Le Lesotho se dirige vers une sortie de crise sous l’égide de la SADC
La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) a annoncé lundi une sortie de crise au Lesotho après le coup de force de l’armée : le Premier ministre en fuite rentre, des observateurs vont être envoyés et le Parlement doit être rétabli.
Après des discussions marathon à Pretoria sous l’égide de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), le petit royaume montagneux, enclavé dans l’Afrique du Sud et plongé dans la crise depuis samedi, espère retrouver une certaine stabilité politique.
"La SADC s’est mise d’accord pour déployer en urgence une équipe d’observateurs politique, de défense et de sécurité", selon un communiqué de l’organisation régionale. En outre, "les leaders de la coalition gouvernementale ont accepté (…) une feuille de route prévoyant des étapes claires pour conduire à la levée de la suspension du Parlement", une suspension qui avait contribué à la crise actuelle.
Demande d’intervention de la SADC
Le Premier ministre était présent aux discussions de Pretoria, de même que son vice-Premier ministre Mothetjoa Metsing, son grand rival, et que le ministre Morena Maseribane, représentant le troisième parti politique associé au gouvernement depuis 2012.
Au cours de la réunion, les trois hommes "ont souligné que la situation politique et sécuritaire s’était détériorée, réclamant une intervention immédiate de la SADC et son soutien", selon l’organisation régionale.
M. Thabane, contesté depuis des mois par ses alliés, a même réclamé des troupes de maintien de la paix. La SADC est connue pour donner la préférence au dialogue et à la continuité constitutionnelle, au risque d’être parfois accusée de complaisance.
Retour du Premier ministre, vivement critiqué par ses alliés
Réfugié en Afrique du Sud, le Premier ministre Thomas Thabane, qui affirmait encore samedi que sa vie était menacée par les auteurs d’un "coup d’État", prend la route du retour. "Nous rentrons au pays maintenant. Nous serons très probablement au Lesotho demain (mardi)", a déclaré à l’AFP son conseiller Samonyane Ntsekele, qui avait accompagné dans sa fuite le chef du gouvernement.
Le Premier ministre était très vivement critiqué par ses partenaires au pouvoir pour son autoritarisme et pour avoir suspendu le Parlement depuis juin afin d’échapper à une motion de censure. Vendredi, il avait nommé le général Maaparankoe Mahao à la tête de l’armée, en remplacement du général Tlali Kamoli, nomination qui semble avoir mis le feu aux poudres. Le général Kamoli est soupçonné d’avoir organisé l’opération nocturne de l’armée à Maseru. Dans la même nuit, la maison du général Mahao a été mitraillée par des inconnus, sans que l’attaque ne fasse de victimes.
Une situation encore instable
Pour autant, l’issue de la lutte politique au Lesotho reste incertaine. En effet, l’armée a lancé une spectaculaire opération samedi qui a désarmé la police de Maseru et demeure la question de savoir ce qu’elle fera. Soupçonnée d’allégeance à M. Mesting, elle est rentrée dans ses casernes dès samedi, et le haut commandement affirme qu’il n’a jamais été question de coup d’Etat mais seulement de désarmer la police, réputée loyale à M. Thabane.
Quid également du LCD, le parti de M. Metsing, en froid avec le Premier ministre ? Son chef, le vice-Premier ministre, a déclaré à l’AFP: "Il n’y a pas eu de coup d’Etat au Lesotho". Mais il est accusé par ses adversaires d’avoir soutenu, sinon dirigé, l’opération de l’armée contre la police.
Il s’agit aussi de savoir ce que fera la diplomatie sud-africaine, après avoir rappelé samedi que toute tentative de prise de pouvoir par la force "ne saurait être tolérée". Le Lesotho, bien que très pauvre, présente un intérêt stratégique pour son grand voisin, qui a besoin de l’eau de ses montagnes et de l’électricité produite par ses barrages.
"Pas un coup d’État au sens strict"
"À mon avis, ce n’est pas un coup d’État au sens strict, c’est-à-dire pour chasser le gouvernement", analyse Johan Aerni-Flessner, spécialiste de l’histoire contemporaine du Lesotho à l’université du Michigan, aux États-Unis. Selon lui, le Premier ministre, privé de majorité, a fait l’erreur de vouloir remplacer le patron des forces armées, malgré de vives tensions entre l’armée et la police, reflet des féroces rivalités de la classe politique. Des divisions auxquelles la population, largement rurale, reste complètement étrangère.
(Avec AFP)
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