En Égypte, le pape dénonce les violences perpétrées « au nom de Dieu »
Le pape François était en visite au Caire ce vendredi. Il y a dénoncé les récentes attaques visant les Coptes, et le populisme menaçant la paix, avant de visiter une église de la capitale égyptienne attaquée par le groupe État Islamique.
Placée sous haute sécurité, la visite éclair du pontife argentin intervient trois semaines après deux attaques, perpétrées le 9 avril contre des églises coptes orthodoxes. Elles ont fait 45 morts et ont été revendiquées par le groupe jihadiste État Islamique (EI).
« Aucune violence ne peut être perpétrée au nom de Dieu, parce qu’elle profanerait son Nom », a pointé le pape vendredi 28 avril dans un discours prononcé lors d’une conférence organisée par l’institution sunnite Al-Azhar où il s’est rendu après son arrivée en début d’après-midi au Caire. Il y a été accueilli par le grand imam, cheikh Ahmed al-Tayeb.
Dans son discours, le pape a fustigé les « populismes démagogiques » qui selon lui « n’aident pas à consolider la paix et la stabilité ». « Aucune incitation à la violence ne garantira la paix », a-t-il martelé sans citer d’exemple à ses yeux de gouvernement populiste. Il a aussi appelé à « bloquer les flux d’argent et d’armes » pour « prévenir les conflits et édifier la paix ».
Sa visite vise notamment à réchauffer les relations entre Al-Azhar et le Vatican, qui s’étaient crispées après des propos controversés en 2006 du pape Benoît XVI semblant associer islam et violence.
François demande le respect des droits de l’Homme
Le pape François s’est rendu au palais présidentiel pour une rencontre avec le président Abdel Fattah al-Sissi. Dans un autre discours prononcé devant le président égyptien, le pape François a appelé au respect « inconditionnel » des droits de l’Homme, citant « la liberté religieuse et d’expression ».
Le président égyptien est régulièrement accusé par des organisations internationales de défense des droits de l’Homme d’avoir instauré un régime ultra-répressif qui ne tolère aucune voix d’opposition depuis qu’il a destitué en 2013 son prédécesseur, l’islamiste Mohamed Morsi. Ses détracteurs estiment qu’il a refermé la parenthèse démocratique ouverte avec le soulèvement de 2011 qui a chassé du pouvoir Hosni Moubarak.
Mais Abdel Fattah al-Sissi a été le premier président égyptien à se rendre à la messe de Noël à la cathédrale copte du Caire. Et il jouit d’une forte popularité au sein de la communauté depuis qu’il a destitué Mohamed Morsi.
Recueillement après les attaques visant les Coptes
Pour son premier séjour dans le plus peuplé des pays arabes, placé sous état d’urgence, policiers et militaires étaient omniprésents dans les rues de la capitale égyptienne, coupées à la circulation. Les abords de la Nonciature apostolique, où le pape doit séjourner, étaient fermés à la circulation. Et près de la cathédrale, siège de l’église orthodoxe copte, des blindés étaient stationnés.
Toutes les églises ont été placées sous haute surveillance, de crainte d’un attentat, alors que l’EI a menacé de multiplier les attaques contre les coptes, majoritairement orthodoxes, qui représentent environ 10% des 92 millions d’Égyptiens.
En décembre, un attentat revendiqué par l’EI avait déjà fauché 29 personnes dans une église copte du Caire, où le pape François s’est recueilli en fin de journée avec Tawadros II. Communauté chrétienne la plus importante en nombre du Moyen-Orient, les Coptes orthodoxes d’Égypte se disent victimes de discriminations de la part des autorités et de la majorité musulmane.
Une messe pour la communauté catholique du Caire
Le voyage de François est le deuxième d’un pape en Égypte contemporaine, après celui de Jean-Paul II en 2000, qui avait également rencontré le cheikh d’Al-Azhar.
Vieille de presque mille ans, l’institution sunnite d’Al-Azhar s’oppose au jihadisme inspiré du salafisme rigoriste dominant en Arabie saoudite. Mais Al-Azhar est également au cœur d’une lutte entre les autorités politiques et religieuses, depuis qu’Abdel Fattah al-Sissi fait campagne pour des réformes visant à éradiquer le discours extrémistes de la sphère religieuse.
L’institution religieuse a par exemple refusé d’amender la pratique islamique des divorces prononcés de manière orale. Elle avait gelé ses relations avec le Vatican lorsque Benoît XVI avait appelé spécifiquement à protéger les chrétiens après un attentat meurtrier contre une église copte. Mais en mai 2016, le pape François avait reçu l’imam al-Tayeb, point culminant d’un rapprochement entre le Saint-Siège et Al-Azhar.
Depuis son élection en 2013, le pape François multiplie les gestes d’ouverture envers les musulmans, au point de déconcerter parfois certains chrétiens. Le chef spirituel de près de 1,3 milliard de catholiques célébrera samedi 29 avril une messe dans un stade militaire de la banlieue du Caire pour la très minoritaire communauté catholique égyptienne, 272 000 fidèles de différents rites.
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