RDC – Félix Tshisekedi : « Aucun parti ne peut gagner seul »
Après deux semaines passées au chevet de son père, l’opposant congolais (RDC) Étienne Tshisekedi, à Bruxelles, Félix Tshisekedi retourne dans la mêlée Kinoise. Entretien.
Félix Tshisekedi était attendu dans la capitale congolaise, samedi 30 août. Officiellement, il s’agit de préparer le retour du président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) au pays. Mais, comme Félix l’admet, sa "convalescence" durera encore – au mieux – plusieurs semaines.
Il pourrait poursuivre son rapprochement avec Vital Kamerhe et Martin Fayulu, deux autres opposants en vue. Et en profiter pour tenter de régler des dissensions internes qui se multiplient dans son parti en l’absence du "président et rassembleur". Si personne ne veut commettre de crime de lèse-majesté (malgré ses 81 ans et un état de santé dégradé, Étienne Tshisekedi reste officiellement le candidat du parti) la succession est dans toutes les têtes à l’UDPS.
Quelques jours avant son son retour à Kinshasa, il a accepté de répondre aux questions de Jeune Afrique.
Jeune Afrique Quel est l’état de santé de votre père, Étienne Tshisekedi ?
Félix Tshisekedi : Il évolue dans le bon sens. Un premier bilan médical avait été fait à son arrivée [à Bruxelles, le 16 août]. Il était porteur d’espoir car le pronostic vital n’est pas engagé. Il est parti pour une convalescence de quelques semaines. Je pense que fin septembre – début octobre, il sera opérationnel.
Et de retour à Kinshasa ?
Cela il faudra voir, car nous allons devoir préparer son retour.
Est-il hospitalisé ?
Il suit des soins ambulatoires à son domicile. Il a été hospitalisé le jour de son arrivée pour faire un bilan de santé. Cela a pris le temps d’un week-end. Depuis, il est à la maison.
Souffre-t-il d’un handicap ou d’une paralysie ?
Non. Ce sont des rumeurs. Bien évidemment, un homme de son âge [81 ans] récupère moins vite qu’un jeune homme. Il est resté longtemps confiné à la maison, parce qu’à la moindre sortie, c’était l’émeute… Il a besoin de délassement pour remettre les articulations en marche. Mais il n’a pas de handicap. Vous le verrez quand il réapparaîtra.
Sera-t-il capable d’être candidat lors de la prochaine présidentielle ?
Oui, je le pense. Aujourd’hui, un monument comme Étienne Tshisekedi n’a pas besoin de sillonner toute la république pour se faire connaître. Le moment venu on jugera en fonction de la situation où nous sommes. Mais son potentiel physique et intellectuel n’est pas atteint.
Étienne Tshisekedi est l’homme de la situation et le candidat qu’il nous faut.
Quand le prochain congrès de l’UDPS aura-t-il lieu ?
Normalement fin décembre 2015. Il peut y avoir, d’ici là, un congrès extraordinaire. Mais c’est le président qui doit le convoquer.
S’il ne se représente pas, excluez-vous d’être candidat ?
En politique, il ne faut jamais dire jamais. Donc je ne peux pas l’exclure. Mais je n’y pense pas, parce que, pour l’instant Étienne Tshisekedi est l’homme de la situation et le candidat qu’il nous faut.
Avez-vous été approché pour la constitution du prochain gouvernement de cohésion nationale ?
Non, pas du tout.
Le groupe parlementaire "UDPS et alliés" [présidé par Samy Badibanga] est-il membre de votre parti ?
Leur attitude avait provoqué une crise de confiance, à la suite de leur décision d’aller siéger contre l’avis du parti. Mais je crois que l’UDPS a besoin de se retrouver pour résoudre ce cas. S’ils manifestent vraiment le désir de retrouver leur famille politique, je dis pourquoi pas. On ne peut pas considérer leur acte comme de la trahison, mais plutôt comme de l’indiscipline. L’indiscipline, cela se sanctionne et puis cela s’oublie.
Quand cette réunion pourrait-elle avoir lieu ?
Il pourrait y avoir un forum ou un conclave, convoqué par le secrétaire général Bruno Mavungu et les cadres. Cela permettrait aussi de rassembler le parti. En l’absence du président et rassembleur du parti, différentes tendances se sont manifestées et elles font désordre.
Une révision de la Constitution serait-elle acceptable si elle ne touche pas au nombre de mandats présidentiels ?
Non. Il faudrait qu’on nous dise à quoi elle servira. À chaque échéance électorale, il y a des retouches de la Constitution pour aider [le président] Joseph Kabila. La première, c’était avant les élections de 2006, lorsqu’on a diminué l’âge minimal des candidats pour lui permettre de se présenter. En 2011, nous sommes passés d’un scrutin de deux tours à un tour. Nous disons, pas de réforme de la Constitution avant le départ de Kabila.
>> Lire aussi : Vers le troisième mandat de Joseph Kabila en 2016 ?
Je suis favorable à un report des élections locales.
Je ne souhaite pas qu’on reporte les provinciales. Ce sont des élections importantes. Elles vont donner lieu à l’élection des gouverneurs de Province qui sont tous du bord politique de Kabila. C’est très dangereux pour la crédibilité du processus électoral.
Par contre, je suis favorable à un report des élections locales. Il doit y avoir 10 000 candidats, 6500 tribunaux de paix à installer, 800 circonscriptions à redécouper… Je ne crois pas le Congo d’aujourd’hui capable de le faire. Les locales sont destinées à faire tirer en longueur le processus pour passer le cap de 2016, et faire gagner un mandat à Kabila.
Vous avez signé une déclaration avec les opposants Vital Kamerhe et Martin Fayulu, appelant à déférer Joseph Kabila devant la Cour pénale internationale. Est-ce une alliance électorale ?
C’est trop tôt pour le dire. La politique congolaise est imprévisible. Cette déclaration est un instantané de la vie politique. Mais notre système électoral est fait de telle sorte qu’aucun parti ne peut atteindre seul la majorité des sièges au Parlement. Nous n’en sommes pas encore là, mais aucun scénario n’est exclu.
>> Lire aussi : l’opposant Ewanga, proche de Kamerhe, arrêté au lendemain d’un meeting à Kinshasa
Certains affirment que votre mère, Marthe Tshisekedi, cherche à vous imposer à la tête du parti. Quel rôle y joue-t-elle ?
Je veux tordre le coup aux rumeurs sur son influence. Ma mère me soutient, comme toutes les mères du monde avec leurs fils. Mais elle n’a rien fait de répréhensible. Elle a son mot à dire parce qu’elle connait l’histoire de ce parti, elle l’a vu naître. Elle a été sollicitée à plusieurs reprises, par différents cadres, pour intervenir auprès de son mari. Et aujourd’hui, ce sont les mêmes qui veulent la diaboliser pour jouer leur propre carte.
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Propos recueillis par Pierre Boisselet
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