RDC : l’armée impliquée dans les massacres dans le territoire de Beni, selon un rapport du GEC

Le dernier rapport du Groupe d’étude sur le Congo (GEC), un projet de recherche affilié à l’université de New York, pointe la responsabilité des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) dans le déroulé des massacres de civils dans le territoire de Beni (est de la RDC) entre 2013 et 2016.

Des soldats de l’armée congolaise (FARDC) en novembre 2012 à Minova. © Jérôme Delay/AP/SIPA

Des soldats de l’armée congolaise (FARDC) en novembre 2012 à Minova. © Jérôme Delay/AP/SIPA

Publié le 20 septembre 2017 Lecture : 3 minutes.

Long de 93 pages, le rapport du GEC repose sur les témoignages de 249 sources, qui apportent un éclairage inédit sur les tueries de masse dans le territoire de Beni depuis 2013. Des massacres commis principalement à la machette, qui ont coûté la vie à au moins 800 personnes entre octobre 2014 et décembre 2016, et ont forcé plus de 180 000 personnes à fuir la région.

Le plus souvent, l’origine de ces violences est attribuée aux Forces démocratiques alliées (ADF), une rébellion musulmane ougandaise présente en RDC depuis le début des années 1990. Mais la lecture du rapport met en lumière un écheveau complexe de responsabilités, avec une kyrielle de milices locales (dont les Maï-Maï Mayangose et la milice Vuba) et de groupes armés, qui ont parfois agi « sous l’identité des ADF comme couverture pour leurs activités quand cela s’avérait politiquement opportun ». C’est notamment le cas de certains anciens officiers de l’Armée populaire congolaise (APC), la branche armée d’une rébellion autrefois soutenue par l’Ouganda, dont le leader, Mbusa Nyamwisi, vit en exil en Afrique du Sud.

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Un général déjà étrillé en 2016

Surtout, le GEC pointe la responsabilité écrasante de l’armée congolaise (les FARDC), dont le porte-parole n’était pas joignable mercredi matin pour répondre à cette accusation. Parmi les officiers mis en cause, le rapport souligne le rôle du général Muhindo Akili Mundos, un officier supérieur réputé proche du président Joseph Kabila, désigné fin août 2014 à la tête de la campagne militaire Sukola I dans le territoire de Beni. Déjà étrillé dans un rapport de l’ONU en 2016, qui l’accusait d’avoir incité des individus à commettre des massacres à Beni, l’intéressé avait nié ces accusations.

Le général avait finalement été muté en juin 2015 dans la province de l’Ituri. Reste que sa prise de commandement à Beni en 2014 coïncide avec la reprise des massacres, qui avaient alors fait des centaines de victimes (dont des femmes, des enfants et des vieillards). Des tueries dont la responsabilité incombe pour partie, selon le GEC, à la stratégie mise en place par les FARDC qui visait à « affaiblir leurs rivaux », notamment les réseaux d’anciens officiers de l’APC. « Des rapports fiables indiquent que les chefs de l’opération Sukola I ont rencontré les chefs locaux à Beni et ont cherché la collaboration des ADF » contre les ex-APC.

Une alliance contre-nature avec les islamistes dictée, semble-t-il, par les craintes des commandants des FARDC d’assister à la résurgence de l’APC dans la région. D’après le rapport, certains chefs de Sukola I ont également tenté d’infiltrer des milices contrôlées par d’anciens officiers de l’APC et des autorités locales. « Puis, ils ont utilisé les hommes de l’ex-APC pour commettre leurs massacres, avant de les arrêter. » Une manière de semer la confusion sur le terrain et de jeter le discrédit sur les leaders des ex-APC, que les FARDC soupçonnaient alors de préparer une rébellion.

L’apathie coupable des FARDC

Résultat : les FARDC ont fait preuve d’une apathie coupable face aux massacres de civils, dont « certains se déroulaient à moins d’un kilomètre de leurs bases militaires ». Dans un rapport publié en 2015, le Groupe d’experts de l’ONU sur la RDC rapporte la réponse systématique – et édifiante ! – donnée par les FARDC pour justifier leur inaction : « C’était trop dangereux, il faisait sombre, les soldats étaient mal équipés ou n’avaient pas assez d’effectifs pour réagir ».

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Aux yeux du GEC, le rôle de l’armée congolaise dans cette crise doit faire l’objet d’investigations de la part du bureau du procureur militaire et de l’Assemblée nationale congolaise. Autre requête du Groupe d’étude : « La suspension  de la coopération militaire de la Monusco avec les FARDC dans la zone de Beni, en attendant leurs propres enquêtes internes ».

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