Libye : le « Monsieur pétrole » libyen face aux pressions des milices du sud-ouest

Une milice a bloqué pendant plus de deux jours la production du principal site pétrolier du pays. Des tribus touaregs l’ont rouvert, a affirmé Mustapha Sanalla, directeur de la National Oil Corporation (NOC), mais l’avenir reste incertain.

Un ouvrrier sur le site pétrolier de Brega, dans l’est de la Libye, en 2011. © Hussein Malla/AP/SIPA

Un ouvrrier sur le site pétrolier de Brega, dans l’est de la Libye, en 2011. © Hussein Malla/AP/SIPA

CRETOIS Jules

Publié le 5 octobre 2017 Lecture : 3 minutes.

Ce 4 octobre, la National Oil Corporation (NOC) annonçait la reprise des activités du site pétrolier de Sharara, dans le dans le sud-ouest du pays, après plus de 48 heures de blocage. Le site produit entre 250 000 et 270 000 barils par jour, soit environ un quart de la production nationale, et les pertes atteignent plusieurs millions de dollars. Jusqu’à 27, selon des chiffres communiqués par la NOC à la presse libyenne.

Depuis la reprise de la guerre en Libye, le site de Sharara, est un enjeu particulier. Depuis des mois maintenant, l’activité du site de Sharara est soumise à diverses pressions. Il n’est pas rare que des milices tentent de bloquer son activité ou ferment les vannes des pipelines qui traversent le pays, dans des buts le plus souvent de chantage économique ou politique.

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Des acteurs ambigus

Il reste compliqué de savoir ce qui s’est passé autour de ce site pétrolier. Un groupe armé d’Oubari, qui se fait appeler « Bataillon 30 » et se prétend lié au gouvernement d’entente nationale de Fayez el-Sarraj aurait pris le contrôle des lieux entre le 1er et le 2 octobre.

Mustapha Sanalla, directeur de la NOC, a assuré depuis les bureaux de la NOC à Tripoli que ces hommes protestaient au sujet de salaires non-versés. Il semblerait que les miliciens demandent aussi à être formellement intégrés à la Garde des installations pétrolières (PFG), officiellement chargée de protéger les activités du secteur.

Une source qui travaille sous contrat avec la NOC affirme que « le blocage n’a pas été le fait d’éléments de la NOC ». Mais l’allégeance de cette PFG est en fait souvent remise en question. Son précédent dirigeant, le jeune chef de guerre Ibrahim el-Jadhran, avait par exemple proclamé l’autonomie de la Cyrénaïque et n’avait pas hésité à bloquer plusieurs ports pétroliers au début de l’année 2014.

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Extorsions, chantages et trafics d’êtres humains

Aujourd’hui, c’est Idris Bukhamada, réputé fidèle au ministre de la Défense du gouvernement d’entente nationale, qui est censé diriger la PFG. Durant l’été, les forces spéciales Rada avaient arrêté un homme de la PFG, accusé de se livrer à divers chantages et extorsions, mais aussi au trafic d’êtres humains. Des blocages de l’activité pétrolière avaient alors eu lieu pour exiger sa remise en liberté.

Pourtant, sur le papier, les forces spéciales Rada et les hommes de la PFG sont censés rendre des comptes au même gouvernement.

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Mustapha Sanalla n’a pas caché sa colère. Cet homme très puissant, qui maintient le contact avec toutes les parties libyennes et la communauté internationale, a appelé à ce qu’une convention engageant tous les acteurs du conflit s’accordent pour criminaliser les blocages et interférences dans la production de pétrole.

Des conflits qui risquent de se reproduire

C’est finalement le conseil des tribus touaregs qui a dépêché des hommes pour sécuriser les lieux, nous explique le chercheur Tom Feneux, qui étudie le conflit libyen. Mustapha Sanalla a remercié ces derniers. En 2015, lors du conflit qui a opposé tribus touaregs et toubous dans toute la région d’Oubari, le site de Sharara avait été occupé par des miliciens touaregs.

Mais les conflits impliquant la production pétrolière ne sont pas terminés pour autant. Tom Feneux remarque que la municipalité de Sabha, dans la zone, a menacé de bloquer le site El Feel, pas loin de Sharara pour protester contre l’insécurité et les conditions de vie dans le sud libyen.

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