Emmanuel Macron en Afrique : pourquoi le Burkina Faso ?
À l’issue du mini-sommet Europe-Afrique organisé à Paris, ce 28 août, le président français a annoncé qu’il séjournerait « prochainement » à Ouagadougou. Pourquoi le Burkina Faso ?
« L’Afrique n’est pas seulement le continent des crises. (… ) Je me rendrai prochainement à Ouagadougou pour porter ce message ». Voilà une parole de jupitérien qui ressemble fort à la bande-annonce d’un « discours d’orientation africaine ». Mais pourquoi Emmanuel Macron a-t-il choisi la destination burkinabè ? Des hypothèses sont permises…
Écartons d’emblée les trois suppositions les plus loufoques qui se fondent sur le principe que « président échaudé craint l’eau africaine ». Primo, le chef de l’État français aurait choisi un pays dépourvu de façade maritime, se mettant ainsi à l’abri de son propre humour sur les « kwassa-kwassa ». Secundo, la colonisation « contre l’Humanité » de la Haute-Volta serait mieux digérée que celle de l’Algérie. Tertio, le président, au moment de son choix, aurait évité le podium des pays à la fécondité relevant d’un « défi civilisationnel ». Hypothèse toute relative, le Burkina Faso occupant tout de même le sixième rang mondial, avec 5,86 enfants par femme, selon les statistiques de 2015…
Bien sûr, le pays des Hommes intègres est cette nation post-révolutionnaire devenue « docile » aux politiques d’inspiration occidentale. Bien sûr, ce « paradis des ONG » est relativement rassurant. Bien sûr, Ouagadougou a signé des accords de coopération avec la ville du « tonton politique » de Macron, son ministre de l’Intérieur Gérard Collomb. Bien sûr, le jeune président français a obtenu, au Faso, 34% des suffrages exprimés dès le premier tour de la présidentielle, soit un score supérieur à celui qu’il conquit dans l’Hexagone. Au second tour, il s’est même offert le score soviétique de 90%. Mais de tels éléments de langage pourraient sans doute être élaborés pour bien des contrées africaines. Alors pourquoi la destination de Ouaga ?
Il existe ou pas, le vaccin contre la fièvre Ebola ?
Quand un choix ne s’impose pas de lui-même, les plus indécis ont recours à la technique de l’élimination. Entrons donc dans la tête d’Emmanuel Macron. Pour parler à la majorité des Africains, il faut s’y adresser de l’Afrique noire : exit alors le Maghreb. Pour obtenir une attention soutenue, mieux vaut que le président de la France s’exprime depuis un pays ayant la langue française en partage : exit les anglophones, les lusophones et les francophones indécis comme le Rwanda ou velléitaires comme la Guinée équatoriale. Cette « francophonisation » du séjour ne devrait pas avoir, pour autant, de relents françafricains. Exit alors les pays où trop intime fut le lien économique – Gabon, Congo, Niger – ou le lien militaire – Djibouti, Côte d’Ivoire, Tchad. Exit les destinations peu propices à un propos grave, celles que les Français fréquentent habituellement pour des motifs touristiques, comme les Seychelles.
Pas de régions paradisiaques, donc, mais pas non plus de zones kafkaïennes d’où il serait indécent de projeter une emphase optimiste, comme la République centrafricaine. Exit aussi les États dont certains grognons soutiendraient que la gestion publique ne se fait pas « au sens où on l’entend » sous les ors de la République gauloise : le Burundi, la République démocratique du Congo, le Cameroun ou le Togo. Si la lutte contre le terrorisme se doit d’être une part significative des orientations de la politique africaine de Macron, il ne faut ni choisir un lieu de discours exclusivement marqué, en ce moment, par la question sécuritaire, ni totalement épargné par les attentats. Exit alors le Mali où ce thème phagocyterait les autres ou le Bénin où il paraîtrait éloigné des préoccupations quotidiennes. Trop « sarkoziste » le Sénégal où résonna le discours de Dakar. Il restait donc, en finale du choix macronien, la Guinée du président de l’Union africaine et le Burkina Faso de la très romantique insurrection populaire. Il existe ou pas, le vaccin contre la fièvre Ebola ?
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