Se politiser pour agir en Afrique : le défi et le devoir de notre génération
L’Afrique continent de l’avenir, l’Afrique qui se réveille… Il est, vous le savez, de bon ton d’être afroptimiste.
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Hamza Hraoui
Dirigeant du cabinet de lobbying franco-africain MGH Partners, cofondateur du mouvement Maan
Publié le 2 mai 2017 Lecture : 3 minutes.
Et les scènes pullulent, dans les salles de conférence des grands hôtels de nos capitales ou sur les réseaux sociaux, où chacun se congratule et se félicite de cette Afrique émergente. Où on l’observe, on le dit, on le commente…
Et l’on se régale de débats thématiques… Quelle place donner à la religion dans une perspective de modernité et d’émancipation intellectuelle ? Quel système d’enseignement et de formation professionnelle mettre en place dans des pays où la Mission française et l’École américaine font de l’ombre à l’école publique, ou à ce qu’il en reste ? Comment capitaliser sur l’esprit entrepreneurial des Africains pour sortir de la perfusion des ONG, et des bailleurs de fonds, développer une classe moyenne et mieux répartir les richesses ? Comment préserver l’environnement dans des pays où les ressources sont accaparées par des intérêts privés et où ce sujet n’est pas la priorité ? Comment améliorer les conditions de vie des 72% de jeunes Africains qui vivent avec 2$ par jour ?
Bref, nous sommes, nous la nouvelle génération africaine, en quête de sens et désireux d’apporter des solutions à tous ces défis.
Mais quelles réponses concrètes apportons-nous à ces questions dans nos pays après en avoir débattu ? Il ne suffit pas de débattre pour faire avancer les choses : il faut agir. Et pour cela, redéfinir en amont l’engagement et in fine, réinventer l’action politique.
Mais le parti politique dans sa forme traditionnelle ne semble plus porter cette possibilité. Ce véhicule est devenu totalement désuet et le premier parti des jeunes c’est sans doute l’abstention. Ces jeunes Africains, qui se détournent des élites politiques, car celles-ci sont en déconnexion totale avec eux. Par ailleurs, il faut repenser la manière dont on forme les élites, car elles ne laissent pas de place à ceux qui ne sont pas issus de leur système reproductif, devenu obsolète, mais qui veulent avoir de l’impact sur la société.
Pourtant, ma génération sait s’engager : c’est celle d’entrepreneurs, de militants associatifs qui ont envie de faire bouger les lignes. On monte des start’up, on monte des projets, on prend la parole… mais ce n’est pas suffisant ! Ma conviction, c’est que l’étape d’après doit être l’action politique. Et je le vois, je le sens, à chaque fois où je parle à des jeunes à Abidjan, Dakar, Ouagadougou, Bamako … Casablanca.
Nous brillons sur les réseaux sociaux et dans les forums, comme si le commentaire faisait office d’action
Longtemps nous nous sommes cachés derrière l’héritage de la mauvaise gouvernance, derrière le terrorisme et tous « les maux de l’Afrique » pour éviter de répondre concrètement aux défis de nos sociétés africaines. Et aujourd’hui, au moment où nous sentons bien que nos modèles de sociétés, hérités du colonialisme et de régimes souvent contestables, ont atteint leurs limites, nous brillons sur les réseaux sociaux et dans les forums, comme si le commentaire faisait office d’action. Après tout, ne dit-on pas que l’Africain aime la discussion, qu’il aime l’art du palabre ? Sauf que ces « palabres » relèvent finalement du politique. Mais qu’est-ce que le politique sans l’action ? Aujourd’hui, il est l’heure pour notre génération de FAIRE.
Rassemblons-nous autour d’un socle de valeurs progressistes et réformistes extrêmement puissantes pour construire de nouvelles élites politiques, et cristalliser une nouvelle forme d’engagement dans laquelle on se reconnaît. Agissons pour favoriser l’avènement de sociétés africaines éclairées et qui avancent ! Arrêtons de ressasser le passé sans nous emparer nous-même de notre destinée et de nos responsabilités ! Hamidou Anne le résume ainsi : « La politisation de notre jeunesse est une voie de salut. Il faut tenir tête, voire affronter tous ceux qui, sous le couvert d’une forme coupable de bienveillance, éloignent la jeunesse de la politique au profit d’autres miroirs aux alouettes, qu’il s’agisse de l’entreprenariat ou du numérique, souvent nimbés d’une inanité vaine et ludique. Les Africains vivent des souffrances terribles dans leur chair. Appréhender les enjeux du continent doit être un travail sérieux, grave, qui rompt avec la naïveté, la puérilité qui caractérise souvent l’entre-soi des influenceurs. » Avant de poursuivre : « La jeunesse d’Afrique a toute sa place dans l’espace décisionnel dans nos pays. Elle doit se donner les moyens d’y arriver avec un projet de rupture, et refuser qu’on l’écarte du chemin du pouvoir. »
N’attendons plus que d’autres nous apportent les solutions. Parce que les problèmes de l’Afrique sont politiques, et son avenir ne peut être que politique, soyons nous-mêmes les leaders africains d’aujourd’hui et de demain pour reconquérir l’espace politique dans nos pays respectifs !
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