France : un nouveau projet de loi sur l’immigration
Attirer plus de diplômés et d’entrepreneurs étrangers. Tel est le but du projet de loi que le gouvernement s’apprête à dévoiler. Parmi les nouveautés, un titre de séjour unique pour les professionnels.
Le gouvernement français aurait-il peur des réactions à son nouveau projet de loi sur l’immigration ? Annoncé en 2013 et plusieurs fois retardé, il doit être présenté le 23 juillet en Conseil des ministres, en pleine période estivale, pour une adoption avant la fin de l’année. Il est vrai que l’avant-projet fait apparaître des mesures qui facilitent l’emploi des étrangers dans un pays où le chômage ne cesse d’augmenter.
Mais pour ses promoteurs, il s’agit avant tout d’attirer diplômés, investisseurs et entrepreneurs étrangers afin de doper l’attractivité de la France dans un contexte de concurrence entre pays développés. Le projet de loi s’inscrit donc dans la continuité de la politique d’immigration "choisie" chère à l’ancien président Nicolas Sarkozy.
Le joker du gouvernement pour attirer les compétences ? Le "passeport talents". Destiné aux travailleurs qualifiés et aux entrepreneurs, il doit simplifier l’offre de titres de séjour – en l’état actuel, une chatte n’y retrouverait pas ses petits. Aujourd’hui, un étranger attiré par l’entrepreneuriat a trois choix possibles, une dizaine s’il opte pour le salariat… Avec le passeport talents, exit les cartes "compétences et talents" ou "salarié en mission", place au titre unique !
Hrmonisation des critères
Pour Céline Savarino, responsable de la communication chez Migration Conseil, un cabinet spécialisé dans l’emploi et l’entrepreneuriat des étrangers, "la vraie révolution résiderait dans l’harmonisation des critères" à respecter pour obtenir le nouveau sésame – lesquels diffèrent encore largement selon les profils des candidats – et dans la correction de quelques dysfonctionnements.
Par exemple, l’autorisation provisoire de séjour (APS), qui permet à la France de garder les jeunes diplômés étrangers qu’elle a formés, doit actuellement être demandée quatre mois avant l’expiration du titre de séjour étudiant ; un délai qui gagnerait à être supprimé, estime le cabinet de conseil.
Un titre de séjour "commerçant"
Toujours pour retenir les jeunes diplômés étrangers, la nouvelle loi devrait les autoriser à entreprendre, chose qui n’était jusqu’alors pas permise aux titulaires de l’APS, même si leur projet était financé par des banques. Le projet de loi corrige ce travers en leur donnant la possibilité de solliciter un titre de séjour "commerçant". Mieux, suggère Migration Conseil, il pourrait même prévoir des entretiens individualisés avec les futurs entrepreneurs, afin de séparer le bon grain de l’ivraie.
Autre avancée, la généralisation des titres de séjour pluriannuels, valables jusqu’à quatre ans. Les cartes actuelles sont délivrées pour un an et, si leur renouvellement ne pose pas de difficulté particulière, il implique parfois plusieurs allers-retours à la préfecture et de longues heures dans les files d’attente. Les titres pluriannuels devraient non seulement désengorger les préfectures, mais aussi tranquilliser les employeurs.
Les associations de défense des étrangers, elles, estiment qu’il s’agit d’une fausse bonne idée : ces titres pluriannuels risquent en effet d’hypothéquer l’obtention des cartes de résident, d’une durée de dix ans.
CV anonyme : adopté oui, appliqué bientôt ?
En 2006, après la crise qui avait enflammé les banlieues françaises, la loi pour l’égalité des chances était adoptée. Elle prévoyait notamment l’instauration du CV anonyme dans les entreprises de 50 salariés et plus, afin de lutter contre les discriminations à l’embauche. Le principe : des documents sans indication de patronyme, origine, religion, identité sexuelle, activités syndicales… Autant d’informations susceptibles de peser sur une embauche. Expérimenté durant six mois dans une cinquantaine d’entreprises, le CV anonyme s’est révélé plus ou moins utile selon les employeurs et les formes de discrimination. Dans certains cas, il a même pu pénaliser les candidats issus de l’immigration ou résidant en zone urbaine sensible. Qu’importe, la loi existe, il faut en publier le décret d’application. Le Conseil d’État donne six mois au gouvernement pour s’exécuter.
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