Aux Jeux de la francophonie d’Abdijan, la lutte africaine est reine
Un public nombreux et survolté est attendu pour suivre les finales qui se tiendront ce samedi à Abidjan. La discipline ancestrale était une des plus attendue de cette 8ème édition.
Des clameurs résonnent, les tam-tams s’affolent : enfin, les gladiateurs entrent dans l’arène. Seulement vêtus de culotte de pagnes, ils laissent admirer leurs muscles saillants. Les pieds dans le sable, face à face, c’est à qui terrassera l’autre le plus vite. Trois appuis au sol – main ou genou – et c’est perdu, les colosses ont deux fois trois minutes pour mettre à terre leur adversaire. Mais souvent, il suffit d’une poignée de secondes de corps à corps pour que le combat prenne fin, par KO, sous la clameur d’un public survolté.
Une entrée récente dans les arènes des compétitions internationales
Comme toutes les stars, aux 8ème Jeux de la Francophonie, la lutte africaine s’est faite attendre. Les éliminatoires hommes et femmes ont débuté jeudi 27 juillet, lançant trois jours d’affrontements. L’arène du palais des Sports de Treichville à Abidjan est pleine à craquer pour une discipline qui, avec le football, est la plus prisée de cette édition.
Il s’agissait de défier un autre village, de montrer sa supériorité pour de la nourriture, du bétail ou pour épouser une femme
Malgré sa popularité, cette lutte ancestrale n’a fait son apparition lors compétitions internationales qu’en 1995, lors des championnats africains de Niamey au Niger. Elle a été inscrite au programme officiel des Jeux de la Francophonie à l’occasion de la précédente édition qui s’est déroulée en 2013, à Nice.
« A l’origine, la lutte est une discipline traditionnelle. On combattait lors des fêtes, après la récolte. Il s’agissait de défier un autre village, de montrer sa supériorité pour de la nourriture, du bétail ou pour épouser une femme », raconte Vincent Aka, ancien grand lutteur franco-ivoirien, aujourd’hui responsable du développement de la lutte sur le continent. « Il y avait alors de la lutte un peu partout sur le continent. Pour organiser des compétitions, il a donc fallu la codifier. »
Mysticisme, sport et culture
Empreinte de mysticisme, la lutte africaine allie sport et culture – reflétant ainsi les deux axes des compétitions des Jeux de la Francophonie. Avant chaque combat, les lutteurs chantent et dansent tant pour s’encourager que pour impressionner l’adversaire. Et ne leur dites pas qu’il s’agit d’une activité de brutes.
« Bien sûr, il faut de la force, mais cela requiert surtout beaucoup de technique et de tactique », explique l’athlète guinéen N’Fassoumah Soumah, 1m72 pour 115 kilos. « Pour être compétitif, on est obligé de s’entraîner énormément. Moi, c’est quatre heures par jour, six jours par semaine. On fait de la musculation, de la course… on se doit d’être complet. »
Le Sénégal grand favori
Sans surprise, le Sénégal part grand favori pour la finale par équipe qui l’opposera au Burkina Faso samedi 29 juillet. Dans le pays, la discipline est en effet une religion, et les lutteurs peuvent gagner plusieurs millions de francs CFA par combat. Mais si elle est très pratiquée dans les pays sahéliens, dans le reste du continent, la lutte africaine est souvent confidentielle.
En Côte d’Ivoire, elle a par exemple presque totalement disparu. Madagascar ou encore la République démocratique du Congo ont ainsi été éliminées dès le premier tour, tout comme les Roumains, seuls non-africains à être venus s’être frottés à l’exercice. Les lutteurs espèrent ainsi faire de ces Jeux de la francophonie une vitrine pour leur sport.
Véritable succès populaire, cette 8ème Jeux ont vu le public affluer grâce à la gratuité de l’entrée dans les stades et malgré les menaces sécuritaires. Après les mutineries qui ont secoué le pays en janvier et en mai, une nouvelle attaque armée a en effet eu lieu en plein centre d’Abidjan, suscitant une forte inquiétude. Au total, 3 600 athlètes venus de 53 pays francophones ont fait le déplacement. Ces 8èmes Jeux prendront fin dimanche.
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