RDC – Congo : Mbata ya bakolo, un retour fortement conseillé
Les ressortissants de RDC sont priés de se mettre en règle ou de quitter le pays. Une opération qui accentue les tensions entre les deux voisins.
Nostalgique, Laura la Kinoise se souvient de son arrivée à Brazzaville. C’était en 2003. Elle avait 17 ans. "À l’époque, nous nous sentions à l’aise à Brazza. J’y avais des amis." Laura emploie le passé, car depuis le lancement de l’opération Mbata ya bakolo ("La gifle des aînés" en lingala) au mois d’avril, l’ambiance a radicalement changé, selon elle.
"Même dans le bus, tu n’oses plus dire que tu es de RDC, sinon les Brazzavillois te crient dessus ! Certains trahissent même leurs copines zaïroises en souriant…" Laura n’en est pas là. "Mais, une nuit, confie-t-elle, la logeuse de mon petit copain a menacé de le chasser sous prétexte qu’elle ne voulait plus de Zaïroise dans sa parcelle."
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Recel de malfaiteurs
Le colonel Jules Monkala Tchoumou, directeur central de la sécurité publique et porte-parole de la police du Congo, assume : "Nous demandons aux logeurs de nous signaler ces personnes, sous peine d’être poursuivis pour recel de malfaiteurs. Quant aux chefs de quartier, ils doivent connaître l’identité de ceux qui habitent chez eux."
Jules Monkala Tchoumou souligne cependant que certains clandestins peuvent se mettre en règle par l’entremise de leur employeur, qui doit effectuer pour eux les démarches nécessaires. C’est ce qu’a fait Laura. "Je suis couverte par ma patronne, elle-même originaire de RDC. J’ai mon passeport, il ne me manque plus que ma carte de résident."
Son frère aîné en revanche est reparti à Kinshasa : "Il a la nationalité du Congo-Brazza, mais il est chauffeur de taxi. À cause du dispositif Longwa na nzela ["Dégage de la voie"], on l’a convoqué au commissariat. Il a préféré rentrer, les autres chauffeurs devenaient médisants."
"Une église composée à 99% de Congolais d’ici"
Depuis la fin du mois de juin et avant même le démarrage effectif de l’opération Mbata ya bakolo à Pointe-Noire, plusieurs familles de RDC ont décidé de partir. "Ceux qui n’ont pas assez d’argent pour obtenir des papiers vendent leur parcelle et s’en vont", observe William Katanga, vice-président de l’association ponténégrine des ressortissants de RDC.
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William Katanga vit au Congo depuis plus de vingt ans, dans la légalité. Pasteur d’une église "composée à 99 % de Congolais d’ici", il affirme ne jamais rater une occasion de rappeler à ses ouailles de s’aimer les uns les autres. "Les propos que tiennent certains fils de ce pays font parfois mal. Mais il est vrai aussi que quelques-uns de mes compatriotes vivent ici depuis vingt ans, voire quarante ans, sans documents en règle."
Vagues de départs
Fin juin, le général Jean-François Ndengué, directeur général de la police, a fait un premier bilan de l’opération Mbata ya bakolo, trois mois après son lancement à Brazzaville. Plus de 200 000 "Congolais de Kin" sont repartis volontairement chez eux, de l’autre côté du fleuve, et 1 961 ont été expulsés. Et avec l’annonce du déploiement de l’opération à Pointe-Noire, Dolisie et Nkayi, près de 15 000 autres auraient quitté ces villes entre la fin-juin et la mi-juillet pour rentrer en RDC. À Brazza, l’opération a été renforcée par le dispositif Longwa na nzela ("Dégage de la voie"), afin de faire appliquer un décret de 2011 selon lequel les conducteurs des transports publics doivent être des nationaux. Une trentaine d’étrangers chauffeurs de bus et surtout de taxi, en majorité originaires de RDC, ont été priés d’arrêter leur activité.
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Par Emmanuel de Solère Stintzy
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