Maroc – Hervé Renard : « Je fais mes choix et je les assume ! »
Le 7 octobre, le Maroc recevra le Gabon à Casablanca à l’occasion de la 5e journée des éliminatoires pour la Coupe du monde 2018 en Russie.
Hervé Renard, le sélectionneur français des Lions de l’Atlas, a fait d’une qualification son seul et unique objectif. Mais le champion d’Afrique 2012 et 2015 a aussi pris le temps de parler de son équipe et de la première sélection d’Amine Harit, l’ancien international français des moins de 20 ans.
Jeune Afrique : Le match face au Gabon le 7 octobre revêt une importance presque capitale pour le Maroc, en vue de la qualification pour la Coupe du monde. Et le succès des Panthères en Côte d’Ivoire le mois dernier (2-1) vient rappeler que rien ne sera facile…
Hervé Renard : Bien sûr. La performance du Gabon à Bouaké a marqué les esprits. Elle l’a relancé dans la course à la qualification. Les Gabonais seront motivés à 100 %, comme nous. Ils vont de plus pouvoir compter sur le retour de Pierre-Emerick Aubameyang, un attaquant de classe mondiale. Cette équipe, nous la respectons. Mais nous n’avons qu’une seule idée en tête, prendre les trois points. C’est vital, pour que notre dernier match en Côte d’Ivoire au mois de novembre ait de l’intérêt. Un autre résultat qu’une victoire nous compliquerait beaucoup la tache [la Côte d’Ivoire compte 7 points, le Maroc 6, le Gabon 5 et le Mali 2, NDLR].
Le match remporté le 31 août dernier face au Mali (6-0) est-il le plus abouti depuis votre nomination, en février 2016 ?
Battre une équipe comme le Mali sur un tel score, en réalisant un match de très bon niveau, cela donne de la confiance. L’idéal aurait été de confirmer quatre jours plus tard à Bamako, dans un contexte particulier, face à un adversaire vexé. On a l’occasion de gagner, mais on manque un penalty. Nous pourrions avoir deux points en plus à ce jour. Cela dit, mon équipe progresse. Dans le pressing, notamment. Elle encaisse également peu de buts. Mais il faut s’améliorer dans la projection vers l’avant. On ne va pas assez vite. Le Maroc a de la qualité technique, mais athlétiquement, nous ne sommes pas au même niveau que d’autres sélections africaines. C’est pour cela qu’on doit compenser autrement.
Je connais les attentes du peuple marocain, qui veut que son équipe se qualifie pour la Coupe du monde
La pression autour de ce match augmente-t-elle de jour en jour ?
Elle existe toujours. Je n’ai pas besoin qu’on me mette la pression. J’y arrive très bien tout seul (rires). Je suis un compétiteur, je suis là pour gagner. J’ai remporté des titres dans l’Est de l’Afrique avec la Zambie, dans l’Ouest avec la Côte d’Ivoire. Je voulais voir si je pouvais être également efficace au Nord (rires). Je connais les attentes du peuple marocain, qui veut que son équipe se qualifie pour la Coupe du monde.
Et si ce n’était pas le cas ? Serait-il possible de rester en poste ?
Mais ce ne sera pas à moi de décider ! Je suis sous contrat. Si le président de la fédération estime que mon travail n’est pas satisfaisant, il me le dira. Moi, je n’ai qu’une chose en tête : la qualification pour la Coupe du monde 2018. Cela ne sert à rien de me parler de mon avenir, de me demander ce que je ferai dans deux ou cinq ans. Car je vous répondrai que seul le voyage en Russie m’intéresse.
Où se situe selon vous le Maroc dans la hiérarchie africaine ?
Parmi les cinq meilleures sélections du continent. Je n’ai pas de star, mais qu’importe : le collectif est la star. J’ai de très bons joueurs. Un groupe dont je suis satisfait à 95 %. Moi, je veux des mecs qui sont investis dans le projet, qui sont contents d’être là, de jouer pour leur pays. Je n’ai pas besoin d’individus qui viennent en faisant la tête, qui se regardent le nombril et pensent que le coach est un gros c… parce ce qu’ils ne jouent pas. Je vais prendre deux exemples : Fayçal Fajr (Getafe, Espagne) n’a pas beaucoup de temps de jeu, mais il a un état d’esprit exceptionnel. Et Fouad Chafik (Dijon), que je n’ai pas retenu pour le match face au Gabon, mais qui lui aussi est quelqu’un sur qui je peux compter.
Vous avez connu quelques problèmes relationnels avec Hakim Ziyech (Ajax Amsterdam, Pays-Bas), lequel est revenu en sélection. Tout est apaisé désormais ?
Oui. J’ai commis des erreurs dans ma communication à propos de ce joueur, qui a beaucoup de talent. Je sais reconnaître quand j’ai une part de responsabilité. Nous avons parlé, il a accepté de revenir, car le Maroc a besoin de ses qualités.
Amine Harit (Schale 04, Allemagne), qui a joué pour les équipes de France de jeunes, a accepté de jouer pour le Maroc. Vous l’avez convoqué pour le match face au Gabon et celui contre la Corée du Sud le 10 octobre en amical à Bienne (Suisse). Comment êtes-vous parvenu à le convaincre ?
Deux ou trois mois après ma nomination, je l’ai contacté, alors qu’il jouait à Nantes. Il allait participer à l’Euro des moins de 19 ans avec la France et il voulait aller au bout de l’aventure. Je lui ai dit en gros : « Je te propose de venir jouer pour le Maroc. Je ne te rappellerai pas, mais toi, tu peux le faire. » Je l’ai juste recontacté pour le féliciter pour son début de saison en Allemagne. Et quand il m’a passé un coup de fil, c’était pour me dire qu’il avait réfléchi et qu’il voulait jouer pour le Maroc. J’en suis très heureux. Amine Harit est quelqu’un de posé, d’intelligent. J’ai parfois eu des joueurs qui avaient donné leur accord pour porter le maillot des Lions et qui changeaient d’avis quarante-huit heures plus tard. Chaque histoire est différente. Il y a le choix sportif, le choix du cœur… Actuellement, nous travaillons sur d’autres binationaux, mais discrètement. Vous comprendrez que je ne vous en dise pas plus (rires…)
Vous avez dirigé quatre sélections (Zambie, Angola, Côte d’Ivoire, Maroc). En Afrique, l’implication du politique dans le domaine sportif, et tout particulièrement le football, est très fréquente…
Vous voulez savoir si j’ai déjà reçu des pressions ? Jamais ! Je fais mes choix et je les assume ! On ne peut pas décider à ma place, m’imposer des joueurs. Vous connaissez un peu mon caractère. Si je dois me planter, c’est avec mes idées, pas celles d’un autre !
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