Comment Royal Air Maroc a redressé la barre
Trois ans après avoir frôlé la faillite, la RAM a retrouvé la santé. En particulier grâce à la hausse de son trafic au sud du Sahara.
Royal Air Maroc (RAM) semble définitivement sortie de la zone de turbulences. Après un retour dans le vert en 2013, avec un bénéfice net de 168 millions de dirhams (près de 15 millions d’euros) et un résultat d’exploitation de 789 millions de dirhams, la compagnie aérienne confirme son rétablissement en 2014. « Le conseil d’administration n’a pas encore arrêté les chiffres de l’exercice clos fin octobre. Mais le résultat d’exploitation avoisine celui de l’année dernière. C’est même l’un des meilleurs dans l’histoire de la RAM », indique un responsable de communication de l’entreprise.
La tournée de Mohammed VI a favorisé la croissance à deux chiffres de la RAM en Afrique.
Le transporteur dirigé par Driss Benhima est sorti de la période sombre durant laquelle il perdait quelque 20 millions de dirhams par jour. En 2011, la compagnie publique – dont l’introduction en Bourse, souvent évoquée, n’a jamais dépassé le stade de projet – a même frôlé la banqueroute. Mais depuis, les choses ont beaucoup changé.
Benhima, connu pour ses capacités de redresseur, a sorti le grand jeu : repli stratégique sur Casablanca, fermeture des routes non rentables (Marrakech-Genève, Tanger-Barcelone), recentrage sur le coeur de métier, réduction drastique des effectifs et des coûts… La recette Benhima, quoique amère, a permis à la compagnie de relever la tête pour repartir sur de nouvelles bases. Et, fait inédit, même la croissance du trafic est revenue en zone verte, avec une progression de 6% cette année, et ce malgré la rude concurrence des compagnies low cost.
Ebola
Une croissance tirée essentiellement par le marché africain, qui a progressé de 16 % en un an. Avec 32 destinations sur le continent, la RAM y a transporté pas moins de 1,3 million de passagers en 2014. Et elle a été la seule à ne pas suspendre ses vols vers les pays touchés par le virus Ebola tels que la Guinée, le Liberia, la Sierra Leone… Un geste de solidarité, décidé en haut lieu, qui a redoré l’image de la compagnie marocaine et lui a permis de consolider ses positions africaines.
Neuf routes aériennes ont largement contribué à cette performance. Elles relient le Maroc à Dakar, Abidjan, Bamako, Nouakchott, Conakry, Lagos, Alger, Tunis et Libreville. Grâce à ces liaisons régulières, la RAM a transporté « près de 782 000 passagers », affirme-t-elle dans un communiqué.
La tournée royale effectuée en mars a également joué un rôle dans cette progression à deux chiffres en Afrique. Vers la Côte d’Ivoire, la croissance du trafic, restée nulle entre novembre 2013 et février 2014, s’est établie à 40 % ensuite. Idem pour le Gabon et la Guinée, qui ont enregistré des hausses respectives de 23 % et de 15 % juste après la tournée de Mohammed VI. Deux destinations qui souffraient de baisses respectives de 8 % et 12 % entre novembre 2013 et février 2014. Un effet d’entraînement royal qui a permis à la compagnie de briller dans le ciel africain.
Casablanca, la dernière bataille
Si Royal Air Maroc (RAM) est parvenue à sortir la tête de l’eau, elle fait toutefois toujours face à de sérieuses menaces. La plus importante émane des compagnies low cost.
Depuis que le Maroc a ouvert son ciel, en 2006, la RAM est attaquée de toutes parts par des concurrentes comme Ryanair, EasyJet ou Jetairfly. Des transporteurs qui non seulement lui arrachent des parts de marché, mais remettent aussi en question son existence.
Pour leur faire face, Driss Benhima a effectué un repli stratégique sur Casablanca, abandonnant les fronts que sont Fès, Marrakech, Agadir ou Tanger. « Casablanca est notre dernier bastion », confie un responsable de la compagnie. Un bastion autour duquel la bataille fait rage : en 2014, l’offre en sièges à l’international sur cette destination a augmenté de 16 %. Or le trafic national n’a progressé que de 5,9 % sur la même période.
Dégraissage
Mais les bénéfices de ces performances commerciales auraient pu passer à la trappe si la RAM n’avait pas entamé il y a quelques années un vaste plan de réduction des coûts. À commencer par les charges de personnel.
Grâce à deux opérations de départs volontaires, la compagnie a réduit de moitié le nombre de ses agents, passé de 5 605 fin juin 2011 à moins de 3 000 aujourd’hui. Résultat : la masse salariale a baissé de 34 % par rapport à 2011 et le ratio d’employés par avion est tombé de 100 en 2011 à 62 fin août 2014, et ce bien que sa flotte ait diminué de huit avions par rapport à 2011.
« Ce niveau de rentabilité est meilleur que celui des grandes compagnies régulières et il est proche de celui des low-cost qui n’ont pas de force de vente propre », a souligné Driss Benhima devant la commission des infrastructures du Parlement marocain.
Ce « dégraissage » s’est par ailleurs accompagné d’un recentrage sur le coeur d’activité de la RAM. Les filiales historiques dans le handling (manutention des bagages et petite maintenance), l’hôtellerie et les métiers de l’aéronautique ont toutes été cédées. Cela a permis d’économiser pas moins de 1,2 milliard de dirhams sur les charges d’exploitation. Un véritable exploit.
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