Mali : « Un peuple, un but, une foi »

FRANCOIS-SOUDAN_2024

Publié le 3 octobre 2014 Lecture : 2 minutes.

Ibrahim Boubacar Keïta est le premier à le dire : il n’a pas connu d’état de grâce. Héritant d’un pays en lambeaux, de caisses vides et d’une accumulation d’urgences, il ne pouvait, il est vrai, s’attendre à autre chose. Sa stature gaullienne d’homme providentiel élu, si ce n’est plébiscité, autour d’une dynamique de reconquête à la fois territoriale et psychologique de la fierté malienne ne pouvait que se heurter rapidement au principe de réalité.

Un an plus tard, c’est chose faite : le lien très fort qui unissait le lointain descendant de Soundiata Keïta à son peuple s’est banalisé, certains diront effiloché, et l’heure est aux lendemains qui déchantent.

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Faut-il pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain, à l’instar du réquisitoire dressé par un opposant comme Tiébilé Dramé, dont les propos (implacables) sont à l’exacte démesure du poids électoral (marginal) ? Certes pas.

>> Lire aussi l’interview d’Ibrahim Boubacar Keïta : "Mon honneur n’est pas à jeter aux chiens"

La première erreur d’Ibrahim Boubacar Keïta est sans doute d’avoir laissé croire que le Mali allait pouvoir recouvrer son Nord face à des groupes armés volatils et criminogènes, alors que ni son administration ni son armée – comme l’a démontré l’humiliation de Kidal, en mai – n’en avaient les moyens.

Ce nationaliste, ce patriote est donc contraint de mener sa mission de récupération de l’indépendance nationale en s’appuyant sur la multidépendance. Un paradoxe qui l’oblige à un jeu permanent d’équilibre entre des puissances extérieures – France, Algérie – aux intérêts souvent contradictoires et des voisins – Burkina, Sénégal, Mauritanie – dont les présidents ont parié contre lui lors de l’élection de 2013.

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Son deuxième tort est de ne pas avoir su s’expliquer ni communiquer, à temps et suffisamment, à propos de quelques affaires emblématiques – achat d’un nouvel avion présidentiel, contrat d’armement, travaux de rénovation du palais… – dont le caractère à la fois improvisé et dissimulé a fait bondir les bailleurs de fonds, mais qui relèvent avant tout de la nécessité d’agir vite (pour les achats militaires) et d’une certaine naïveté.

Dès qu’il s’agit de milliards, la rumeur s’emballe. Or, en l’espèce, aucun abus de biens sociaux, détournement de fonds ou enrichissement personnel n’a été constaté, encore moins démontré.

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Troisième faille enfin : la famille. IBK, dont la conquête du pouvoir a aussi été une histoire familiale tant le soutien des siens lui a été précieux et déterminant, est un homme d’État sentimental qui doit se garder des tentations du népotisme.

Le fait que l’un de ses fils soit député et deux de ses parents ministres n’est pas en soi un problème tant que leurs compétences sont reconnues. Mais le sujet est ultrasensible et il se sait attendu au tournant.

Un an après, le Mali n’a donc que partiellement retrouvé le sens de sa devise nationale : un peuple, un but, une foi. À tout le moins a-t-il à sa tête un chef, sans qui les trois mots qui précèdent ne sont qu’illusion.

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