Quelle signification politique donner au voyage d’Emmanuel Macron à Gao, au Mali ?

Après Berlin, le nouveau président français, a choisi le Mali et la base de Gao pour rendre visite, le 19 mai, aux soldats français qui luttent contre le terrorisme djihadiste.

Le président français Emmanuel Macron à Gao le 19 mai 2017 en compagnie de son homologue malien Ibrahim Boubcar Keïta. © Christophe Petit Tesson/AP/Sipa

Le président français Emmanuel Macron à Gao le 19 mai 2017 en compagnie de son homologue malien Ibrahim Boubcar Keïta. © Christophe Petit Tesson/AP/Sipa

Lucien-Pambou
  • Lucien Pambou

    Professeur de sciences économiques et politiques, rédacteur associé de la revue Géopolitique africaine.

Publié le 24 mai 2017 Lecture : 3 minutes.

Le choix de Gao a perturbé les autorités maliennes. La visite à la force Barkhane est très significative : montrer que la France poursuit son option militaire de lutte contre le terrorisme jihadiste. Emmanuel Macron a été accompagné de Mme Goulard, ministre des Armées, de M. Le Drian, ministre des Affaires étrangères ainsi que de M. Rioux, directeur de l’Agence française de développement.

En allant à Gao au lieu de Bamako, Macron a inversé le protocole diplomatique. Il envoie un message très clair au Mali et aux États africains francophones : la France continuera à vous aider à condition de faire les efforts nécessaires en matière de gouvernance politique et militaire. Pour le président Macron, le choix de Gao montre le souci de préserver les intérêts français dans la zone du Sahel (Areva au Niger, Vinci et d’autres entreprises impliquées dans la construction des infrastructures…). C’est aussi un message en direction de la classe politique française : le nouveau chef de l’État est capable d’endosser les habits de chef de guerre et de décider en fonction des intérêts français.

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Posture gaullienne sans être gaulliste

En France, les élections législatives de juin 2017 obligent le président Macron à montrer sa capacité régalienne et verticale, au sens gaullien, à gérer les dossiers concernant la France en Afrique sans demander la permission aux chefs d’État africains francophones qui sont ses obligés (déplacement du président Keïta à Gao) comme au temps du Général de Gaulle en 1958 et de Foccart. La posture de Macron est gaullienne sans être gaulliste car Macron n’a pas la dimension historique de De Gaulle.

Droit d’aînesse ?

Certains Africains restent sur une approche empathique, tribale et générationnelle des rapports politiques au plan international, en estimant par exemple que Macron est plus jeune que Keïta et qu’au nom du droit d’aînesse, il devait atterrir à Bamako.

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Macron souhaite organiser la défense du Sahel en impliquant l’Allemagne et l’Europe. L’Allemagne est l’un des premiers contributeurs sur le plan financier parmi les États européens, la France (pays de référence pour la logistique et l’organisation des troupes sur le terrain) et les États-Unis (socle de base pour le renseignement). Pour Macron, il faut aller plus loin en faisant intervenir deux éléments qui vont accélérer la disparition du terrorisme au Sahel : le développement et la bonne gouvernance des pays africains qui doivent lutter contre la corruption.

Sécurité, développement économique et politique pour lutter contre le terrorisme

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Pour Macron il faut un cadre politique et diplomatique pour résoudre la question du terrorisme. Les accords d’Alger ne sont pas appliqués par le président malien dont on pense qu’il utilise la situation pour se préparer à un deuxième mandat. Macron a été clair : la France ne laissera plus ses soldats se faire tuer pour l’Afrique si les présidents africains n’adoptent pas les sentiers de la bonne gouvernance et se laissent envahir par la corruption.

À l’agenda de Macron : éradication du terrorisme au Mali et dans le Sahel, visite au mois de novembre des pays du G5 (Tchad, Burkina-Faso, Niger, Mauritanie, Cameroun) pour amplifier la création de la force africaine d’intervention rapide. L’Agence française de développement va consacrer des sommes financières importantes pour le développement du Sahel et surtout le nord du Mali (éducation, infrastructures et investissements sectoriels) car le président français estime que le désœuvrement de la jeunesse est un terreau fertile pour le recrutement des terroristes.

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