Algérie : le colonel Chadli Bendjedid adoubé par huit cents officiers
Témoin privilégié de près d’un demi-siècle d’histoire, Rachid Benyelles révèle dans ses Mémoires les secrets et les dessous d’événements clés qui ont façonné le destin du pays.
Algérie : quand le général Rachid Benyelles raconte le pouvoir
Témoin privilégié de près d’un demi-siècle d’histoire, Rachid Benyelles révèle dans ses Mémoires les secrets et les dessous d’événements clés qui ont façonné le destin du pays.
La succession de Boumédiène, au pouvoir depuis 1965, s’est jouée en plusieurs séquences. Le 14 novembre 1978, le président est de retour à Alger après un long séjour en URSS pour soigner une grave maladie. Dans sa villa ce jour-là, il réunit les membres du gouvernement et du Conseil de la révolution. Amaigri, Boumédiène veut rassurer.
Lorsqu’il serre la main du colonel Chadli Bendjedid, de la IIe région militaire, chez qui il aimait faire de discrètes escapades, il se garde de lui faire part de ses intentions : lui confier la coordination de l’ensemble des services de sécurité. Est-ce parce qu’il est trop faible ou parce qu’il ne veut pas annoncer cette décision devant l’assistance ? Toujours est-il que Boumédiène n’en pipera mot sur le moment.
Les dernières heures de Houari Boumédiène
Il chargera ses plus proches collaborateurs de transmettre le message au colonel. Mais ces derniers n’en feront rien. Le 18 novembre, le président tombe dans un coma irréversible. Aussitôt la nouvelle connue, Abdelhamid Latrèche, secrétaire général du ministère de la Défense, informe Chadli de sa nouvelle affectation. Autrement dit : patron de l’armée. Le 27 décembre 1978, à 3 h 55 du matin, Boumédiène décède à l’âge de 46 ans.
Dans les coulisses du pouvoir commencent les manœuvres et les calculs pour lui succéder. Deux prétendants se détachent du lot : Abdelaziz Bouteflika, ministre des Affaires étrangères, et Mohamed Salah Yahiaoui, patron du FLN. Sauf que les militaires ne veulent ni de l’un ni de l’autre. Au premier ils reprochent « sa suffisance et sa méconnaissance des problèmes intérieurs », au second « son aversion pour les cadres francophones, ses idées baasistes et son gauchisme de circonstance ». Trois généraux, Kasdi Merbah, Mostefa Beloucif et Rachid Benyelles, approchent séparément Chadli pour lui suggérer de se porter candidat.
Madré et fin psychologue, Chadli attend que les autres militaires se rallient pour poser sa candidature
L’homme ne dit pas franchement non, mais préfère rester auprès des siens. Madré et fin psychologue, Chadli attend que les autres militaires se rallient pour poser sa candidature. Pendant que les deux prétendants s’activent, lui garde le silence. Quel sera le mode de désignation du successeur de Boumédiène ? Un congrès ordinaire du FLN ouvert aux seuls militants du parti, ou un congrès extraordinaire réunissant tous les cadres de la nation, y compris des représentants de l’armée ? C’est la seconde option qui est retenue.
Le 26 janvier 1979, quelque huit cents officiers et sous-officiers de l’armée venus des quatre coins du pays se rassemblent dans la salle de cinéma de l’École nationale des ingénieurs et techniciens d’Algérie (Enita), dirigée par le général Larbi Belkheir. Et adoubent Chadli Bendjedid. Deux jours plus tard, à la Coupole d’Alger, une motion de soutien à sa candidature est approuvée par acclamation. Fin d’un suspense qui aura duré soixante-dix jours.
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