À Bangui, un appel à manifester qui en dit long sur la crise politique

Un appel à manifester vendredi 4 août contre le président de l’Assemblée nationale laisse entrevoir le marasme qui frappe la classe politique à Bangui, tandis que le pays renoue avec la violence.

Le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra. © Alessandro Bianchi/AP/SIPA

Le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra. © Alessandro Bianchi/AP/SIPA

CRETOIS Jules

Publié le 3 août 2017 Lecture : 2 minutes.

Cet appel à manifester, très partagé sur les réseaux sociaux, vise à soutenir l’action présidentielle et à dénoncer le président de l’Assemblée nationale, Abdou Karim Meckassoua. Derrière l’initiative, on trouve le « comité de soutien au Professeur Faustin Archange Touadéra », dirigé par Didacien Kossimatchi, un ancien proche du Kwa na kwa de François Bozizé, qui s’est rapproché de Touadéra et qui est aussi le directeur des examens et concours universitaires.

Meckassoua accusé de conspiration

Mi-juillet, Didacien Kossimatchi, a publiquement accusé Abdou Karim Meckassoua « de conspiration », et d’avoir amené des mercenaires tchadiens sur le sol centrafricain. Kossimatchi avait déjà sommé l’élu Georges Anicet Dologuélé de s’expliquer sur des rumeurs semblables, selon lesquels lui aussi chercherait à sortir Touadéra de la présidence par la force et la contrainte.

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Ces accusations font bondir Abdou Karim Meckassoua, qui renverse l’accusation. « Le mot d’ordre de la manifestation semble n’être rien de moins que le renversement du bureau de l’Assemblée nationale et de son président… En voilà des manières de putschiste », s’offusque-t-il, sans cacher qu’il aurait aimé voir le rassemblent du 4 août interdit. Il promet : « Je vais m’adresser à mes compatriotes à mon retour d’Europe qui est imminent. »

Je vais m’adresser à mes compatriotes à mon retour d’Europe qui est imminent

En attendant, l’appel à manifester a vite connu ses premiers déboires. Une tendance d’un petit groupe, les Jeunes avec la majorité présidentielle, qui soutenait la manifestation, a finalement annoncé son retrait de l’initiative. Et le procureur général de Bangui a appelé à la retenue, promettant encore que les récentes violences et tensions connaîtraient toutes un traitement judiciaire.

Un divorce politique en arrière-plan

L’appel à manifester en dit long sur la situation à Bangui. Pendant que le pays renoue avec la violence, dans la capitale, l’ambiance est toujours plus lourde. « Les accusations fusent et le divorce entre l’exécutif et le législatif semble consommé ». Le Chemin de l’Espérance, que dirige Meckassoua, est pourtant censé appartenir à la majorité présidentielle… Cette césure entre deux institutions nous inquiète beaucoup », confie un député. Entre Touadéra et Meckassoua, rivaux lors de l’élection présidentielle de 2016 et tous deux ex-ministres de Bozizé, l’hostilité semble toujours à son paroxysme.

Il y a de la tension au sommet de l’État et aujourd’hui, des « durs » veulent en découdre avec le pouvoir législatif

Et depuis la formation du gouvernement, la méfiance s’est étendue bien au-delà des supporters de ces deux personnalités. Des parlementaires de différentes familles politiques se coordonnaient encore en mai dernier pour menacer le Premier ministre Mathieu Simplice Sarandji, d’une motion de censure. Ce dernier s’est gardé de trop leur faire face et ne s’est présenté que deux fois devant eux depuis 2016.

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Un habitué des couloirs de la présidence confie : « Il y a de la tension au sommet de l’État et aujourd’hui, des « durs » veulent en découdre avec le pouvoir législatif. Ils veulent mettre la pression sur une Assemblée perçue comme rétive. » De quoi inquiéter dans un pays habitué aux violences politiques.

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