RDC : John Numbi élevé au grade de Grand Officier, la Voix des sans-voix s’indigne
John Numbi, l’ex-chef de la police congolaise, est considéré par plusieurs défenseurs des droits de l’Homme comme le suspect numéro un dans l’assassinat en 2010 de Floribert Chebeya, le président de l’ONG La Voix des sans-voix. Selon un document circulant sur les réseaux sociaux et authentifié par un responsable du Journal officiel de RDC auprès de l’AFP, le gouvernement congolais vient de lui décerner le titre honorifique de Grand officier de l’ordre des héros nationaux.
Selon l’AFP, John Numbi Banza Ntambo figure bel et bien sur la liste d’officiers supérieurs de la police de la RDC gratifiés du titre honorifique de « grand officier » de l’ordre des héros nationaux Kabila-Lumumba qui circulait depuis quelques jours sur les réseaux sociaux. Cette liste serait en réalité une ordonnance officielle datant du 16 mai, à en croire les déclarations ce mardi 6 juin d’un responsable au sein du Journal officiel de RDC à l’agence de presse.
La copie du document, qui a eu le temps de circuler parmi les internautes congolais, a suscité la « désolation » de nombre d’entre eux, plusieurs doutant toutefois de son authenticité. Parmi ceux qui ont réagi à l’apparition de cette liste de personnalités récompensées par le gouvernement congolais, Rostin Manketa, directeur de l’ONG la Voix des Sans Voix.
Contacté par Jeune Afrique, il se dit très déçu par la nouvelle. « Le nom de John Numbi a été abondamment cité lors du procès de l’assassinat de Floribert Chebeya (le fondateur de l’ONG, NDLR), il est le suspect numéro 1 sur cette affaire, c’est une grande déception pour nous d’apprendre qu’il a été élevé à ce grade. » Pour lui, cette « prime » accordée au général Numbi est « la preuve que l’assassinat de Floribert Chebeya est un crime d’État »
Deux procès, et après ?
Plusieurs ONG des droits de l’Homme dont le mouvement citoyen de la Lucha avaient réclamé, le 2 juin dernier, que justice soit faite dans l’affaire Floribert Chebeya. Pour plusieurs d’entre elles, John Mumbi est d’ailleurs le suspect numéro 1 dans cette affaire.
Le fondateur de la Voix des sans voix avait été retrouvé mort dans sa voiture le 2 juin 2010, sur une route en périphérie de la capitale congolaise alors que la veille, il s’était rendu au siège de la police congolaise pour y rencontrer son chef, le général John Numbi. Fidèle Bazana, le chauffeur de l’activiste des droits de l’Homme avait pour sa part été porté disparu. En première instance, en 2011, la justice congolaise avait conclu qu’il avait été assassiné, tout comme Floribert Chebeya.
L’affaire avait ensuite été jugée en appel en 2015. À la suite de cet appel, plusieurs des policiers initialement mis en cause sont acquittés faute de preuve. L’un d’entre eux, condamné en première instance, voit même sa peine allégée. Et les poursuites lancées à l’encontre des policiers en fuite qui n’avaient pu être jugés sont finalement suspendues.
L’un des policiers congolais présumé être l’un des personnages-clé de cette affaire, Paul Mwilambwe, a révélé la semaine dernière dans une interview accordée à RFI qu’il avait été le témoin de l’implication de certains hauts gradés de la police congolaise dans l’affaire Chebeya. « […] les commanditaires de l’assassinat de Chebeya sont au sommet de l’État […] Chebeya a été assassiné à l’Inspection générale de la police », a-t-il notamment affirmé.
Les familles des disparus ont porté plainte au Sénégal
Suspendu de ses fonctions peu après l’assassinat, le général Numbi a toujours nié avoir convoqué Floribert Chebeya au siège de la police congolaise. Il n’a jamais été entendu par la justice congolaise autrement qu’en qualité de témoin, en 2011, en première instance.
Les familles des victimes ont pour leur part déposé une plainte au Sénégal en 2014. Le 2 juin à Paris, lors d’une cérémonie pour le 7e anniversaire de ce double assassinat, elles ont déclaré « garder espoir que la vérité éclate ».
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