Économie : comment Niamey résiste aux chocs
Malgré une croissance mondiale faible et une situation sécuritaire difficile, l’économie nigérienne repart de l’avant.
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Alain Faujas
Alain Faujas est spécialisé en macro-économie.
Publié le 6 juillet 2017 Lecture : 3 minutes.
« Malgré un voisin nigérian en crise, une croissance mondiale faible, une situation sécuritaire difficile et des désordres climatiques fréquents, le Niger ne s’en sort pas trop mal », constate Arthur Minsat, chef du bureau Afrique du Centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
L’économie nigérienne est effectivement en train de repartir de l’avant, après être passée d’un taux de croissance de 7 % en 2014 à 4 % en 2015. Ce taux est remonté à 5 % en 2016 grâce à une bonne campagne agricole et à une reprise de la production pétrolière, et il pourrait dépasser 5,5 % cette année.
La production manufacturière a battu des records l’an dernier (+160 % de septembre 2015 à septembre 2016) pendant que l’inflation était maîtrisée à 0,3 % en mars.
Ses handicaps ? Le poids du géant nigérian, entré en récession au troisième trimestre de 2016, une grave pénurie d’électricité, un terrorisme qui frappe quasiment toutes les semaines à l’ouest, avec les jihadistes venus du Mali, et à l’est, avec les résidus de Boko Haram.
Ce volontarisme est aussi perceptible dans les efforts du gouvernement pour maîtriser l’une des croissances démographiques les plus fortes du monde
Ses atouts ? Une agriculture robuste malgré la sécheresse qui rode et, surtout, un exceptionnel volontarisme, visible dans les statistiques du FMI en matière d’investissements. Rapportés au PIB, ces derniers avoisinent 40 % au Niger, quand, en Afrique subsaharienne, la moyenne est de 19 %.
Ce volontarisme est aussi perceptible dans les efforts du gouvernement pour maîtriser l’une des croissances démographiques les plus fortes du monde, soit 3,9 % par an et quelque sept enfants par femme. La moyenne d’âge du pays est de 15 ans…
Rakiatou Christelle Kaffa-Jackou, ministre de la Population, tente de canaliser cette marée, faisant du Niger le seul pays d’Afrique de l’Ouest – avec le Burkina Faso – à avoir pris la mesure du péril démographique à venir.
La détermination nigérienne porte aussi sur l’amélioration du climat des affaires. « De 164e sur 190 en 2015 au classement “Doing Business” de la Banque mondiale, le Niger s’est hissé à la 150e place en 2017, souligne Arthur Minsat. Il vient de prendre quatre mesures pour faciliter la vie des entreprises : suppression du capital minimum et du recours au notaire pour les sociétés à responsabilité limitée (SARL), simplification des procédures pour la création d’entreprise, création de tribunaux compatibles avec le droit des affaires et restructuration du code minier. »
Le talon d’Achille du Niger demeure ses finances publiques
Le talon d’Achille du Niger demeure ses finances publiques. L’effort militaire et la volatilité des cours des matières premières (pétrole, uranium) n’ont pas permis au gouvernement de réduire le déficit budgétaire comme il le prévoyait.
Et la dette publique a enflé de 26 % du PIB en 2012 à 48 % à la fin de 2016. Le FMI continue pourtant à qualifier de « modéré » le risque de défaut de la dette extérieure.
Il n’empêche que le Fonds suit de très près la stabilité financière du pays. Il a passé avec le gouvernement un accord au titre de la facilité élargie de crédit (134,04 millions de dollars) approuvé par son conseil d’administration, le 23 janvier.
Ce programme 2017-2020 est centré sur la mobilisation des recettes intérieures et le renforcement de la gestion budgétaire pour contenir les déficits.
Le gouvernement a aussi promis de s’atteler à un programme de réformes structurelles afin d’améliorer la productivité et la transparence du secteur des ressources minières
Les chantiers du gouvernement sont nombreux : renforcement des contrôles fiscaux ; recouvrement des arriérés d’impôts ; limitations des exonérations fiscales, trop généreusement accordées ; surveillance des taxes douanières, qui rentrent moins bien que prévu – et pas seulement en raison de l’insécurité aux frontières ; enfin, lutte contre la fraude sur le carburant.
Le gouvernement a aussi promis de s’atteler à un programme de réformes structurelles afin d’améliorer la productivité et la transparence du secteur des ressources minières. Enfin, la diversification de l’économie et la réduction des inégalités passent par une plus grande participation de la femme nigérienne aux activités économiques.
Si ces améliorations techniques et sociétales se concrétisent, le pays pourra bénéficier à plein de la longue liste des projets en cours ou en attente de réalisation : mine d’uranium d’Areva à Imouraren, mine de charbon de Sakadalma, boucle ferroviaire, cimenterie de Kao, complexe sucrier de Dosso, oléoduc desservant le champ pétrolifère d’Agadem.
Sans parler des 151 permis de recherche minière et des 34 blocs de recherche pétrolière accordés par le gouvernement, qui ne devra pas pour autant oublier les oignons, les tomates, les poivrons ou le cuir, dont le monde agropastoral projette de multiplier la production et qu’il entend valoriser, pour peu qu’on l’épaule. Les potentiels sont là. À l’État de les faire fructifier.
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