À quoi sert Mme Zuma ?
Si Mme Nkosazana Dlamini-Zuma, présidente de la Commission de l’Union africaine (UA), était japonaise, elle se confondrait en kokaishiteimass (excuses publiques) et courbettes contrites, avant de présenter sa démission. Mais Mme Zuma est sud-africaine, la contrition n’est pas son fort, et il ne viendrait à l’esprit d’aucun chef d’État de lui demander de démissionner. Pourtant, l’inaction dont elle-même, la commission qu’elle dirige et – il faut bien le dire – l’UA dans son ensemble ont fait montre depuis le début de la dramatique pandémie d’Ebola est plus qu’une faute professionnelle : un véritable scandale.
Non seulement Mme Zuma ne s’est rendue dans aucun des principaux pays touchés par le virus, ne serait-ce que pour y exprimer sa solidarité, mais il a fallu attendre huit mois, 2 400 morts officiellement recensés (chiffre généralement considéré comme sous-évalué), des dégâts économiques et sociaux considérables dans toute une partie de l’Afrique de l’Ouest et des conséquences encore peu mesurables ailleurs pour qu’elle se décide enfin à convoquer une réunion "d’urgence" (!) sur ce thème à Addis-Abeba. Comme il fallait s’y attendre, cette dernière s’est conclue, le 8 septembre, sur des voeux pieux : un appel à la réouverture des frontières (oui, mais quel est le plan B ?) et une vague annonce de levée de fonds, par ailleurs ridiculement faible.
Vingt-cinq millions de dollars (19,3 millions d’euros) et l’envoi d’une centaine de médecins et infirmiers dans les zones contaminées, soit moins du dixième de ce que l’Europe, les États-Unis et la Banque africaine de développement (BAD) ont promis – promesses qui, au demeurant, n’engagent que ceux qui y croient. Mme Zuma, c’est vrai, a l’esprit ailleurs, tourné vers la succession de son ex-mari à la présidence de la République d’Afrique du Sud en 2018. Au point de donner l’impression de considérer son poste actuel – qu’elle occupe depuis deux ans – comme un simple marchepied, et son bureau de l’Africa Hall comme une succursale de celui qu’elle espère occuper bientôt au coeur des Union Buildings de Pretoria.
Au fait : Nkosazana Dlamini-Zuma est médecin. On l’avait oublié. Elle aussi, manifestement.
Elle passe d’ailleurs beaucoup plus de temps en Afrique du Sud qu’en Éthiopie, très affairée à ripoliner son image – bonne, reconnaissons-le – au sein de l’ANC et à préparer les primaires cruciales de 2017. Pendant ce temps, chaque cas générant deux à trois malades de plus, l’incubateur Ebola bouillonne, les cordons sanitaires se multiplient, les taux de croissance économiques chutent, et la tenue de conférences internationales, voire de sommets, est chaque jour plus compromise, de Dakar à Kinshasa. L’idéal et la décence voudraient donc que Mme Zuma, dont le mandat court jusqu’en 2016, non seulement ne se représente pas, mais quitte son siège au plus vite, afin de s’occuper de ce qui l’intéresse vraiment et de laisser la présidence de la Commission à un vrai titulaire. Au fait : Nkosazana Dlamini-Zuma est médecin. On l’avait oublié. Elle aussi, manifestement.
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