La rentrée, coûte que coûte
Les vacances sont déjà derrière nous. Place à la rentrée ! Sauf que le terme « vacances » n’a pas le même sens sous toutes les latitudes.
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Tshitenge Lubabu M.K.
Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.
Publié le 29 septembre 2017 Lecture : 3 minutes.
Dans les pays de l’hémisphère boréal, c’est la période où les gens, généralement en juillet et en août, décident de se reposer après une longue activité. Ils en profitent pour voyager, se détendre et oublier les vicissitudes de la vie professionnelle. Dans l’hémisphère austral, les vacances sont souvent scolaires. Globalement, les enfants ne vont nulle part, ils errent dans la ville ou le village.
Sauf si, et c’est important, leurs parents ne tirent pas le diable par la queue. Mais que font, vous demandez-vous, les parents qui n’ont pas pris leurs vacances ? Ils travaillent. Comme des forçats ? C’est évident, et surtout volontaire. Et que disent-ils pour justifier une telle conscience professionnelle ? « La chèvre ne mange que là où elle est attachée », fin de citation. Je m’abstiens de tout commentaire.
Les forçats n’oublient pas que septembre et octobre reviennent au galop. Les enfants doivent reprendre le chemin de l’école ou s’inscrire à l’université. Bien entendu, il n’est pas question qu’ils aillent n’importe où : il faut une école privée et une université réputée, même si c’est au-dessus de leurs moyens.
Des demandes ubuesques
Commençons par l’école secondaire. Voici ce qu’une école catholique de Kinshasa demande aux parents dans la rubrique « uniforme » : « Une jupe bleu et blouse blanche de couture simple pour les filles. Une pantalon bleu et chemise blanche (manches courtes) pour les garçons. Une paire de Ketch, pantoufle ou sandales. Une culotte noire avec polo rouge pour la gymnastique pour chaque élève est obligatoire. » J’insiste : les fautes d’orthographe ne sont pas de la rédaction ! Dans la rubrique « divers », vous avez ceci : « Le cahier de communication, le journal de classe, la carte d’élève sont vendus à l’école », laquelle va ensuite jusqu’à demander aux parents du papier pour le petit coin, du savon pour le ménage, des fruits…
Intéressons-nous maintenant à un jeune homme ou à une jeune femme qui vient de terminer ses études secondaires. Ses parents, bien qu’ils soient de condition plus que modeste, ont un devoir : l’envoyer à l’université. Comme le futur étudiant n’a pas encore reçu son diplôme, il doit aller retirer une attestation de réussite au ministère de l’Enseignement primaire et secondaire, à présenter à l’université.
Certificat de bonne vie et mœurs et civisme
Elle devrait être gratuite, mais elle lui coûtera 10 dollars. Le dossier sera complété par une attestation de naissance ; un certificat de bonne vie et mœurs et civisme (quel rapport avec les études universitaires ?) ; un certificat d’aptitude (faut-il être apte physiquement pour que les neurones fonctionnent ?) ; les bulletins des trois dernières classes du cycle secondaire à retirer à son ancienne école et qui vont lui coûter 10 dollars. Et c’est à ce moment-là que l’université lui donne un formulaire à remplir, moyennant 20 dollars.
S’il est admis, ses parents débourseront plus de 700 dollars par an pour les trois premières années du premier cycle (frais académiques, polycopiés, droits d’auteur à payer à un professeur qui a piqué ce qu’il vend sur le web, frais d’inscription aux examens). Si l’étudiant n’est pas épuisé par tous les obstacles qui jonchent son parcours, il paiera 1 800 dollars au second cycle. Au moindre faux pas, c’est patatras !
Maintenant, vous vous demandez comment des parents forçats dont les salaires sont purement symboliques parviennent à s’en sortir. Je vous l’ai dit : la chèvre broute là où elle est attachée. À condition, bien entendu, qu’il y ait assez d’herbe pour… toutes les chèvres.
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