Chine : le grand exode

Cent millions de personnes ont séjourné à l’étranger l’an dernier. Et toutes ne sont pas rentrées au bercail. Cette migration sans précédent inquiète les autorités chinoises.

L’an dernier, les États-Unis ont accordé des visas à 6 895 Chinois de République populaire. © AFP

L’an dernier, les États-Unis ont accordé des visas à 6 895 Chinois de République populaire. © AFP

Publié le 5 septembre 2014 Lecture : 2 minutes.

Les touristes chinois prennent goût à la dolce vita. "Nous rentrons de longues vacances en Europe, raconte un (riche) père de famille. Nous vivions au grand air, nos enfants jouaient dehors sans crainte de s’abîmer les poumons. Et puis, vous savez, la démocratie, c’est rassurant !" Il en a profité pour acheter une maison pour la moitié, à peine, du prix du trois-pièces familial à Pékin.

"La vie en Chine est devenue tellement chère ! Les assurances santé et l’éducation des enfants, notamment, coûtent des fortunes." Du coup, la famille va s’installer définitivement à l’étranger dans le courant de l’année. Et elle est loin d’être la seule dans ce cas. Un récent sondage montre que 64 % des Chinois fortunés sont candidats à l’exil.

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Leurs destinations préférées ? L’Europe, on l’a vu, mais surtout l’Australie, le Canada et les États-Unis. Depuis le temps des empereurs Qing, au XVIIe siècle, la Chine exporte volontiers ses ressortissants. Les autorités ne voient généralement pas ces exilés d’un très bon oeil. Les Mandchous, par exemple, les considéraient comme des déserteurs et des criminels. Le Parti communiste (PCC) ne va aujourd’hui pas aussi loin, mais il les surveille quand même étroitement.

Cinquième colonne

"Il ne veut surtout pas qu’ils se transforment en une sorte de cinquième colonne, explique le politologue James Jiann Hua To, auteur d’un livre sur le sujet (Qiaowu: Extra-Territorial Policies for the Overseas Chinese). Une grande partie des 48 millions de Chinois qui vivent hors des frontières sont donc astreints à participer à une série d’activités qui permettent au PCC de les surveiller et, le cas échéant, d’en faire des agents de la grandeur du pays." Cette politique porte un nom : le "Qiaowu".

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Elle consiste à garder le lien avec les Chinois d’outre-mer, mais aussi à repérer les agents potentiels de l’État. "Le recrutement et les opérations d’espionnage proprement dites sont laissés aux services secrets, précise James Jiann Hua To. Mais, en faisant vibrer la fibre nationaliste de certains, le bureau des Chinois de l’étranger les amène parfois, fût-ce à leur insu, à lui transmettre des informations stratégiques."

Des visas longue durée en échange d’investissements immobiliers

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Dans le même temps, de nombreux pays occidentaux tentent d’attirer ces capitaux en exil. Au Portugal, en Espagne ou en Grèce, des visas de longue durée sont octroyés en échange d’investissements immobiliers. L’an dernier, les États-Unis ont accordé des visas à 6 895 Chinois de République populaire, en échange d’un investissement de 500 000 dollars dans le pays. La quête de l’air pur et d’une meilleure qualité de vie n’est pas la seule préoccupation des exilés.

Beaucoup s’efforcent aussi de mettre leur argent à l’abri. La banque centrale chinoise estime que plus de 123 milliards de dollars ont été siphonnés par des fonctionnaires plus ou moins corrompus depuis le milieu des années 1990. Une grande partie de cette somme a été investie à l’étranger.

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