Exclusif – Niger : la commission d’enquête parlementaire a rendu ses conclusions sur l’Uraniumgate
La commission d’enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur l’affaire de l’Uraniumgate au Niger a rendu son rapport au président de l’Assemblée nationale. Elle estime que Niamey a bien participé à une transaction avec Areva en 2011, sans toutefois dépenser le moindre sou.
Selon les conclusions de la commission d’enquête parlementaire, qui ont été transmises au gouvernement mercredi 26 avril et dont Jeune Afrique a obtenu copie, Hassoumi Massaoudou, à l’époque directeur de cabinet du président Issoufou, a bien été sollicité en 2011 par Sébastien de Montessus, directeur de la branche Mines d’Areva. Ce dernier proposait au Niger d’intégrer, via la Sopamin, une transaction de 5,5 millions de livres d’uranium passée entre le géant du nucléaire français et la société Optima Energy, pour 319, 826 millions d’euros.
En échange, Areva s’engageait à dédommager Niamey, en lui accordant des fonds officiellement dédiés à aider le pays à sécuriser ses sites miniers, notamment autour d’Arlit, visés peu auparavant par des preneurs d’otages.
Officiellement mandaté par la Sopamin, Hassoumi Massaoudou, aujourd’hui ministre des Finances, aurait donc créé le 8 décembre 2011 un compte bancaire à la BNP Paribas, destiné à recevoir les fonds versés par Areva et devant servir à payer l’uranium fourni par la société Optima Energy.
Un intermédiaire à 800 000 dollars
Le 9 décembre, Areva, via sa filiale à Francfort, en Allemagne, crédite le compte de la Sopamin de la somme de 320 649 942, 72 dollars. Le 15, la Sopamin transfère 319 825 078, 52 dollars sur le compte d’Optima Energy à Dubaï pour l’achat de l’uranium.
Bilan de l’opération, comme l’indique le relevé bancaire que Jeune Afrique a pu consulter : Niamey réalise une plus-value d’un peu plus de 800 000 dollars, en ayant accepté de servir d’intermédiaire pour Areva. Ces fonds sont reversés le 28 décembre au Trésor nigérien, puis mis à disposition de la présidence le 18 janvier 2012, à la demande d’Hassoumi Massoudou.
Selon le ministre des Finances, auditionné, comme tous les acteurs du dossier, pendant près d’une heure et demie par la commission le 28 mars dernier, la somme aurait alors été investie dans la sécurisation des sites miniers du pays. En conclusion, la commission d’enquête parlementaire « rejette donc tous les soupçons » de détournements avancés par une partie de la presse nigérienne, explique Saddi Soumaïla, son président.
« L’argent n’est pas celui du Niger »
« L’argent ayant servi à l’achat de l’uranium n’est ni celui du Niger, ni celui de la Sopamin, mais vient d’Areva », ajoute la commission. Elle regrette par ailleurs les retombées négatives pour la Sopamin, explique-t-elle dans le document remis à la présidence de l’Assemblée nationale.
Le document n’a toutefois pas été validé par deux des dix membres de la commission, issus de l’opposition. Ceux-ci, dont le député Soumana Sanda, estiment avoir été mis à l’écart de sa rédaction. Une accusation que rejette formellement Saddi Soumaïla, contacté par Jeune Afrique, dénonçant une manœuvre politique.
L’affaire ne se limite toutefois pas à sa partie nigérienne, la justice française ayant lancé des investigations dès 2015 sur cette transaction d’uranium, qui incluait également une société russe, Energo Alyans. Selon Areva, la vente aurait en réalité été finalement annulée, Optima Energy n’étant pas parvenue à assurer la livraison du stock.
Les sommes engagées auraient alors été remboursées, notamment entre Optima Energy et Areva. Les enquêteurs se sont notamment interrogés sur de possibles dédommagements payés à l’occasion de l’annulation du montage et ayant pu donner lieu à des versements de commissions.
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