Burkina : selon son avocat, « ce serait une honte » que Djibrill Bassolé ne soit pas libéré

Dans un rapport rendu public début juillet, le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire demande la « libération immédiate » de Djibrill Bassolé. Son avocat, Me Varaut, espère désormais que les autorités burkinabè vont se plier à cette requête.

Djibrill Bassolé, ex-chef de la diplomatie burkinabè. © Camille Millerand pour Jeune Afrique.

Djibrill Bassolé, ex-chef de la diplomatie burkinabè. © Camille Millerand pour Jeune Afrique.

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Publié le 6 juillet 2017 Lecture : 3 minutes.

Accusé d’avoir participé à la tentative de putsch du 16 septembre 2015, Djibrill Bassolé avait été arrêté deux semaines plus tard et inculpé, entre autres, d’attentat à la sûreté de l’État. L’ex-ministre des Affaires étrangères de Blaise Compaoré, qui a toujours nié toute implication dans ce coup d’État manqué, avait ensuite déposé plainte en septembre 2016 devant le groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire pour contester son incarcération.

Le 3 juillet, ce groupe d’experts a rendu son rapport. Celui-ci considère que la détention de Djibrill Bassolé est « arbitraire » et demande sa « remise en liberté immédiate ». Me Alexandre Varaut, l’avocat français de cet ancien fidèle de Blaise Compaoré, se félicite de cette décision et attend maintenant qu’elle soit appliquée par les autorités burkinabè.

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Sur quels éléments se basent les experts du groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire pour demander la « libération immédiate » de Djibrill Bassolé ?

Les experts considèrent que Djibrill Bassolé n’a pas bénéficié de toutes les garanties dont on doit normalement jouir dans un État de droit. Ils rappellent aussi les grandes réticences de l’ONU à l’égard du principe de justice militaire. Le rapport affirme ainsi que la justice militaire n’est pas un bon moyen de juridiction, car elle n’est pas suffisamment indépendante. Le groupe constate que la seule solution à ce dossier est la remise en liberté immédiate de M. Bassolé et il appelle à envisager le versement d’une indemnisation. C’est donc une décision particulièrement sévère. Je ne vois pas comment le Burkina Faso pourrait ne pas la respecter.

Que change ce rapport dans la procédure judiciaire en cours contre M. Bassolé ?

Il n’a pas un effet direct sur le juge d’instruction, mais il en a un sur les autorités du Burkina Faso. Quand on est membre des Nations unies, cela n’est pas uniquement parce que l’on est content de faire partie d’un club international, mais parce que l’on considère cette institution comme une organisation utile et nécessaire, qui défend un certains nombres de droits internationaux. La moindre des choses est maintenant que le ministre de la Défense demande au commissaire du gouvernement (le procureur du tribunal militaire, NDLR) de requérir la mise en liberté immédiate de M. Bassolé. Dans le cas contraire, ce serait un camouflet que le Burkina Faso infligerait à l’ONU.

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Selon vous, les autorités burkinabè vont-elles se plier aux recommandations du groupe d’experts ?

Je crois que oui. Je ne peux pas imaginer le contraire. Les autorités burkinabè ont participé à la procédure du groupe d’experts des Nations unies sur la détention arbitraire en lui envoyant un long mémoire et des documents. À partir du moment où elles ont décidé de participer à cette procédure, alors elles sont obligées d’en respecter les conclusions.

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Que comptez vous faire si les autorités burkinabè ne le font pas ?

Nous ferons un scandale. Ce serait une honte pour le Burkina Faso, dont les autorités ne cessent d’expliquer qu’elles sont engagées dans une nouvelle phase plus démocratique, avec davantage de libertés et de droits individuels… Tout cela est voulu par le président dans le cadre de la nouvelle Constitution, et cela commencerait par un camouflet infligé à l’ONU ? Ce n’est pas possible. On ne peut pas vouloir une chose et faire le contraire.

Pouvez-vous garantir que Djibrill Bassolé assistera à son éventuel procès s’il est remis en liberté ?

Tout d’abord, cela serait légitime que M. Bassolé bénéficie d’un non-lieu et qu’il ne soit pas concerné par ce procès. Mais s’il devait l’être, il sera évidemment là pour être jugé. Si un jour ce procès a lieu, il sera même au premier rang pour se défendre.

Djibrill Bassolé a eu des problèmes cardiaques ces derniers mois. Comment se porte-t-il aujourd’hui ?

Un peu mieux, mais nous restons extrêmement inquiets. Et ce ne sont pas des obsessions d’avocat mais des constatations de médecins. Le cardiologue de l’hôpital de Ouagadougou a indiqué qu’il ne disposait pas des moyens techniques pour venir à bout du problème cardiaque de M. Bassolé. Il prend donc des médicaments, dont on espère que ce sont les bons, faute d’avoir pu faire des examens plus poussés. Ces médicaments vont soit le guérir, soit le tuer à petit feu. Nous avons une vraie inquiétude à ce sujet. Une fois de plus, je constate que le Burkina Faso n’a pas pris les mesures qui constituent l’évidence en matière de droit humanitaire : quand quelqu’un risque sa vie en prison, on lui permet de se soigner.

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