Logements sociaux au Burkina : le ministère de l’Habitat a déjà enregistré plus de 100 000 demandes

Entre l’étalement démesuré des villes, l’accaparement des terres et le déficit de logements décents, les défis ne manquent pas pour le ministre burkinabè de l’Habitat et de l’Urbanisme. Ingénieur du génie civil, Maurice Dieudonné Bonanet, 57 ans, ancien ministre de l’environnement et du tourisme (1989-1991) sous le régime Compaoré, donne un aperçu de ses priorités à JA.

Vue aérienne de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. © Renaud VAN DER MEEREN/EDJ

Publié le 11 mai 2017 Lecture : 3 minutes.

Jeune Afrique : Le gouvernement a lancé une opération de souscription pour 40 000 logements sociaux et économiques. Pourquoi?

Maurice Dieudonné Bonanet : Ce programme vise à améliorer les conditions d’accès aux logements décents pour les Burkinabès. À ce jour, je peux vous affirmer que nous avons enregistré plus de 100 000 demandeurs [un tirage au sort aura lieu ultérieurement pour n’en garder que 40 000, NDLR]. Nous avons également démarré les constructions à Ouagadougou, Bobo Dioulasso et Gaoua, en attendant le lancement officiel du programme, prévu ce mois de mai. Gaoua, qui abritera les festivités de la fête de l’indépendance [le 11 décembre prochain, NDLR] va accueillir 300 logements, actuellement en chantier.

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À Bassinko, en banlieue nord de la capitale, nous produisons actuellement plus de 1 000 unités économiques et sociales. Nous comptons bientôt lancer une tranche similaire, portant sur 937 logements et 35 boutiques, et financée par l’Inde à hauteur de 21,145 millions de dollars.

Qui va financer le programme 40 000 logements et selon quelles modalités?

Le programme sera financé par l’État et le privé en collaboration avec les banques locales. Le coût de la réalisation des 40 000 logements, prévus sur l’ensemble des 351 communes du pays, est estimé à 348, 486 milliards de F CFA. L’État apporte 85, 750 milliards pour aménager les terrains qui seront ensuite rétrocédés à des promoteurs privés pour la construction des logements.

La contribution de l’État et du privé atteint donc près de 450 milliards de francs CFA. Je précise que plus de la moitié des logements, soit 20 670 unités, seront érigés dans la capitale.

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Notre ambition est de réaliser de nouvelles villes autour de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso, à l’image de la Cité Yenenga, portée par la Compagnie générale d’entreprises, de manière à stopper l’étalement démesuré de nos agglomérations qui engendre des problèmes de transport, d’électricité, d’eau, etc.

Enfin, le programme va encourager les propriétaires à l’auto-construction car près de 30% des 400 000 parcelles dégagées dans la capitale ne sont pas mises en valeur.

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Comment le gouvernement compte encadrer la prolifération de sociétés immobilières?

Nous constatons effectivement un boom dans la création de sociétés immobilières dans notre pays. Dans le cadre de notre programme , nous allons pré-qualifier les entreprises qui vont participer.

Nous avons également constaté une tendance à l’accaparement des terres autour de la capitale. C’est pourquoi nous avons adressé une lettre aux promoteurs privés, pour suspendre ces opérations. Il faut mettre un terme à la spéculation et aux dérives sur le foncier.

Nous pensons que seul l’État, en collaboration avec les collectivités territoriales, est habilité à planifier l’espace urbain et à en déterminer les usages (habitation, industriel, commercial, loisir, etc.). Nous avons d’ailleurs rencontré ces promoteurs immobiliers pour les amener à respecter cette disposition. De toute façon, ils seront les bénéficiaires de nos futures opérations, prévues dans des cadres planifiés.

Où en le projet de 14 000 logements économiques en construction dans le village de Bassinko?

À ce jour, environ 4 500 logements ont été réalisés à Bassinko par divers acteurs tels que le Centre de gestion des Cités (Cegeci) et des privés. Cependant, il faut admettre qu’il y a eu des insuffisances en matière de viabilisation.  C’est pour cela que, dès notre arrivée, nous avons pris à bras le corps cette question.

Cette année, nous investissons plus de 4 milliards de francs CFA  [en plus des 5 milliards déjà investis, NDLR] dans les travaux d’adduction d’eau et de fourniture d’électricité, ainsi que dans la mise en chantier des voiries et des canalisations. Cette panoplie de mesures vise à faciliter l’accès du site aux souscripteurs.

Au total, le gouvernement va injecter environ 85 milliards de F CFA , étalés sur une période donnée, pour viabiliser le village de Bassinko.

Le parlement a publié en octobre 2016 une enquête sur le foncier épinglant un certain nombre d’acteurs comme les maires ou les sociétés immobilières d’Alizeta Ouedraogo. Quelle suite réservez-vous à ce rapport?

Nous avons pris des arrêtés suspendant l’agrément de tous les promoteurs immobiliers privés. Les sociétés appartenant à Alizeta Ouedraogo ne sont donc pas les seules visées.

La Commission interministérielle adoptée par le gouvernement doit faire la lumière sur les détournements supposés de 100 000 parcelles. Toute société immobilière impliquée dans ces actes indélicats sera traitée avec la même vigueur.

Il ne s’agit donc pas d’une chasse aux sorcières. Nous devons vérifier jusqu’à quel point les droits n’ont pas été reversés aux impôts.

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