RDC : à la casse, les vieilles caisses !
Lassées des nombreux accidents causés par des véhicules vétustes et polluants, les autorités de la RDC réagissent. Elles appliquent enfin un décret interdisant l’importation des automobiles de plus de 10 ans.
En RD Congo, les "cercueils ambulants", aussi surnommés "esprits de mort", vivent peut-être leurs dernières heures. Le décret d’Augustin Matata Ponyo, le Premier ministre, interdisant l’importation de véhicules de plus de 10 ans est enfin appliqué. Signé le 2 octobre 2012, celui-ci n’avait jusqu’ici pas été mis en oeuvre. "Pourquoi dépenserions-nous autant d’argent à réhabiliter des routes à Kinshasa pour y faire rouler de vieilles voitures ?
>> Lire aussi : le rêve de faire rouler des voitures "Made in Madagascar"
Ces dernières semaines, l’état du parc automobile s’améliore progressivement", se félicite le ministre de l’Économie, Jean-Paul Nemoyato, cosignataire de ce décret. Au Bas-Congo, province voisine de Kinshasa, qui abrite tous les ports maritimes de RD Congo et où débarquent les "occasions Europe", les opposants au décret affirment que bon nombre d’importateurs dédouanent désormais à Pointe-Noire (au Congo voisin).
Ceux-ci remettraient ensuite 1 000 dollars (750 euros) par véhicule aux douaniers pour entrer, ni vu ni connu, en RD Congo avec une nouvelle plaque d’immatriculation. Les contrôles semblent toutefois avoir été renforcés depuis la fin de 2013, même si à ce jour seulement une vingtaine de véhicules ont été saisis et attendent d’être réexportés ou détruits.
"Nous lancerons des grèves"
Les acheteurs locaux se disent étranglés financièrement.
Les acheteurs locaux, comme Pierre Mvika Nsimba, se disent étranglés financièrement : "Avant, nous ne déboursions que 2 000 à 3 000 dollars pour le dédouanement. Aujourd’hui, pour les véhicules plus récents, qui sont aussi moins nombreux, cela coûte presque le double !" Papa Bihani, président de la société civile de Boma, confirme : "Pour les gens, acheter un véhicule neuf est un luxe ! Ils font donc rouler leurs vieilles voitures quelques années de plus."
Député national du parti présidentiel, le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD), Muller Luthelo Nyudi a même lancé contre ce décret une pétition qui a déjà rassemblé 6 000 signatures. Il la remettra au Premier ministre en septembre, lors de la rentrée parlementaire : "Les ports du Bas-Congo tournent au ralenti. Plusieurs sociétés n’arrivent plus à payer leurs employés. On voit même apparaître dans la région des kuluna [délinquants] comme à Kinshasa. Nous lancerons des grèves jusqu’à l’abrogation du décret." Des mesures compensatoires comme la baisse des droits de douane pour les véhicules récents sont envisagées, mais le ministre de l’Économie le promet : "Le gouvernement ne reviendra pas sur sa décision." Pas de marche arrière, donc, pour les "cercueils ambulants".
Lâcher du lest
Au Gabon, depuis fin 2013, les voitures importées de plus de 3 ans ne sont plus les bienvenues. En 2011, le Cameroun, lui, a plafonné la limite d’âge à 7 ans et mis en place un abattement de 30 % sur la valeur imposable en douane lors de l’importation de tels véhicules. Corruption, trafic de fausses cartes grises et de plaques d’immatriculation : le durcissement de la réglementation n’a pas empêché l’introduction de très vieilles voitures.
Face à ce phénomène, certains pays ont choisi de lâcher du lest. Comme le Sénégal, qui, en 2012, a fait passer la limite d’ancienneté de 5 à 8 ans. Au Nigeria, la "rallonge" a été portée à 10 ans en 2010, mais le pays envisage dès 2015 de taxer les véhicules importés à 300 % et d’encourager la production locale pour promouvoir le marché du neuf. Le Mali a également fixé la limite d’âge à 10 ans.
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