Sans une politique d’éducation ambitieuse, le développement de l’Afrique restera un vœu pieux

Du 10 au 19 juillet s’est tenu à New York le deuxième Forum politique des Nations unies pour le développement durable, avec comme thème cette année l’élimination de la pauvreté.

Des écoliers à Mani, au Tchad, à 120 km au sud de la capitale N’Djamena, le 21 février 2006. © SAYYID AZIM/AP/SIPA

Des écoliers à Mani, au Tchad, à 120 km au sud de la capitale N’Djamena, le 21 février 2006. © SAYYID AZIM/AP/SIPA

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  • Dominique Ouattara

    Dominique Ouattara est l’épouse d’Alassane Ouattara, président de la République de Côte d’Ivoire. Anciennement chef d’entreprise, elle se consacre aux activités de sa Fondation Children of Africa depuis l’élection de son époux, ainsi qu’au Fonds d’appui aux femmes de Côte d’Ivoire (FAFCI) qu’elle a fondé en 2012.

Publié le 7 août 2017 Lecture : 4 minutes.

Cette problématique me tient, vous le savez, particulièrement à cœur car elle est intimement liée à l’éducation, ou plutôt au faible niveau de scolarisation dans les zones les plus pauvres de la planète. Le dernier rapport de l’Unesco sur le sujet a une nouvelle fois mis en lumière ce qu’il décrit comme une « crise globale de l’apprentissage » dans le monde. Selon ses conclusions, le nombre de personnes en situation de pauvreté serait réduit de plus de moitié, soit 420 millions individus au total, si tous les adultes achevaient leurs études secondaires. Ce taux s’élève même à deux tiers de la population en Asie du Sud et surtout en Afrique subsaharienne. Dans cette région, le taux de non-scolarisation atteint, aujourd’hui encore, des sommets : plus de la moitié (57 %) des jeunes de 15 à 17 ans ne vont pas à l’école, comme plus d’un tiers (36 %) d’adolescents de 12 à 14 ans et d’un cinquième (21 %) des enfants de 6 à 11 ans. Dans les pays pauvres, les filles sont davantage sujettes à ce fléau que les garçons, surtout dans l’enseignement primaire.

Certains pays parmi les plus touristiques et les plus gâtés par la nature voient pourtant l’éducation de leurs enfants bafouée. Exerçant souvent sous la contrainte, des hommes et femmes en devenir sont victimes de maltraitance et d’abus qu’ils n’auraient pas subis, sauf exceptions, sur les bancs de l’école. Si la pauvreté du foyer familial en est la principale cause, cela s’explique aussi par le manque d’instruction des parents, qui répètent malgré eux le même cercle vicieux auquel ils ont été confrontés.

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Les nombreux bienfaits de la scolarisation sur la société

L’enjeu de la scolarisation est vital pour les jeunes du monde entier. Tandis que le manque d’éducation plonge irrémédiablement ceux qui le subissent vers la pauvreté, la maladie ou la délinquance, le nombre d’années passées à l’école assure, à l’inverse, des bienfaits économique, sanitaires et sociaux. Selon un précédent rapport de l’Unesco, l’acquisition des compétences de base en lecture ferait reculer de 12 % la pauvreté au niveau mondial, une année d’étude supplémentaire permettant d’augmenter les revenus de 10 % en moyenne.

L’éducation contribuerait également à la réduction de la mortalité maternelle et infantile, mais aussi à l’augmentation des rendements agricoles, de l’égalité entre les sexes et même de la paix dans le monde. Or l’Afrique subsaharienne cumule les handicaps, puisqu’au manque d’élèves dans les classes s’ajoute le faible nombre d’enseignants. D’après la Banque mondiale, le ratio professeurs-élèves en primaire y est de 1/42, contre 1/15 en Europe, en Asie centrale et en Amérique du Nord.

La question de l’inclusion et de la qualité de l’éducation reste un des défis majeurs

Dans son rapport sur le suivi mondial de l’éducation, l’Unesco reconnaît qu’en Afrique, « les États ont posé des actions importantes en matière d’accès à l’éducation, [même] si la question de l’inclusion et de la qualité de l’éducation reste un des défis majeurs ». Depuis le Forum mondial de Dakar en 2000, la société civile joue également un rôle majeur à travers les associations et ONG locales, comme l’ont signalé la Banque mondiale et l’Unesco. Le partenariat mondial pour l’éducation (GPE) a ainsi donné naissance au Fonds de la société civile pour l’éducation (FSCE), qui dispose de 29 millions de dollars sur la période 2016-2018 pour mener des actions en faveur de la scolarisation.

En Côte d’Ivoire, le programme soutenu par le GPE a permis de financer le recrutement de plus de 15 000 professeurs supplémentaires en primaire, la construction ou la réhabilitation de 581 salles de classe pour plus de 23 000 élèves ainsi que la distribution de plus d’un million de manuels scolaires. Depuis près de 20 ans, la Fondation Children of Africa s’emploie, elle aussi, à favoriser la scolarisation des jeunes Ivoiriens, ainsi que ceux de dix autres pays d’Afrique de l’Ouest via des campagnes visant à convaincre les familles de l’intérêt de l’école pour leur avenir.

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Au-delà des discours, la nécessité d’agir concrètement

Mais la mobilisation de la société civile ne s’arrête pas là : elle doit être complétée par des actions ciblées afin de concrétiser et de pérenniser le retour à l’école. Cela passe obligatoirement par un soutien matériel. En novembre dernier, les équipes de Children of Africa ont distribué 12 000 kits comprenant tenues, cartables et fournitures scolaires d’une valeur de 200 millions de FCFA (305 000 euros) dans 40 villes à travers le pays. Un mois plus tôt, l’association avait déjà fait don d’équipements et de jeux d’une valeur de 50 millions de FCFA (76 000 euros) au groupe scolaire de Vridi Cité à Abidjan.

Elle fait aussi la promotion de la lecture et de la culture à travers le programme Bibliobus, que j’ai eu l’honneur de lancer en 2008. Depuis bientôt 10 ans, huit bus équipés de 30 000 livres, d’ordinateurs et d’un vidéoprojecteur sillonnent les quartiers défavorisés et les zones rurales de Côte d’Ivoire pour œuvrer à l’alphabétisation des enfants. Plus de 200 000 jeunes Ivoiriens en ont déjà bénéficié. Autant de futurs adultes qui, je l’espère, briseront la chaîne de pauvreté causée par les inégalités d’accès à l’éducation.

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