Nigeria : à Kano, les femmes en hijab suscitent la peur

Depuis les attentats suicides perpétrés à Kano par des femmes en hijab, la méfiance s’est installée envers toutes celles qui portent la tenue traditionnelle musulmane. À tel point qu’elles sont désormais nombreuses, dans le nord du Nigeria, à changer leur accoutrement…

Un centre commercial à Kano au nord du Nigeria, le 12 aout 2014. © AFP

Un centre commercial à Kano au nord du Nigeria, le 12 aout 2014. © AFP

Publié le 14 août 2014 Lecture : 2 minutes.

Scène ordinaire dans les rues de Kano. Une femme en hijab s’approche d’un distributeur automatique et demande s’il fonctionne. "Dès qu’on lui a dit oui, elle a sorti son téléphone portable, appelé quelqu’un pour lui dire qu’elle avait trouvé un distributeur et aussitôt, toutes les personnes de la file se sont éparpillées, la laissant toute seule", raconte Bala Dawud. "Je frémis quand je me trouve à côté d’une jeune fille en hijab parce qu’elle pourrait être une kamikaze", ajoute-t-il.

Depuis que plusieurs attentats suicides ont été commis par des jeunes filles qui avaient dissimulé des explosifs sous leur tenue, la méfiance envers les femmes en hijab sest emparée de la ville. "Les femmes portant le niqab, qui recouvre la tête et le visage, laissant seulement apparaître le regard, suscitent encore plus de méfiance", selon une autre habitante, Samaila Abdussalam.

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"Kamikaze potentielle"

Désormais, pour échapper à toute suspicion, les musulmanes de Kano délaissent de plus en plus leur habit traditionnel. "Je ne porte plus mon hijab parce que les gens regardent toute jeune femme en hijab comme une kamikaze potentielle, à cause des récents incidents", explique Hajara Musa, une étudiante en stylisme âgée de 17 ans.

Jusqu’ici, le port du hijab long était courant dans la région conservatrice de Kano, où il est considéré comme une marque de pudeur chez les femmes qui sortent de chez elle et qui rencontrent des hommes qui ne sont pas de leur famille. "Je porte maintenant mon foulard quand je sors, en attendant que les habitants de la ville ne soient plus traumatisés par cette tendance effrayante", ajoute Hajara Musa.

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L’étudiante affirme s’être vu refuser l’entrée d’un centre commercial "à cause de [son] hijab", ce qu’elle juge "très inquiétant".

"J’ai arrêté de porter des sacs à mains"

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Suite aux attentats, dont l’un a visé un centre commercial huppé, les mesures de sécurité ont été renforcées près des zones commerçantes où les forces de police stationnent et effectuent régulièrement des patrouilles. Des vigiles sont déployés aux entrées pour contrôler les clients à l’aide de détecteurs à métaux et fouiller leurs sacs.

"J’ai arrêté de porter des sacs à mains à cause des soupçons que cela provoque. J’emporte maintenant un petit portefeuille où que j’aille", affirme une habitante de Kano, Hafsat Yaya.

Nous pensons que les explosifs ont été déclenchés à distance ce qui signifie que ces filles ont agi sous la contrainte, explique une source militaire.

Une source proche de l’enquête sur les derniers attentats de Kano met en garde cependant la population contre les "généralisations hâtives". "Selon nos premières conclusions, toutes les femmes kamikazes avaient entre 14 et 16 ans, ce qui donne une idée de la tranche d’âge" des auteurs des attentats, a-t-elle indiqué.

"Nous pensons que les explosifs ont été déclenchés à distance ce qui signifie que ces filles ont agi sous la contrainte", précise cette même source, soulignant qu’il faut plutôt rester "vigilant face à des jeunes filles qui semblent nerveuses ou agitées en public".

>> Pour aller plus loin : Palestine, Tchétchénie, Nigeria… Quand les femmes se transforment en kamikazes

(Avec AFP)

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