À quoi ressemblera la ville africaine idéale en 2135 ?

Penser nos villes dans leur évolution est un exercice indispensable à toute logique de développement urbain cohérente dans la durée.

Le Monument de la Paix de Bamako. © Sylvain Cherkaoui pour JA

Le Monument de la Paix de Bamako. © Sylvain Cherkaoui pour JA

archi
  • Mouhamadou Abass Sall

    Architecte sénégalais, Mouhamadou Abass Sall est le fondateur et directeur général du cabinet d’architecture Lamtôro, créé en 2007, à Dakar.

Publié le 16 août 2017 Lecture : 3 minutes.

Le centre ville de Dakar au Sénégal. © Daouda6363/CC/WikimediaCommons
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Afrique de l’Ouest : ces villes où il fait bon vivre

En Afrique de l’Ouest, les États et les collectivités territoriales ont enfin replacé les citadins au cœur des schémas directeurs, des plans de développement et des politiques territoriales. Pour quel résultat ?

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Pour cela, il convient de se projeter dans un futur éloigné afin d’envisager ensemble, non pas juste l’émergence de nos pays dans un horizon proche (2035), mais avant tout le citoyen ouest-africain prospère de 2135. Rêver un horizon lointain qu’aucun de nous ne pense voir de son vivant permet de se détacher de ses intérêts personnels et de ses besoins primaires afin de réfléchir de manière fluide, libéré de toute contrainte, à nos villes idéales, conformes à nos cultures et à nos modes de vie, à ces villes qui constituent le cadre de vie dans lequel nous souhaitons évoluer et où nous souhaitons planter des graines, aujourd’hui, maintenant.

Nous devons nous projeter vers le citoyen prospère de 2135

Imaginez-vous, en 2135, nos micro-États encore enclavés et balkanisés dans une Afrique de l’Ouest tumultueuse, entourée de voisins aux intérêts différents et concurrents ? Ou voyez-vous peut-être des États matures, éléments cohérents d’une entité africaine fonctionnelle en symbiose avec son entourage, partageant les mêmes objectifs, aspirant aux mêmes idéaux ?

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Un Sénégal, un Mali, une Côte d’Ivoire, un Burkina Faso prospères, ayant émergé des décennies plus tôt, à l’économie stable « dévassalisée » (et non dévalisée), présentant un cadre infrastructurel abouti et valide, un système éducatif maîtrisé avec des étudiants étudiant, un environnement sanitaire proactif, efficace et accessible ?

Nous pensons trop vite au « comment ? »

Imaginez-vous, toujours en 2135, un citoyen ouest-africain friand de faits divers, éternellement râleur, rarement productif, toujours attentiste, reportant toujours la responsabilité de son malheur sur l’autre (l’esclavagiste, le colon, nos gouvernements successifs, les néocolons, les voisins, Dieu, le Coran), jamais sur lui-même ?

Ou voyez-vous peut-être un Béninois fort financièrement, à l’abri du besoin, non pas parce que l’État aura subventionné son riz et son pain, mais parce qu’il est un travailleur acharné, conscient de sa valeur et de son potentiel à faire fructifier l’entité au sein de laquelle il évolue, à l’échelle de la famille, de l’entreprise, puis de la société et, plus largement, du monde ? Un Sénégalais non pas juste centré sur lui-même, mais ouvert sur l’humanité, soucieux de préserver la nature parce que comprenant son importance ? Un Sénégalais positif, actif et très peu bavard ?

Nous pensons généralement trop vite au « comment ? » et au « en combien de temps ? », sans prendre le temps de définir le « quoi ? ». L’aspect opérationnel d’une collaboration n’a de sens que lorsqu’il s’inscrit dans une vision universelle, acceptée par tous comme reflétant l’objectif ultime.

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Accordons d’abord le village entier sur le postulat suivant : nous devons obtenir de l’eau pour la survie de la tribu. Ensuite, si l’un pense qu’il faille creuser un puits, que l’autre propose de recueillir et de stocker la pluie ou de désaliniser l’eau de mer, nous œuvrons ainsi tous, du moins, à l’augmentation de nos réserves.

Des âmes responsables

Lorsqu’on demande à un architecte de décrire la ville idéale, on s’attend trop souvent à l’entendre parler d’urbanisme, d’environnement, d’énergies propres, d’assainissement ou encore de couleurs harmonieuses, d’infrastructures judicieusement conçues, de flux humains et de ratios démographiques.

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La ville idéale, selon moi, est la ville où des âmes responsables se lèvent tous les matins avec la ferme intention de répandre le bien autour d’elles, d’avoir un impact positif sur l’autre. Concevoir, penser, rêver une ville pour ce citoyen modèle, instruit mais d’abord éduqué, est chose aisée. Bâtissons les hommes, ils se chargeront du reste.

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