Maroc : décès de Abdelmajid Dolmi, maestro du football national
La star du foot marocain s’est éteinte jeudi des suites d’un malaise cardiaque. Il laisse derrière lui une carrière de 20 ans faite d’abnégation et de générosité.
Le monde du football marocain est sous le choc. Jeudi 27 juillet, celui qu’on surnomme « le maestro », Abdelmajid Dolmi, a tiré sa révérence à l’âge de 64 ans suite à un malaise cardiaque. L’ancien milieu de terrain a fait partie de la légendaire équipe ayant disputé le mondial de Mexico 1986 sous le commandement du non moins légendaire José Mehdi Faria.
black;background: white">Au lendemain de son décès, le roi Mohammed VI a adressé un message de condoléances à sa famille déplorant « un grand sportif, qui a marqué les Marocains grâce à son talent et ses qualités techniques, ainsi qu’à son engagement, son calme, son esprit sportif, et sa grande combativité ».
C’était un anti bling-bling, quelqu’un qui ne s’est jamais vu comme un grand joueur
black;background: white">Car Dolmy n’était pas qu’un simple joueur de foot. Pour les Marocains, c’était une école, un état d’esprit, une icône du Casablanca bohémien et révolutionnaire des années 1970 et 1980. Originaire du quartier populaire de Derb Sultan, il a baigné dans les milieux gauchos, le rock et les chansons populaires engagées. « C’était un anti bling-bling, quelqu’un qui ne s’est jamais vu comme un grand joueur, tellement humble qu’il refusait les interviews parce qu’il estimait qu’il n’avait rien à dire », témoigne Réda Allali, journaliste et expert sportif.
Arrivé au foot par hasard
En 2013, le journaliste réussit à l’interviewer, mais après « des semaines de tractations ». Dolmy a joué le jeu. Sans langue de bois. Il raconte comment il a atterri dans le monde du foot presque par hasard. Son frère avait une équipe de quartier et il l’a sollicité pour la compléter. « Je jouais n’importe où, gardien par exemple…J’y allais pour rendre service », confie-t-il dans cette interview parue dans le magazine l’Équipe Maroc, aujourd’hui disparu.
Depuis, il n’a pas arrêté de jouer. En 1971, il intègre le club casablancais, le Raja, ensuite l’équipe nationale. En vingt ans de carrière – il a arrêté en 1991-, l’homme a connu les Jeux olympiques, la Coupe du monde, la Coupe d’Afrique des nations, les jeux méditerranéens, les jeux panarabes : 150 sélections en tout.
0cm« Les Marocains l’associent au foot. Mais très peu savent qu’il aimait tous les sports. Il était passionné par l’excellence du jeu », raconte Aziz Daouda, directeur technique de la Confédération africaine d’athlétisme, qui l’a connu lors du championnat mondial d’athlétisme de Los Angeles en 1984. Sa générosité, sa discipline et sa discrétion l’ont marqué : « Il s’exprimait dans le silence, ne parlait que lorsqu’il se sentait en confiance. Un philosophe dans la peau d’un sportif ».
« Il n’a jamais pris un seul carton jaune de sa vie », enchaîne Réda Allali. Fait très rare dans les milieux défensifs où les joueurs sont constamment confrontés à l’agressivité. Ce qui lui a valu le Prix du fair-play, décerné par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en octobre 1992. C’était un an après qu’Abdelmajid Dolmy choisisse de mettre fin à sa carrière, en 1991.
La célébrité ne lui disait rien
Il fait partie de ces joueurs atypiques qui se sentaient étouffés par le côté show-biz du foot. Faire carrière à l’international ne lui parlait pas. « Je me souviens d’un match de foot à Monaco, sous les yeux du prince Rainer. Ils [le club de Monaco, NDLR] étaient venus me voir pour me parler d’un transfert. J’ai rigolé et je leur ai dit que j’avais le même âge que leur roi, que j’étais déjà trop vieux… », raconte-il dans la même interview accordée à Réda Allali.
Son esprit rebelle, il le portait en étendard, physiquement. Il avait une crinière à la Jimi Hendrix, qui ne plaisait pas à l’ancien roi Hassan II. « On me disait qu’il [Hassan II] voulait que je me coupe les cheveux. Le colonel Bamous [ancien président de la Fédération marocaine de football, NDLR] est venu me voir pour me dire qu’on avait fait venir le coiffeur et que tout le monde devait y passer. Je l’ai regardé et j’ai allumé une clope. C’est tout. Il ne pouvait rien faire, alors il a fait comme s’il n’avait rien vu », se souvient-il.
Dolmy, c’était un caractère, une époque. Il laissera une trace indélébile dans l’imaginaire des Marocains.
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