Tunisie : les réserves de change flirtent avec le seuil critique
Le stock de devises étrangères détenu par la Banque centrale de Tunis est descendu mi-août à quatre-vingt-dix jours d’importations. Une première depuis 2004 et un nouveau signe de la fragilité des finances de l’État.
C’est un autre indicateur de la fragilité actuelle de l’économie tunisienne. Le stock tunisien de réserves en devises a flirté mi-août avec le seuil des quatre-vingt-dix jours d’importations, considéré comme critique par les institutions financières et en dessous duquel il n’était pas repassé depuis 2004, malgré les difficultés économiques qu’a connues le pays depuis la chute de Ben Ali en 2011.
En cause, une échéance de remboursement d’un emprunt souscrit au Japon (12,7 milliards de yen soit 982 millions d’euros au titre de l’obligation financière Samurai VI) que l’État a dû honorer mi-août. Et de manière plus structurelle, « les perturbations de la production du phosphate et du pétrole » et « la baisse des recettes en billets de banques étrangers malgré l’amélioration de l’activité touristique, à cause de la prolifération du marché parallèle en devises », explique la Banque centrale tunisienne dans une note datée du 24 août.
« Dérapages »
Une tension qui rend le pays très dépendant des bailleurs de fonds internationaux. Ainsi, seuls les 456 millions d’euros encaissés par la Tunisie le 22 août au titre du prêt que la Banque mondiale a accordé à la Tunisie en juin ont donné un peu d’air aux finances de l’État. De même, en avril, le refus du FMI de décaisser une tranche d’aide de 314,4 millions de dollars – finalement débloquée en juin – avait déjà mis le pays en difficulté.
L’institution financière internationale avait, au terme d’une visite dans le pays le 7 février dernier, taclé les « dérapages » de la politique budgétaire, et une « masse salariale de la fonction publique parmi les plus élevées au monde ». Le pays vit une crise de l’État. Son administration est pléthorique et malade. Les effectifs de la fonction publique ont augmenté de 13 % entre janvier 2011 et fin 2015, mais la masse salariale a crevé tous les plafonds, avec une augmentation de 47 % sur la même période.
Le FMI n’est pas le seul à tirer la sonnette d’alarme. En février également, Fitch Ratings a dégradé une nouvelle fois la notation souveraine de la Tunisie (de BB– à B+), désormais reléguée dans une catégorie dite spéculative. L’agence souligne que le pays aura besoin d’emprunter sur les marchés étrangers l’équivalent de 7 % de son PIB pour faire face à ses échéances de remboursement et couvrir les besoins de son budget. Soit environ 10 milliards de dinars en 2017, car le déficit de l’État se conjugue maintenant avec celui des caisses sociales (CNSS, assurance-maladie, et CNRPS, retraites), qui accusent un trou de 2,3 milliards de dinars.
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