Architecture : pourquoi s’approprier l’héritage colonial est une bonne chose
L’héritage achitectural colonial a souvent été délaissé en Afrique. Mais la tendance commence à s’inverser.
Entièrement détruit, laissé à l’abandon ou réhabilité… Dans un ouvrage* paru en 2010, la Camerounaise Danièle Diwouta-Kotto étudie la relation de trois villes africaines (Douala, Kinshasa, Dakar) à leur patrimoine architectural colonial et la manière dont celui-ci s’intègre à son environnement. Longtemps considéré comme la preuve d’un asservissement qu’il fallait absolument effacer, le patrimoine colonial est aujourd’hui plutôt valorisé…
Tourisme oblige ! Mais, pour Danièle Diwouta-Kotto, d’autres intérêts incitent à sa préservation. D’abord parce qu’il s’agit de bâtiments durables avant l’heure. L’architecture coloniale ne pensait pas climatisation, mais aération. Les constructions faites de briques de terre crue ou cuite, avec un rez-de-chaussée, sur pilotis et à double toiture, étaient toujours situées dans le sens du vent. Très vite, les colons ont eu recours aux matériaux locaux.
"Trouver des solutions sur place"
"Aujourd’hui, il est hélas plus simple pour un Africain de courir les foires géantes de matériaux en Chine plutôt que d’essayer de trouver des solutions sur place", regrette l’architecte Danièle Diwouta-Kotto.
Selon elle, Dakar s’est plutôt bien approprié cet héritage colonial, même si, ici aussi, on a beaucoup détruit. La ville peut se prévaloir de quelque 150 bâtisses classées au patrimoine de l’Unesco, contre à peine une dizaine pour le Cameroun. Généralement réhabilitées et transformées en lieux culturels grâce notamment à des financements étrangers (la forte présence française en facilite l’accès), elles sont ainsi préservées.
Non-acceptation de la période coloniale
La galerie Le Manège est un bel exemple de réhabilitation d’une architecture des années 1950. Kinshasa n’est pas en reste, avec notamment la première poste centrale, expression d’une architecture coloniale régionaliste des années 1920. À Yaoundé, en revanche, la transformation de l’ancien palais présidentiel en grand musée ne se concrétisera peut-être pas. La faute en partie à la non-acceptation de la période coloniale.
L’État camerounais ne tient pas à ce patrimoine, mais ignore par quoi le remplacer. Ainsi à Douala, à La Pagode, ancienne habitation des rois Bell, se sont régulièrement succédé restaurants, agences de voyages, etc. Gérée par l’État, elle aurait pu devenir un musée classé au patrimoine de l’Unesco…
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*Pour aller plus loin : Suites architecturales : Kinshasa, Douala, Dakar, de Danièle Diwouta-Kotto, éd. Villes et architectures d’Afrique, 116 pages, 30 euros
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