou indirecte (de la corruption, NDLR) et n’ayant pas abusé de l’argent public », et de 2000 à 3000 « citoyens en ayant tiré profit directement et indirectement ».

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« Cette initiative législative vise principalement à restaurer la confiance entre le citoyen et l’administration d’une part, et entre l’État et les investisseurs d’autre part », a-t-il ajouté.

Selon les défenseurs du projet, les fonctionnaires concernés sont ceux qui auraient été obligés de fermer les yeux sur des faits de corruption. Les plaintes contre eux seraient stoppées.

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Des « conséquences économiques désastreuses »

« L’amélioration du contexte économique nous tient à cœur (…) » et c’est pourquoi « nous nous opposons à ce projet, qui empêche l’assainissement des institutions de l’État et des pratiques de corruption aux conséquences économiques désastreuses pour le pays », a fait savoir l’association tunisienne Labo’ démocratique.

« Ce projet de loi, s’il est validé, contribuerait à instituer la corruption et la mainmise des bandes mafieuses de la haute finance sur l’économie tunisienne pour poursuivre le pillage de l’économie nationale et des finances publiques », s’est également insurgé le parti Ettakatol début avril dans une pétition signée par plusieurs autres personnalités politiques et associatives.

Le collectif Manich Msamah (« Je ne pardonne pas »), formé en août 2015 par de jeunes internautes, prévoit quant à lui de nouvelles manifestations contre ce projet de loi. Vêtus de t-shirts estampillés du marteau de la justice, ses militants contre l’oubli ont décrété un « état d’urgence populaire » le 25 juillet 2016, et ce jusqu’à l’abandon total du projet de loi sur la réconciliation économique et financière.

« Nous allons appuyer tous les mouvements citoyens pacifiques refusant ce projet », ont averti les vingt ONG signataires du communiqué, soulignant que le projet de loi était remis sur la table « au moment où le pays vit des défis sociaux nouveaux et importants ».

Des manifestations pour réclamer emplois et développement ont en effet eu lieu ces dernières semaines, notamment à Tataouine (sud) où le chef du gouvernement Youssef Chahed se rend jeudi 27 avril.

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