RD Congo : tout ce qui brille n’est pas or
Un cadre économique solide, une croissance élevée, des comptes assainis… Beaucoup d’indicateurs sont au vert. Mais pour les Congolais, la réalité est moins rose.
La RDC, un diamant brut
Avec ses millions d’hectares de terres arables, de mètres cubes de minerais précieux et ses ressources humaines, le pays a tout pour décoller. À condition bien sûr que les conflits cessent, que la gouvernance s’améliore vraiment, que les investisseurs reviennent. Et que l’avenir politique s’éclaircisse enfin.
Si riche, et pourtant si pauvre ! C’est tout le paradoxe de la RD Congo qui, depuis ces dernières années, affiche un taux de croissance parmi les plus élevés du continent, en même temps que l’un des indices de développement humain (IDH) les plus faibles au monde – elle se place en avant-dernière position, juste devant le Niger.
« Le pays est confronté à un défi majeur : mettre son économie au service de sa population », résume la note de conjoncture publiée par la Banque africaine de développement (BAD) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) au premier semestre 2014.
En visite à Kinshasa en juin, les experts du Fonds monétaire international (FMI) ont ainsi estimé que la RD Congo bénéficiait désormais d’un cadre macroéconomique « solide », même si ses habitants n’en ressentent pas les effets dans leur vie quotidienne et que la croissance devrait s’essouffler.
Alors que l’on table sur + 8,7 % pour 2014, elle devrait perdre 0,2 point l’an prochain, repasser sous la barre des 8 % en 2016 et au-dessous des 7 % à l’horizon 2019 – ce qui n’en demeure pas moins un excellent résultat.
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Menace
« Si les indicateurs sont bons depuis 2010, c’est essentiellement grâce aux investissements réalisés dans le secteur minier. Tout dépend donc de la demande internationale en minerais : un repli de cette dernière pourrait entraîner une baisse des investissements directs étrangers [IDE], explique un économiste du FMI. Par ailleurs, une possible résurgence des conflits dans l’est du pays continue de faire peser une menace sur les finances publiques et le climat des affaires. »
Ces deux dernières années, le gouvernement a tout de même sérieusement assaini les comptes de l’État et amélioré l’environnement des affaires. Le déficit budgétaire a été ramené à 1 %, et les dépenses ont été réorientées pour mieux répondre aux impératifs de reconstruction du pays (routes, électrification…) – ce qui, au passage, a permis au secteur du BTP de contribuer fortement à la croissance économique du pays.
Bouchées doubles
Les pouvoirs publics s’attaquent dorénavant à la dédollarisation de l’économie : une phase essentielle pour lutter contre l’inflation, toujours douloureuse pour des populations déjà fragilisées.
Après avoir atteint 23 % en 2010, le taux d’inflation se maintient enfin à moins de 1 % depuis 2013. Mais si les spéculations attendues sur le prix du ciment se confirment, il pourrait déraper à nouveau et grimper à plus de 4 % en 2015. Afin de consolider les finances publiques, d’importantes mesures ont également été prises pour élargir l’assiette fiscale et améliorer les recettes de l’État, notamment dans le secteur des industries extractives.
Plusieurs niches et exonérations ont été supprimées depuis l’an dernier. Et le gouvernement a aussi mis les bouchées doubles pour simplifier la vie des opérateurs économiques, en faisant disparaître quelque 245 taxes et en créant un guichet unique, ce qui réduit le délai de création d’une entreprise de cinquante-huit jours à trois jours.
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Urgence
En dépit de toutes ces avancées, la RD Congo ne décolle pas des profondeurs du classement « Doing Business 2015 » de la Banque mondiale.
En cause : la fraude et la corruption, ainsi que des problèmes récurrents dans l’octroi des permis de construire ou dans le recouvrement des taxes et impôts. Toutefois, le train de réformes engagées lui a permis de se hisser cette année au 47e rang de l’Indice Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG), sur 52 pays classés – elle gagne ainsi 4 places par rapport à 2013.
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Enfin, la situation sécuritaire dans l’Est a contribué à faire chuter les IDE à 2,1 milliards de dollars (environ 1,7 milliard d’euros) l’an dernier, soit une baisse de 36 % par rapport à 2012. Concentrés principalement dans le secteur minier, ces investissements s’orientent désormais vers les hydrocarbures (en plein développement depuis 2012) et, de plus en plus, vers les infrastructures énergétiques et routières ainsi que l’agriculture.
Inscrite au rang des priorités, la relance des activités agropastorales, qui emploient les trois quarts de la population active, est l’un des principaux leviers pour résoudre les problèmes d’emploi et de pauvreté. Une urgence, alors qu’un Congolais sur deux est au chômage et que plus de 85 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, avec moins de 1,25 dollar par jour.
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La RDC, un diamant brut
Avec ses millions d’hectares de terres arables, de mètres cubes de minerais précieux et ses ressources humaines, le pays a tout pour décoller. À condition bien sûr que les conflits cessent, que la gouvernance s’améliore vraiment, que les investisseurs reviennent. Et que l’avenir politique s’éclaircisse enfin.
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