Afrique subsaharienne : la pénurie de devises étrangères mettra du temps à se résorber, selon l’agence de notation Moody’s
La pénurie de devises étrangères dans les pays d’Afrique subsaharienne, qui résulte de la baisse des cours du pétrole et des matières premières, est en train de s’adoucir. Mais il faudra du temps aux fonds souverains, aux banques et aux entreprises pour retrouver leur santé financière, d’après une étude publiée lundi 22 mai par l’agence de notation Moody’s.
« La chute des cours du pétrole et des matières première au cours des deux dernières années a provoqué une pénurie de devises étrangères dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, et en particulier chez les exportateurs de pétrole » constate Lucie Villa, vice-présidente chez Moody’s et co-auteur du rapport publié lundi 22 mai et intitulé « Les pénuries de devise étrangères se réduisent mais seront longues à surmonter ». « La stabilisation des prix du pétrole et des matières premières sur les derniers mois va adoucir la pression, mais une éventuelle reprise dépendra de la poursuite de l’augmentation des prix et pourrait prendre du temps » ajoute l’analyste principale.
Diminution des réserves de change
Le rapport détaille comment le rationnement du dollar, la dévaluation monétaire et les emprunts d’État en devises étrangères ont ralenti la chute des réserves de change en Angola et au Nigeria. Une politique menée au détriment de l’économie non pétrolière, de la stabilité des prix et du bilan annuel du pays.
Au Gabon et au Congo, tous deux membres de la CEMAC (communauté économique et monétaire d’Afrique centrale), zone où l’accès aux devises étrangères est limité, la monnaie locale commune est arrimée à l’euro et les réserve de change ont fondu. Selon Moody’s, ces réserves vont continuer de diminuer en 2017, mais à un rythme plus lent.
Difficultés du secteur bancaire
Concernant le secteur bancaire d’Afrique subsaharienne, l’agence souligne que les banques d’Angola, du Nigeria et de la République démocratique du Congo (RDC) sont les plus touchées par la pénurie de devises étrangères, du fait de la forte dépendance au dollar de leur économie. Leurs réserves de change sont épuisées, et leur capacité à trouver de nouveaux financements étrangers est limitée.
« Les dévaluations monétaires qui résultent de cette situation ont également érodé la qualité des prêts octroyés par les banques, mais aussi leur rentabilité et leurs capitaux », ajoute Constantinos Kypreos, vice-président de Moody’s et co-auteur du rapport.
Au Nigeria et en Angola, les pressions négatives semblent se calmer, depuis que leurs banques centrales ont commencé à injecter davantage de dollars dans l’économie, grâce à des prix du pétrole plus élevés. Les banques sud-africaines sont les moins affectées. Selon Moody’s, cette situation reflète la faible dollarisation du système économique sud-africain et sa dépendance limitée aux financements étrangers.
Malgré la hausse graduelle des cours des matières premières, il est, selon l’agence de notation, trop tôt pour annoncer la fin des difficultés des banques, qui viendra lorsque le dollar irriguera de nouveau les économies, et quand les taux de change officieux convergeront avec les taux officiels. L’agence rappelle néanmoins que les banques d’Afrique subsaharienne affichent des taux de couverture en fonds propres élevés et des rentabilités solides.
Entreprises non financières
Les entreprises non financières opérant dans les pays exportateurs de pétrole comme le Nigeria et l’Angola ont été les plus touchées par la pénurie en dollars et la faiblesse de leur monnaie locale. Pour l’agence de notation, cette situation devrait se poursuivre en 2017 avant de s’atténuer en 2018.
« La pénurie de dollars rend plus difficile le paiement des fournisseurs de biens et d’équipements importés, le paiement des dettes en dollars, ou la sortie des capitaux de ces pays » explique Dion Bate, vice-président et co-auteur du rapport.
« La faiblesse des monnaies locales augmente le poids du service des dettes non couvertes en monnaies étrangères, réduit les profits en devises étrangères rapatriés et rogne les marges d’exploitation, les entreprises ne pouvant pas faire supporter aux consommateurs le coût élevé des importations » ajoute Mr Bate.
Les entreprises non financières dont les revenus sont en dollars, comme les négociants en matières premières et les sociétés qui réalisent des contrats en dollars, ne sont pas exposées à ces risques, précise l’agence.
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